Orbite du Ráith Mebd, Autremer
Discrètement, Erenwë ouvrit la porte de la chambre. Ni Innafay, ni Syandel n'étaient en vue ; encore moins son père et le terrible Śimrod. Ils étaient tous reçus chez le roi Edegil. S'avançant vers le lit, elle prit le temps de se recoiffer, avant de venir, tel un chat, y grimper à quatre pattes.
Elshyn y était allongé. Eren posa la main sur le torse nu du jeune ældien, évitant de toucher l'espèce de gélatine brillante qu'Innafay avait étalée sur sa blessure. Lentement, elle effleura de ses doigts fins les muscles ciselés de ses abdominaux, avant de descendre plus bas, encore plus bas.
Elshyn ouvrit les yeux. Eren était assise sur lui, en train de le chevaucher, ses yeux brûlants posés sur lui.
— Mais qu'est-ce que tu fais ? gémit-il, encore groggy.
— J'utilise mon bien. Celui que j'ai gagné de haute lutte, en vendant mon âme au roi des clowns, au risque de me faire emporter par deux Aonaranan.
Elshyn, fronçant les sourcils, réprima un bref ricanement.
— Arrête, gloussa-t-il en poussant la jeune ældienne sur le côté. Tu veux me tuer, c'est ça ?
Allongée à ses côtés, Eren le fixait, de ses grands yeux affamés.
— Non. Je veux juste... vérifier encore une fois que tu es bien vivant. Que ce n'est pas une farce, un truc de théâtre !
Elle avait cru le perdre. L'horreur absolue, le vide intersidéral qu'elle avait ressenti alors ! En se rappelant ce néant noir et indescriptible qui l'avait happé, rampant sur elle comme s'il avait guetté toute sa vie pour ce moment, afin de la dévorer, Eren frissonna.
C'est l'appel de Shemehaz, lui avait expliqué Syandel. Le Mal absolu qui attend, tapi, au fond du cœur de tout ædhel. La jalousie, le désir de posséder, la frustration de la convoitise, la peur de perdre, de ne pas être à la hauteur... Voilà ce dont elle se nourrit. Mais tu l'as repoussée. Tu as choisi de prendre un risque, et de te sacrifier pour sauver ce filidh, mon frère Elshyn. Ton courage, ta dévotion pour ce jeune mâle que tu as pris le risque d'aimer, et surtout, ta flamboyance, ton sens de la mise en scène ont plu à l'Amadán. Et il a décidé de vous sauver tous les deux. Mais maintenant, tu dois honorer ton serment. Tu dois le servir, jusqu'au dernier jour de ta vie, comme nous tous. La Voie du Témoin n'est pas de celles dont on peut se détourner. Au moment même où tu choisiras de la quitter, un des Étrangers que tu vois là apparaitra dans ton dos, et tu finiras de la plus terrible des façons : consumée par Arawn pour l'éternité.
Les Étrangers, les Aonaranan. Les deux figures masquées étaient restées debout en retrait pendant ce petit discours d'intronisation, à distance respectueuse l'une de l'autre, comme si risquer de se toucher pouvait provoquer l'annihilation de l'un des deux. Ils portaient tous les deux un shynawil d'un noir sidéral, doublé de motifs aux armes des guildes qui leur avait remis leur charge : l'un bleu et rouge, l'autre noir et blanc.
Ces sinistres personnages n'étaient pas restés longtemps. Comme il se doit, personne ne leur avait adressé le moindre mot, et ils n'avaient pas fait entendre le son de leur voix. Après avoir observé Eren de leur air inquiétant et de leurs yeux insondables, leur visage masqué et couronné de lames acérées penché sur le côté, ils s'étaient tout simplement volatilisés. Pfffft. Et bien sûr, cela n'avait inquiété personne.
Mais le plus bizarre était arrivé après. En quittant l'orbite de Taranis, la guilde, qui pansait ses blessures et pleurait ses morts – à la façon filidh bien sûr, c'est-à-dire avec autant de rires que de larmes – avait reçu le message d'un navire ældien qui demandait à les accoster. La requête avait surpris Syandel : jamais aucun équipage ædhel n'aurait osé faire une telle demande à une guilde. Le vaisseau en question était le cair d'un sidhe, que Syandel reconnut comme étant celui d'Ar-waën Elaig Silivren. Pour cette seule raison, se souvenant de l'accueil de ce dernier, il répondit positivement, et c'est ainsi qu'Erenwë s'était retrouvée en face de son père.
![](https://img.wattpad.com/cover/252069289-288-k844063.jpg)
VOUS LISEZ
LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)
خيال علمي"Lle naa vanimë. Tu es mienne." Pour lui, je suis sa chose : une captive, une esclave. Qu'il traite mieux que les autres, qui a le droit à certains égards. Qu'il subjugue avec ce pouvoir d'attraction incroyable propre aux ældiens, qui fait perdre la...