XXXVIII - Ennemi malgré Lui - Partie 2

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Ses yeux grands ouverts, elle regardait sa mère cribler de regards haineux son ventre qui s'arrondissait au fur et à mesure des mois.

En dehors de son père, qu'elle avait estimé mauvais avec elle, la jeune femme s'était reportée sur sa mère, ne doutant pas de l'amour inconditionnel qu'elle lui portait, malgré que celle-ci mourut dans ses couches. C'était le comble pour elle : celle qui lui avait fait don de la vie, aurait préféré la voir raide morte.

En fait, son confort mental, le faible équilibre qu'elle avait essayé de maintenir pour stabiliser ses dix-sept ans de souffrance, se briserait avec les chaînes d'Uraera. Finalement, son père n'était pas coupable et sa mère l'exécrait de toute la force de son âme dégénérée.

— Et Père ? demanda-t-elle, difficilement. M'aimait-il ?

Uraera fit une moue dégoûtée, comme si Lunera n'était qu'une souillure sur ses bottes.

— L'amour, hein ? répéta-t-elle avec arrogance. Tu allais naître, je n'avais plus de raison de rester à Arkhess. Je voulais que Zahira accouche loin de tout le monde. Je suis rentrée au Palais des Chimères, à Ganymède. Sa véritable nature était cachée mais la petite masure que j'avais laissé suffisait amplement. J'emportais avec moi tout un tas de choses utiles d'Arkhess. De la nourriture, un vaisseau, un dragon et même un fragment du cristal catalyseur.

« Comme prévu, Zahira a accouché. Une fois hors de son être, j'ai ordonné immédiatement à Darkodem de l'assassiner.

— NOOOOOOOON ! hurla Lunera en s'agrippant le visage de ses mains.

Elle sentait la terre de dérober, sous elle. Sa tête tournait, tandis que son esprit répétait la terrible phrase nonchalante d'Uraera qui venait la frapper comme un fléau, comme une malédiction.

Après ses parents, Darkodem avait assassiné sa propre épouse. Elle se doutait d'une histoire sombre entre eux, mais jamais, jamais, elle n'aurait pensé une telle chose.

— Le dragon que j'ai amené s'est bien régalé, ajouta méchamment Uraera.

La pauvre Lunera, anéantie, se mit à pleurer de plus belle en pensant à la dépouille de sa mère, donnée en pâture à Dracaena.

— J'ai encore reporté le temps où Darkodem devait me délivrer d'ici, reprit la détenue. J'ai dû t'élever. Sans rien, ni personne autour de toi, tu ne pouvais que t'accrocher à lui. Je connais votre faiblesse, à vous, les êtres humains. La solitude est votre pire ennemie. Alors, j'ai essayé de créer en toi un amour fou et un attachement malsain pour Darkodem. La nature de Zahira, la plus folle des Javn, m'y a bien aidée, ajouta Uraera, en jubilant.

Lunera ne répondit pas. Des larmes roulaient lentement sur ses joues. Elle n'avait plus la force de réagir. Son existence n'était qu'un vaste mensonge.

— Mais Darkodem me résistait davantage, s'énerva Uraera. Ce bâtard t'aimait. Plus que tout. Il voulait te protéger de mes griffes. Tout asservissement devint très difficile.

Lunera réagit soudain, en se redressant, suppliante. Son père l'aimait donc, au moins un peu ? Ce n'était donc pas une illusion ?

— Devant toi, il me combattait férocement. Il essayait de contrer chaque parole cruelle que je voulais te lancer en essayant de les modérer. Jamais il ne m'avait résisté comme ça.

Terreur Lunaire - Livre 2 - Geôle CristallinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant