Terreur Lunaire - Livre 2 - Geôle Cristallin

XIX - Visite chez les Lamias - Partie 2

  La lamia se tourna vers Solèna.

— C'est bien la première fois qu'un être humain me demande mes raisons... Je dois avouer que cela me fait plaisir de parler de nous.

Étonnée, Solèna ne trouva quoi répondre tant elle pensait que Lunera leur avait attiré des points négatifs via son indiscrétion. Pour toute réponse, ce fut la reine qui lui fit don d'un coup de pied, cette fois.

— Au temps d'Uraera, nous étions un peuple humain qui vivait en retrait, se cultivant à proximité de la nature. Le ciel, la étoiles, la terre, les plantes... Nous vivions en harmonie avec notre environnement.

— Nous nous recueillons dans cette proximité, encore aujourd'hui ! intervint l'Oracle Freya.

— Exactement, acquiesça la Grande Dame Vipérine. Nos légendes racontent qu'un jour, cependant, Uraera aurait maudit notre peuple. Nous avons été réduits en animaux avilissants à l'espérance de vie réduite, pervertis par une magie profane qui émanait de cette dangereuse femme. Nous vivions enfermées à l'étroit dans des corps de bête jusqu'au jour de la délivrance.

« Après le Conflit des Trois Soeurs, lorsqu'Uraera fut scellée, les jumelles Janna et Jahanama réparèrent les torts sur terre causés par leur aînée. Quand elles vinrent à nous, elles tentèrent du mieux qu'elles purent de briser la malédiction d'Uraera. En vain, malheureusement. Elles ne purent qu'endiguer une partie du mal, nous rendant au moins un visage et un corps presque humain.

« Malgré la perte terrible de nos membres, nous nous étions débarrassées d'une grande partie de ce maléfice. Nombre d'entre nous ont recouvert la santé. Nous devons beaucoup à Janna et Jahanama alors nous nous efforçons de perpétuer la reconnaissance de nos ancêtres en entretenant toujours des relations cordiales avec leur descendance. Janna et Jahanama s'étant installées à Arkhess, il est donc tout naturel pour nous d'agir auprès du royaume.

Très intéressée, Lunera ne se rendit pas compte tout de suite que la prêtresse s'était tue. Une avalanche de question déferla dans son esprit.

— V-vous les avez connues... les Trois Soeurs ? demanda-t-elle, impressionnée.

Contre toute-attente, la Grande Dame éclata d'un rire cristallin, amusée par les propos naïfs de la reine d'Arkhess. Chaque fois qu'elle réagissait étrangement, Lunera sentait son sang se glacer dans ses veines, craignant d'avoir fait un faux pas fatal.

— Pardonnez l'effronterie de ma surprise, dit-elle en riant doucement. Non, Ange d'Arkhess, je ne suis qu'une jeune Dame Vipérine, vous savez. Nous autres, les lamias, avons certes une grande longévité. Mais d'autres Dames m'ont précédée depuis les balbutiements de notre peuple. Pour tout vous dire, je suis au sommet depuis plus de trois cents ans maintenant.

Lunera écarquilla ses yeux, abasourdie. À en voir ses traits jeunes, elle ne lui aurait accordé pas plus de trente ans.

— Je... j-je comprends...

Lunera se tourna ensuite vers Solèna, qui fixait la prêtresse, buvant ses paroles.

— Janna et Jahanama ont vécu à Arkhess ? lui demanda Lunera. Je pensais que ce n'était qu'Uraera.

Solèna sursauta, coupant court à son écoute béate.