II - Terre Mère - Partie 1

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15 février 1875 — ???

Engloutie par une masse marine insondable, Lunera se sentait suffoquer. Les eaux froides s'immisçaient dans ses vêtements et l'attiraient dans les abysses. Se griffant la peau de la gorge, Lunera n'en pouvait plus. De l'air, il lui fallait de l'air ! Elle allait mourir noyée. Incapable de retenir davantage sa respiration, Lunera céda, laissant échapper une flopée de bulles. Traîtresses, les eaux emplirent sa bouche et descendirent dévorer ses poumons. La douleur était atroce. C'était la fin. Lunera sentit ses sens tomber dans le déclin, et elle-même sombrait dans un état de torpeur. La mort, sûrement.

Lunera se redressa subitement, en poussant un cri d'effroi. Toute transpirante, sa poitrine s'élevait et s'affaissait au gré de sa respiration chaotique, tandis que son coeur palpitait violemment entre ses côtes.

Confuse, la jeune fille fut prise d'un soudain accès migraineux, dont elle ignorait l'origine. Elle voyait des scènes floues et terrifiantes, représentant tantôt son père, tantôt Assad, entrecoupés par des flash lumineux.

— Ah... gémit-elle en se massant les tempes.

Lunera se rallongea, abrutie par ses maux de tête. Elle resta prostrée une bonne demi-heure, ne songeant à rien d'autre. D'ordinaire, ses crises ne duraient jamais plus de quelques minutes. Celle-ci s'était installée de manière insidieuse et laissait la pauvre fille dans un état désolant.

Au fil du temps, la douleur s'amenuisait, permettant à Lunera de retrouver une lucidité relative. Les yeux fermés, elle demeurait toujours allongée, attendant que son mal ne disparaisse totalement.

Mais au fait... Où suis-je ?

Rouvrant brusquement ses yeux, la jeune fille se redressa, le visage craintif. Les oreilles aux aguets quant au moindre bruit, Lunera restait immobile, tandis que son regard analysait les lieux. Elle était dans une petite chambre, aux murs couverts d'un papier peint vert défraîchi. Elle était allongée sur un lit à barreaux métallique et une couverture vieillotte la couvrait. Chichement meublée, il n'y avait qu'une petite commode en face de sa couchette. Au-dessus d'elle, les rayons du soleil passaient à travers une petite fenêtre. Lunera se retourna et leva sa tête vers le carreau.

La lumière solaire la troublait. Dans ses derniers souvenirs, Lunera sombrait dans les ténèbres des torrents callistois. L'air manquait terriblement, et au moment où elle s'était résignée à mourir, elle se souvint avoir vu son pendentif s'éclairer. Elle porta sa main à son cou. La larme de saphir était absente.

Où suis-je ? Que fais-je ici ? Comment suis-je arrivée ? Depuis combien de temps... ?

Agitée, Lunera dégagea les draps qui la couvraient et posa un pied sur le sol froid. Elle amorça un geste pour se lever, mais à peine fut-elle sur ses jambes, que celles-ci se dérobèrent.

— Ah ! cria-t-elle, en retombant sur le matelas.

CLAC ! Une porte se referma à proximité. Sentant son échine se dresser et ses cheveux se hérisser, la jeune fille tourna sa tête vers l'origine du son. La personne qui était arrivée s'affaira dans un remue-ménage bruyant. Lunera, toujours sur le qui-vive, fixait avec de grands yeux la porte en biais, s'ouvrant sur un couloir obscur dont elle ne voyait que le début.

Soudain, plus aucun bruit ne se fit entendre. Sous tension, Lunera en tremblait presque. Des bruits de pas retentirent, et des savates raclèrent le sol.

Terreur Lunaire - Livre 2 - Geôle CristallinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant