Terreur Lunaire - Livre 2 - Geôle Cristallin

XXIX - Les Affres de la Guerre - Partie 2

  Tendue, Saphir demeurait toujours accoudée à la fenêtre et lançait des regards discrets vers Shems et ses chevaliers. Elle n'avait toujours pas abandonné son plan de porter secours à Fenrir et n'attendait que le moment opportun pour échapper à la vigilance du chevalier maître.

— Regardez ! cria-t-elle soudainement en feignant la surprise.

Alertés par son cri, ils fondirent vers elle et leurs regards suivirent son doigt pointé vers les confins de la capitale.

— Que se passe-t-il ? demanda Shems, inquiet, ne voyant pas ce qui pouvait troubler Saphir.

Alors, comme autrefois lorsqu'elle piégeait les chevaliers pour s'échapper hors de Sultakara, elle répondit :

— Immobilis !

L'éclat de lumière verte vint surprendre les chevaliers et Shems qui se retrouvèrent immobilisés par le sortilège traître de la princesse. Elle lui déroba sa propre épée.

— Princesse ! s'écria-t-il, horrifié.

— Désolée, souffla-t-elle en fuyant leurs regards, honteuse.

Sans demander son reste et indifférente aux cris de Shems qui lui conjuraient de rester, elle s'éclipsa hors de la tour et dévala les escaliers qui la ramèneraient à la terre ferme.

— Princesse ! l'entendit-elle hurler, alors que Saphir était presque arrivée en bas.

S'efforçant d'ignorer la trace cuisante de la honte, elle sauta les six marches restantes et repoussa la porte d'un coup de pied brutal, se retrouvant alors nez-à-nez avec...

— Lunera ! s'époumona-t-elle, médusée.

Sursautant violemment, la reine d'Arkhess bondit en arrière sur le parvis de la tour et pâlit, ne s'attendant pas à se retrouver de front face à l'autre Sorcière. Livide, revoyant en chair et en os celle qui avait fait de sa vie un cauchemar plusieurs mois auparavant, cette dernière leva la lourde épée de Shems en guise de défense.

— Comme on se retrouve...

Le silence sépulcral du palais amplifia le murmure de Lunera. Sentant un frisson parcourir son échine, la princesse déglutit et se mit en garde.

— Je ne suis pas venue pour toi... déclara Lunera. Ôte-toi gentiment de mon chemin. J'ai un saphir à récupérer et ce n'est pas toi.

— Après ma mère, c'est le royaume que tu vises ? cracha Saphir.

Une grimace de haine déformait les traits de la princesse, outrée que Lunera emploie un ton aussi doucereux pour s'adresser à elle. Oser revenir avec autant de sang sur les mains la dégoûtait au plus haut point.

— N'as-tu donc aucun remord à toujours à répandre le mal autour de toi ?

— Tais-toi ! rugit Lunera, soudain démente. Tu ne peux pas me comprendre ! Entre les jupons de ta maman et les jambes de ton papa, ajouta-t-elle avec mépris, tu as toujours eu une vie confortable.

— Pauvre folle, ce que tu dis n'a absolument aucun sens.

Lunera s'efforça de se calmer, de taire cette jalousie mordante qui la dévorait chaque fois qu'elle se confrontait à Saphir. Elle l'énervait tout bonnement.