ÉPISODE 83 - (partie 2/5)
— On avait demandé de la discrétion, Andy.
Red tourna sur lui-même et peina à comprendre le soupir exaspéré de Dean. Il jugeait son look de saison. Sa chemise blanche aux manches retroussées, ouverte sur trois boutons, brillait au soleil mais lui épargnait le calvaire du vêtement noir qui emmagasinait la chaleur. Son minishort grunge en jean effiloché laissait la vie belle à ses jambes.
Peut-être que son porte-clés en fausse fourrure de léopard, dépassant de l'une de ses poches arrière, était too much pour Dean. Mais en son âme et conscience de fashionista, il n'était victime d'aucune faute de goût. L'accessoire se mariait avec ses colliers dépareillés : un pendentif tribal avec deux crocs de félin blanc et jaune, un serti d'une croix celtique et gothique sophistiquée, et une fine chaînette argentée à ras de cou.
— Mais je suis incognito.
— Incognito n'est pas synonyme de discret, sinon on n'essuierait pas des œillades prononcées, grogna Dean.
Peut-être parce que t'es trop sexy avec tes lunettes de soleil, ton chapeau Fedora et ton physique de Cimmérien ! Red se garda de le dire et haussa les épaules. Tant que personne ne devinait leur identité, il n'allait pas s'inquiéter outre mesure. Dean ne fut pas de cet avis et décréta un changement de look express. Il le prit par la main et entra au hasard dans un magasin pour hommes du Greenwich Boulevard.
L'artère qui s'étirait entre le Colisée d'Oram et la Gare Centrale, en passant par l'Opera House, était une sublime dix voies bordées de grands acacias boules et de contre-allées dallées conduisant à différents jardins urbains. Les enseignes de luxe, bijouteries, cafés chics, hôtels et banques qui s'y succédaient en faisaient un lieu touristique et prisé par la jeunesse dorée.
L'espace d'un instant, Red se dit qu'ils auraient pu être un couple lambda flânant sur l'un des plus beaux boulevards de Saunes. Il laissa la chaleur de la main qui le remorquait de rayon en rayon l'envahir. Dean ne semblait pas réaliser l'image qu'ils renvoyaient. Nul ne saurait être accusé de sauter à la conclusion hâtive du couple, en l'entendant proférer sans la moindre discrétion :
— Tu devrais me couvrir ces jambes.
— Qu'est-ce qu'elles ont, mes jambes ?
En quoi dérangeaient-elles Dean ? La réponse vint, sarcastique :
— Elles sont un poil trop épilées, pour commencer, et trop exposées, pour terminer. Tu as de sérieuses lacunes en matière de discrétion, Andy.
— Mais je t'emmerde ! souffla Red, lorsqu'il nota le regard curieux des vendeurs et des autres clients.
À cette allure, Dean allait lui-même rameuter de la groupie et du selfie.
— Tu fais quelle taille ? Ça devrait t'aller, dit-il en lui tendant un pantalon en flanelle.
— À vue d'œil oui, mais je porte pas ça. Déjà, il fait chaud. Et ça n'ira pas avec mes godasses. En plus, c'est pas rock !
Dean s'impatienta.
— Tu sais qu'on n'a pas le temps de satisfaire tes caprices ?
— Je le savais que t'étais du genre à râler pour le shopping !
— Puis-je vous aider, messieurs ? proposa une vendeuse, avenante.
— Qu'avez-vous de léger, de plus habillé et de moins tape à l'œil ? demanda Dean.
Jugeant que des yeux aussi ronds que des sous-tasses n'étaient pas une réaction logique à sa demande, Dean vint à la seule conclusion possible. Elle les avait reconnus malgré leur couvre-chef et leurs lunettes de soleil.
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HOT CHILI - saison 3
Romantik. Il arrive que romance rime avec vengeance. C'est ce qu'apprend Red, lorsque son amour à sens unique pour Dean s'épanouit dans la vendetta. Résolu à ruiner la réputation de Sloan en s'aidant de coups de poing...