HOT CHILI - saison 3

S03 - EP 21 △ part I

CHAPITRE 81 - (partie 1/5)

Son père était nerveux.

— C'est moi qui prends un appart, et c'est toi qui stresses, remarqua Rudy.

— Ce n'est pas ce qui me préoccupe.

Red avait rendez-vous avec Charlie Evrard aujourd'hui. Le détective allait lui faire part de toutes ses découvertes, avant de les refiler à la police. Dean se demandait quelle serait la réaction du chanteur en apprenant qu'on avait enquêté sur lui. Il craignait aussi que Charlie mentionne l'enregistrement de sa confession. Dean n'avait pas encore eu le temps de le révéler à Red.

« Tu t'es trouvé des excuses avec sa convalescence. »

Il aurait pu lui en parler dimanche. Mais il s'était lancé dans la peinture d'un tableau de bonne heure, et seul le retour de son fils en soirée l'avait sorti de sa transe. Cela lui était quasiment sorti de la tête. À présent, il se trouvait à Darney-City. Pour dire à quel point la réaction de Red l'angoissait, il n'avait même pas appréhendé de remettre les pieds à Balmer après tant d'années d'exil. Il devait arrêter une décision, et vite, si Red le préoccupait tant.

— Écoute, fiston. Je ne vais pas rester. Je signe ce qu'il faut, et je te laisse gérer le reste. Tu rentreras en train.

— Pourquoi ?

— J'ai laissé une urgence à Saunes. Et tu es grand, maintenant. Ce sera ton bizutage de l'âge adulte.

— Il faut toujours que tu m'éduques avec des valeurs négatives ! soupira Rudy. Quel père sain d'esprit bizute son fils ?

Dean pouffa. Rudy se fit une raison. Ce devait être une séquelle d'éducation, comme disait son père.

— Tu n'auras pas besoin de moi pour transférer ton compte bancaire dans une agence de Balmer. Tu en profiteras pour repérer les établissements administratifs qui te seront utiles.

— Je peux faire ça juste avant la rentrée. Pour l'instant, c'est l'appart ma priorité.

— Déjà, c'est une bonne chose qu'on n'ait pas à tourner pour trouver où se garer, apprécia Dean, en coupant le moteur. La circulation à Balmer est juste infecte.

— J'en ai pas eu l'impression.

— Parce qu'on est à Darney-City. On peut dire que c'est une ville étudiante incluse dans la ville de Balmer. Elle est un peu excentrée, et tout un réseau de passerelles filtre les entrées et sorties des véhicules pour fluidifier la circulation. Ça permet aussi un environnement sécurisant pour les vélos.

Rudy avait remarqué l'accent mis sur les pistes cyclables. Il muselait son inquiétude et la mettait sur la peur de la nouveauté, mais il ressentait aussi de l'excitation. Il avait eu le temps de surmonter sa déception de ne pas étudier dans la même ville que Rey. Du moins, essayait-il de réagir en adulte, ne serait-ce que pour estomper le contraste avec la maturité impressionnante de Rey.

Son père semblait aussi changer d'attitude à son égard, en le responsabilisant plus. Dieu qu'il détestait ce mot ! On avait inventé la « responsabilité » pour brider la liberté qu'octroyait la majorité. Néanmoins, Dean agissait en douceur. Sans cesser de le couver, il le poussait à acquérir une certaine autonomie.

— On n'en a jamais parlé, mais qu'est-ce qui m'attend ici ?

— Tout le background des Leblanc, maugréa Dean.

— Mr Leblanc ! les accueillit un homme devant la grille d'entrée de la résidence.

La trentaine, plus proche de la quarantaine que de la vingtaine, il avait un côté à la fois accessible et professionnel grâce à son blaser à manches courtes, ouvert sur un T-shirt uni, et ses sneakers sombres prolongeant un jean brut. Il cligna des paupières devant la ressemblance de ses clients.