S03 - EP 04 △ part I

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ÉPISODE 64 - (partie 1/3)

Le nom déposé « SO.Y.Shoes® » ne venait pas d'une inspiration fulgurante de son créateur. La dénomination étrange résultait de la collaboration de deux cerveaux un peu fêlés. Après que Dean lui eut exposé ses intentions concernant Sloan, Will s'était interrogé :

— Honte sur toi, Sloan, je veux bien. Mais alors... pourquoi des chaussures ?

Comment une marque de chaussures pouvait-elle nuire à la carrière politique ou à la vie sociale du dénommé Sloan ?

Dean, qui misait sur la médiatisation outrancière de ses attaques, avait alors révélé son intention de faire de S.O.Y.S, sigle issu du titre du single des Beat'ONE, une marque déposée. Jay et lui avaient déjà entreprit des démarches de brevetage. Sur un coup de tête, il avait mis Will au défi de nommer son nouveau bébé « so, why shoes », stylisé « So Y Shoes » de façon à ressortir le branding S.O.Y.S.

Will avait marché, avançant que ce serait une belle anecdote à raconter à la presse. Mais à vrai dire, le concept ne lui appartenait plus entièrement. Il concevait tout à fait que Dean ait un droit de regard sur le nom déposé de sa création, vu tout ce qu'il avait apporté à cette dernière. Il semblait que les rouages de leur esprit artistique aient été montés selon le même schéma.

Will avait la paternité de l'idée mère, mais nombres d'idées filles étaient venues de Dean. Si bien qu'à l'heure actuelle, SO.Y.Shoes® appartenait aux deux hommes à hauteur d'un ratio 70-30. Au départ, Dean avait décliné. Son but n'avait jamais été de récupérer des dividendes sur ce projet. Seulement, le créateur ne lui avait pas laissé le choix. Will exécrait le plus petit sentiment de dette envers autrui, aussi cordiale soit leur relation. Pour lui, c'était aussi une façon de reconnaitre les qualités conceptrices d'un homologue.

La ligne promotionnelle avait été axée sur l'ambigüité drapée d'humour. Un enrobage hilarant visant à adoucir la rigidité du comité de censure sur un sujet à controverse. Et même si Dean avait eu dans l'intention de faire sauter des verrous avec ses prérogatives MIP, Will voulait avant tout que la campagne choque et amuse.

Eux s'étaient amusés comme larrons en foire en créant le slogan. Ç'avait été le festival du sous-entendus et du jeu de mots. Pour efficacement imprimer ces catch phrases dans l'esprit du potentiel consommateur, on leur avait associé une bande son exaltante : l'instrumental du prochain single des Beat'ONE. Son élégance « brutale » serait difficile à dénigrer sans donner dans l'hypocrisie. La musicalité de cette réalisation se voulait l'écho de la violence et de la beauté de la nature humaine. Will avait jeté dessus son dévolu dans le but de jouer sur la mémoire auditive et l'association d'idées.

SHAME ON YOU encore non diffusée, ceux qui voudraient télécharger la bande son de la pub rentreraient bredouilles de leurs recherches. Quand viendrait sa distribution, tout fan ou non établirait le lien entre le single et la chaussure. Ainsi Will s'assurait une clientèle parmi les Holy Suckers et les détracteurs.

Pour résumer la pub, elle était une ode à la SO.Y.Shoes® faisant l'apologie des valeurs depuis toujours défendues par le créateur : indépendance, différence, audace.

De ce fait, « Step On Your Shoes » induisait la volonté d'agir, l'idée d'indépendance, et découlait du côté pratique « deux en un » de l'item. En remodelant les pans arrière de la chaussure, on passait d'un modèle fermé à ouvert.

Cela se faisait de deux manières. Soit on marchait directement sur le tissu arrière afin de changer la basket de ville en sandale. La matière utilisée était innovante, étudiée pour minimiser l'usure du piétinement. Soit la transformation s'obtenait par un astucieux jeu de fermeture et boutons pression, œillets ou rivets. Dans ce cas, les pans arrière étaient rabattus sur les côtés, vers l'intérieur ou l'extérieur pour un rendu différent. Cette fonctionnalité expliquait le « Stand Out YourSelf » du slogan, qui appelait à se démarquer, à oser la différence et sortir du lot.

« Stay on air... » était un synonyme de « stay tuned », et découlait de l'anecdote avec Naytray et SHAME ON YOU. Ceux câblés sur la bonne fréquence radio avaient appris de ce groupe le titre du prochain single des Beat'ONE. Moralité : il fallait rester à l'affut, rester connecté, rester « branché », pour être à la page comme tout it-boy ou it-girl à la mode.

Avec toutes ces déclinaisons, Will avait de quoi dire lors de ses interviews, en plus de ses éloges envers le réalisateur et le chef opérateur. Les deux hommes avaient su créer le parfait scénario mettant en lumière l'ambigüité dont il se prévalait. Exploitant savamment le potentiel de leurs jeunes acteurs inexpérimentés, ils avaient exigé de l'extraversion, du charme et du fantasque. Le tout dans la joie et la bonne humeur entre les différents lieux de tournage, à tel point que Dean avait eu l'impression d'être en colonie de vacance en pleine excursion cinématographique.

L'équipe de tournage ne travaillait qu'en lumière naturelle. Aussi les prises de vues avaient été planifiées sur tout le week-end. Une aide inopinée avait réduit ce temps de moitié, quand Sacha s'était ramenée avec du renfort.

Le film publicitaire ne racontait rien de transcendant en soi. Des bouts de vie, des moments simples de l'existence de tout un chacun, du fan-service aussi peu subtil qu'amusant, montraient le côté pratique de la chaussure et soulignait la beauté de sa ligne épurée. Mais tout le piment était venu du cadrage et du montage. De la banalité était né de l'impertinence ; de l'outrage avait surgi de la poésie. Un beau travail qui justifierait que les spots explosent le nombre de vues sur les sites d'hébergement.

Les SO.Y.Shoes® annonçaient l'été. Cependant, on ne mettrait pas long feu à comprendre qu'elles annonçaient surtout un tournant dans la propagande anti-AVDL. Avec un coup de pouce MIP, la campagne promotionnelle emplissait peu à peu le pays d'affiches. Bientôt, tous les supports médias feraient une allusion à la nouvelle chaussure de W.M et ses slogans douteux. La frontière entre Sloan et Allen Van Der Litz irait en s'amenuisant, à mesure que la presse nourrirait la polémique, et de facto, la popularité du produit.

Dean n'avait fait que jeter la première boule de neige. Le bouche à oreille et les réseaux sociaux finiraient le travail en déclenchant une avalanche. Hélas, il y aurait une contrepartie : l'exposition médiatique de son fils, en dépit de sa censure. Les masses médias étaient ce géant devant lequel la possessivité paternelle d'un Leblanc pliait l'échine.

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TBCEPISODE 4 - part 2

╬MEDIA╬

Intro vidéo : Vargo - So sensual. Juste parce que j'avais ce son en boucle dans mon casque quand j'ai mis à jour cette partie.

Petit chapitre "introductif" d'un long chapitre de making-of. J'ai pris le parti de découper ainsi, afin de publier en une seule fois tout le tournage de la pub. Au prochain, vous serez un peu baladés dans la ville de Saunes.

HOT CHILI - saison 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant