Chapitre 2

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Athénaïs avait jeté son portable à côté d'elle et s'était laissée tomber sur son matelas, épuisée par la discussion houleuse qu'elle venait d'avoir avec son petit ami Thibault. Il lui avait encore fait une scène ! « Tu n'es jamais disponible ! Si ce n'est pas ta thèse, c'est tes concerts... Il va falloir que tu choisisses ! On a du mal à croire que tu veuilles te marier ! ». « Gnagnagna ! » grogna-t-elle, la tête enfouie dans ses couvertures.

A l'âge de vingt-quatre ans, la jeune femme à la peau mate et aux longs cheveux noir ébène avait tout pour être heureuse : une famille aimante, un travail stable, une passion dévorante qu'elle exprimait au grand jour, un copain depuis huit mois avec qui elle s'était rapidement projetée.

Planifier un avenir avec Thibault était assez simple : les deux amis de longue date s'étaient longtemps tourné autour avant de se mettre en relation. Ils se connaissaient donc très bien et s'étaient lancés pleins de confiance en leur avenir.

Avec le temps, cependant, Athénaïs avait relevé les petites choses que l'on ne remarquait que lorsqu'on se mettait en couple : le manque d'indépendance et le machisme latent de Thibault d'un côté, son besoin à elle de suivre ses aspirations de l'autre.

Thibault était l'homme de sa vie, elle en était persuadée. Toutefois, une sensation d'oppression la saisissait parfois dans cette relation dans laquelle tout paraissait pourtant aller de soi. Elle se souvenait alors des paroles de sa mère : les hommes étaient tous pareils, tous un peu machos, tous un peu possessifs, tous dépendants de leur femme. « Laisse un homme seul, ça va toujours se retrouver quelqu'un. Un homme ne sait pas rester seul... En plus, tu as de la chance d'avoir trouvé un garçon qui accepte ton souhait de rester vierge jusqu'au mariage ! Ce n'est pas tout le monde... ! »

En clair, le problème, c'était elle.

Personne de son entourage n'arrivait à comprendre sa soudaine soif de liberté et sa double-vie de radiologue et rappeuse. Tous s'enquéraient de la réaction de Thibault devant cette nouvelle lubie, et à chaque explication, Athénaïs se sentait un peu plus coupable.

Elle soupira. Il était vrai qu'elle avait été de chanceuse de tomber sur Thibault, ce jeune ingénieur, malgache et chrétien comme elle. En plus de cette double carrière, il avait tout à fait accepté son choix de ne pas coucher avec lui.

C'était une chose qui tenait réellement à coeur à Athénaïs, très pieuse. Lui, au contraire, avait fait des siennes lors de ses relations précédentes. Il lui avait même confié avoir fréquenté quelques clubs libertins avec son ex, ce qui avait déconcerté la jeune femme dans sa conception de leur religion et culture communes mais elle avait décidé d'accepter son passé avec indulgence. Elle en avait beaucoup discuté avant de sortir avec lui. S'il était avec elle, c'était qu'il savait à quoi s'en tenir.

Son portable lui signala par une vibration l'arrivée d'un message, interrompant le fil de ses pensées.

« Yo Saya ? Tu passes au stud' ce soir ? »

C'était l'arrosage de l'album de Deen ! se souvint-elle, brutalement ramenée à la réalité. Le Burbigo avait enfin sorti un opus et ils comptaient fêter cet évènement comme il se devait, entre amis. Athénaïs répondit rapidement à Ken, l'expéditeur du SMS puis replongea dans sa réflexion.

L'agacement de Thibault était légitime. Malgré ses efforts pour tout concilier, elle était consciente qu'il lui faudrait faire un choix, un jour. Et ce serait Thibault, elle le savait au plus profond d'elle. Elle devait apprendre à le choisir si elle voulait vraiment que leur relation marchât jusqu'au bout. Ce soir, elle se rendrait chez lui pour aplanir les choses et tout rentrerait dans l'ordre.

*****

Elle ne viendrait pas ce soir car elle s'était encore disputée avec son copain. Quand saisirait-elle que cette relation était vouée à l'échec ?

" Non. "Où les histoires vivent. Découvrez maintenant