Chapitre 25

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Ils avaient soigné leur apparence comme jamais auparavant. Effectivement, les gars de l'Entourage avaient dévalisé les boutiques de tout Paris. Athénaïs avait essayé de garder le secret de sa double carrière du mieux qu'elle avait pu mais il n'empêchait que quelques personnalités seraient présentes lors de sa soutenance de thèse. Et puis, ils ne voulaient pas se ridiculiser devant ses collègues de travail et faire honneur à celle qui serait dans quelques heures « Docteur en médecine ».

Ils s'étaient donné rendez-vous chez Ken qui avait un appartement assez grand pour les accueillir et leur permettre de se préparer, d'autant qu'il était assez proche de la faculté de médecine où se tenait l'évènement.

Ce dernier avait choisi un costume gris sur une chemise blanche et une cravate bleue foncée. Athénaïs avait quelque peu pris ses distances avec lui depuis l'incident de la Saint Valentin, un mois auparavant. Hary avait fini par avoir connaissance de leur sortie nocturne et s'il ne lui avait adressé aucun reproche, elle avait préféré s'éloigner d'elle-même. Alors ce soir, pour se venger un peu de cette séparation qu'il n'avait pas choisie, il passerait sur un mode beaucoup plus offensif. Ce n'était pas tant une question de séduction qu'une question d'honneur, se persuadait-il. De toute façon, il était revenu avec Olivia — qui s'était envolée Outre-Manche pour un défilé. Si c'était sur la classe qu'Athénaïs avait choisi Hary, il lui montrerait que lui aussi, pouvait se révéler être un parfait gentleman. Il le prouverait à elle, tous ses amis, les célébrités de la scène musicale française, et même à ses parents qui seraient présents.

« Ken, il joue sa vie, là, se moqua Mamadou avisant son ami qui devait avoir effectué une dizaine d'allers-retours au miroir depuis cinq minutes.

— Ferme ta gueule, Doum's, grogna le concerné sous les ricanements de ses amis. On t'a vu avec Adèle.

— Le gars ne nie même pas alors qu'il a une go !

— De toute façon, y'aura son gars. C'est juste pour mon honneur, genre tu me tej' pas comme aç'.

— Genre, y'aura son mec ? s'enquit Idriss.

— Bah ouais, répondit Ken, pour qui la réponse tenait de l'évidence.

— 'tain, j'ai hâte de voir sa gueule de p'tit bourgeois ! » commenta Mamadou, en crachant la fumée de cannabis hors de sa bouche.

Ken, au contraire, aurait préféré se passer de cette entrevue. Il allait subir le regard d'Athénaïs, béat de pâmoison devant l'homme qui incarnait son antithèse, le gars qui avait réussi selon les codes de la société, qui, tous les jours, savait de quoi son lendemain serait fait, celui qui la rassurait, celui qui la sécurisait, celui qui était propre à présenter à ses parents, sa famille, ses amis. Il devait s'interdire de ressasser, hélas ! ses sentiments, eux, ne disparaissaient pas. En temps normal, il aurait lâché l'affaire depuis une éternité mais Athénaïs...

Athénaïs était unique. Sans le vouloir, elle le poussait à mûrir, à arrêter de jouer la politique de l'autruche et se poser les bonnes questions face à son avenir. L'observer se démener autant pour vivre ses rêves, accepter en silence les compromis pour atteindre ses objectifs le faisait grandir et rejeter l'oisiveté qui le précipitait plus vite vers la mélancolie et la langueur. Néanmoins, quelques craintes et moments de doutes pouvaient entamer cette carapace de détermination qu'elle s'était forgée. Des instants furtifs qu'il avait pu entrevoir et qu'il avait peut-être pu adoucir, qui sait ? Ce fol espoir de pouvoir être un rempart, un bouclier pour cette femme qui s'était un jour interposée entre lui et sa dépression, maintenait ses sentiments en vie.

Peut-être que le fait de la voir heureuse dans les bras d'un autre ferait définitivement mourir son attachement pour elle.

*

" Non. "Où les histoires vivent. Découvrez maintenant