« Quelque part, je t'envie.
— Ah bon ?
— Dans une autre vie, j'aurais kiffé être comme toi, surtout si j'avais été un garçon !
— Tu peux toujours...
— Oui, bien sûr, mais tu as compris ma démarche. »
Il y avait eu un silence ponctué par un hochement de tête de Ken.
« Mais tu sais, moi aussi, je t'envie. »
Ils n'avaient pas regardé le film jusqu'au bout, cette fois. Ils avaient continué à parler de choses et d'autres, de leurs relations, surtout.
« Tu m'envies ? »
Athénaïs avait dévisagé Ken, incrédule. Ce dernier avait souri devant la physionomie franchement drôle de son amie. Effectivement : il l'enviait. Tout compte fait, les nombreuses conquêtes du rappeur du sud parisien ne faisaient pas le poids devant la relation unique qu'avait entretenue Athénaïs avec son cher crétin d'ingénieur. Il avait consommé et goûté aux plaisirs que l'amour pouvait procurer, certes, mais il n'avait, pour ainsi dire, quasiment jamais aimé.
La seule exception qu'il pouvait éventuellement concéder était peut-être Sophie, avec qui il était sorti pendant deux ans, lors de ses années lycée. Il avait été sa première expérience sexuelle et elle avait été la première à découvrir l'univers du rap dans lequel il baignait. Malheureusement, ce même univers l'avait attrapé pour ne plus le relâcher et elle l'avait trompé puis était partie, abandonnant toutes leurs promesses d'avenir derrière elle. Ils étaient jeunes, trop jeunes pour laisser passer leur chance d'atteindre leurs idéaux : lui, le rap, elle, le chevalier servant qui la placerait en premier dans sa vie. Depuis le temps, elle devait s'être mariée, et lui avait relancé le compteur des demoiselles qui tomberaient sous son charme, émoussant à chaque nouvelle rencontre son goût pour le sexe. Aujourd'hui, Olivia et lui se partageaient les blessures qu'ils s'étaient eux-mêmes infligées, sans réellement les panser.
Athénaïs, elle, n'avait pas ménagé ses efforts dans son histoire. Elle avait persisté jusqu'au bout, prête à pardonner la trahison ultime avant de se rendre compte que rien ne pourrait plus jamais les réunir, Thibault et elle. Et même après cela, elle gardait un grand respect de ce qu'ils avaient partagé, et croyait encore en l'amour pur, au don total de soi. Elle avait l'air d'en avoir appris plus en huit petits mois de relation que lui en une quinzaine d'années d'expérience en maux d'amour et nuits courtes.
Ken se retourna dans ses couvertures. Le parfum de sa crème Nivea flottait encore sur sa peau. Pour lui éviter le joint du coucher, Athénaïs lui avait asséné sa technique spéciale : le massage du dos — avec une certaine réserve au départ, toutefois. Si les premières minutes lui avaient été d'un émoi languissant (Fort heureusement elle lui avait dit de se mettre sur le ventre!), l'application que la jeune femme avait mis à la tâche avait eu l'effet escompté et il était tombé dans un profond sommeil réparateur, contrairement à ses dernières nuits.
Il consulta son téléphone. Un message de la veille au soir, d'Athénaïs.
« Vu que tu dormais comme un bébé, j'ai failli te piquer un sachet, mais au final, c'est à toi de voir et de décider.
PS : tu as vraiment de la chance de pas être mon gosse. »
Athénaïs de Montespan, dans toute sa splendeur.
Il était huit heures du matin. Olivia rentrait cet après-midi de Los Angeles, se rappela-t-il, en apercevant la date du jour.
L'homme se passa une main dans ses cheveux bruns clairs. Athénaïs... Dans sa tête s'entrelaceaient des myriades de pensées à propos des discussions de la veille, quelques images du visage de la jeune femme tantôt fâché, tantôt contemplatif, sa voix fluette. Il crut s'enivrer de son parfum mêlant le musc et les fleurs. Ensuite surgit le souvenir de son corps sur le sien, si prégnant qu'il pouvait le dessiner de sa main ; puis ses dents qui agaçaient doucement le pavillon de son oreille gauche. Le cœur palpitant, il haletait de désir, en se figurant prendre place au-dessus d'elle. Il allait devenir fou, s'imagina-t-il, en prenant les choses en main pour soulager ce trop plein de libido qui inondait son être.
Au moment où il se rappela de la seconde où ils avaient failli craquer, son fantasme prit ses droits, transformant son refus de profiter d'elle en assaut durant lequel il plongeait lentement en elle, leur arrachant un long gémissement de satisfaction au subtil goût de victoire.
Il devait arrêter de se faire des films, lui soupira sa voix intérieure, consciente qu'un tel scénario ne se produirait sans doute jamais.
Mais le brun était parti trop loin, monté trop haut pour écouter quoi que ce fût. La tête rejetée en arrière, en perte d'haleine, il garda les yeux fermés deux minutes avant de pouvoir se remettre de ce qui avait été un orgasme étourdissant. Il chuchota un juron devant une redescente qui s'annonçait sévère. Dans le silence que seule sa respiration bouleversée troublait, il se mit enfin face à la réalité. Athénaïs était en train de lui faire perdre la tête.
***
Olivia n'en pouvait plus. Ken était tellement bon ! Au milieu des cris qu'elle ne retenait plus depuis un bon quart d'heure, la jeune femme aux longues boucles brunes peinait à s'entendre penser. Les sensations vertigineuses que lui prodiguaient les profonds coups de reins de son amant régulier l'envahissaient jusque dans sa conscience.
Depuis qu'elle était revenue des Etats-Unis, elle n'avait pas laissé Ken rentrer chez lui, tout juste pour récupérer du linge propre. Et pour cause, depuis son retour, elle était tout bonnement redevenue accro à lui. Il fut une époque où ils couchaient de cette manière passionnée mais quand ils s'étaient retrouvés, leurs étreintes s'étaient entre-temps attiédies. Peut-être que l'affirmation de sa liberté et ses absences répétées avaient provoqué un déclic chez l'insaisissable rappeur. Un coup de bassin plus prononcé la fit hoqueter, suivi d'un autre, puis d'un autre, et un autre... Olivia perdit le compte tandis qu'elle n'était plus que gémissements, agrippant les couvertures. Elle allait mourir d'extase.
Ken, lui, tout aussi essoufflé que sa partenaire n'avait qu'une seule personne en tête, mais ce n'était pas celle qui jouissait à plat ventre sous lui. Il ne devrait pas agir de la sorte, mais il avait cruellement besoin d'une échappatoire, et si cela pouvait satisfaire d'autres que lui, en manque d'amour... Ce qui lui suffisait de faire, c'était de fermer les yeux, d'imprimer son corps café au lait dans son esprit et de ne pas se réveiller.
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" Non. "
FanfictionBeau-gosse-du-rap-français. Ce surnom lui collait à la peau. Bad boy aux mille et une conquêtes, Ken, plus connu sous le nom de Nekfeu, jette son dévolu sur chaque fille qu'il croise, jusqu'à ce qu'il la rencontre, elle. Rappeuse au parcours atypiqu...