» Interlude : T.S. «

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- Tu n'as pas besoin de faire ça, mec, répète Harrison.

Une phrase qu'il a prononcé presque sans s'interrompre depuis dix-sept minutes. A la façon dont il prononce le tout d'une façon qui se fait de plus en plus molle à chaque fois - non, pas molle : désespérée, Thomas Shelby se demande si le jeune homme ligoté sur la chaise devant lui est encore conscient de ce qui est en train de se passer.

Des coups qu'il encaisse. De sa mâchoire, qui s'est disloquée depuis bien longtemps. De son nez, auquel il faudra plusieurs semaines et éventuellement de la chirurgie réparatrice. Du sang qui lui coule tout le long du visage, en particulier de l'arcade sourcilière droite qui a explosée dès le premier impact.

Des raisons qui l'ont amenées à se retrouver dans cette situation.

Après être partis de chez Finn et Isiah, Tommy, Arthur, Aberama, Johnny Dogs et encore quelques autres se sont rendus au Marquis of Lorne, où ils ont commencé par chasser tous les clients et à casser quelques vitres, bouteilles, verres et chaises au passage. Durant le procédé, Tommy s'est entaillée le côté extérieur de la main droite avec ce qui restait d'une bouteille de whisky premier prix, le genre de merde qu'ils n'auraient jamais servi à The Garrison.

A la façon dont à chaque fois qu'il cogne Harrison, il sent quelque chose de tranchant dans la main, il en déduit qu'il doit avoir des bouts de verre dans la peau. Ce n'est pas agréable, mais c'est mieux que l'état dans lequel Harrison se trouve et là, maintenant, c'est tout ce qui importe à Tommy.

Après que Johnny Dogs ait attaché Harrison sur une des seules chaises intactes du pub, Thomas les a tous laissé passer à tabac l'intéressé tandis qu'il les regardait faire, un peu à l'écart, une cigarette à la main.

L'avantage d'être à plusieurs pour ce genre d'actions, c'est que chacun a une façon de frapper particulière, ce qui évite qu'Harrison n'ait eu le temps de s'habituer et de se préparer avant chaque impact. Arthur a un faible pour les lames de rasoir de sa casquette avec lesquelles il lui a joliment amoché le visage - mais pas que ; Johnny Dogs ne jure que par les coups sur le ventre - rien de mieux pour engendrer une hémorragie interne...

Lorsque Tommy a estimé que chacun avait pu assez s'amuser - et surtout, avant qu'il ne reste plus rien de ce putain d'Harrison, il leur a ordonné de quitter le pub. Arthur a un peu protesté, bien sûr, mais n'a finalement pas insisté.

Et maintenant, ça fait presque une demi-heure qu'il n'y a rien d'autre en ce bas monde que lui et Harrison.

Pour ne pas trop fatiguer ce dernier, Tommy alterne passages à tabac et pauses régénératrices. D'expérience, il sait que rien ne vaut un peu de patience pour que l'autre puisse prendre pleinement conscience de ses douleurs physiques et mariner un peu. Est-ce qu'on va me tuer? Quand est-ce que ça va se terminer?

Il espère qu'Harrison se pose ce genre de questions, mais rien n'est moins sûr. Ce putain de connard est tellement à côté de la plaque qu'il y a moyen qu'il ne comprenne même pas vraiment pourquoi il est là.

Il va comprendre, cependant.

Commençant lui aussi à fatiguer, Tommy s'essuie le visage du revers de la main, ce qui n'a comme conséquence que d'étaler tout le mélange de sang et de transpiration qu'il a sur le visage. Il se dirige vers le bar et attrape une bouteille intacte dont il ouvre le bouchon en fracassant le goulot contre le comptoir, avant de se servir une bonne dose dans un verre.

Le temps de boire, il s'assied sur une chaise en face d'Harrison. Cela fait un moment que ce dernier n'a plus ouvert les yeux - de toute façon, ils sont tellement enflés que ce n'est certainement plus physiquement possible.

[ TOME 2 ] Michael Gray » Peaky Blinders AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant