» Chapitre Soixante-Et-Onze : 115 Kilomètres Nord Est «

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- C'est merveilleux, Michael!

   Assis en diagonale de Polly à la grande table de la salle à manger d'Arrow House, Michael fixe un point imaginaire sur les rideaux au loin pour ne pas avoir à la regarder. Il ne sait toujours pas s'il lui a pardonné de lui avoir caché que pendant tout ce temps, Anna était la fille de Peter Pritchard, mais...

   D'un autre côté, Michael est amèrement conscient du fait que si tout le monde leur avait annoncé qu'ils avaient une demi-soeur en commun, jamais Linn et lui n'en seraient là aujourd'hui.

   A annoncer à leurs familles qu'ils vont se marier.

- Est-ce que vous avez déjà commencé les préparatifs? enchaîne une Polly qui a presque les larmes aux yeux. Je peux vous aider, bien sûr, et je suis certaine qu'Ada et les enfants adoreraient donner un...

- On gère la situation.

- Bien sûr. Je suis certaine que vous allez faire quelque chose de... (Elle pose un poing contre sa bouche.) Oh, Michael, je suis tellement heureuse pour toi - pour vous deux. Mon petit garçon qui se marie...

- J'ai invité Rosemary.

   Lorsqu'il tourne la tête vers Polly, il voit sur le visage de cette dernière exactement ce à quoi il s'attendait : d'abord elle a l'air de se prendre une gifle, puis elle hoche la tête en essayant de faire comme si tout allait bien.

- Bien sûr, Michael, bien sûr... Tu as bien fait. Et... et les parents de Linn? enchaîne-t-elle pour changer de sujet. De ce que j'ai compris, elle...

- Ses parents ne viendront pas.

   Linn ne lui a pas exactement dit ce qui s'était passé la dernière fois qu'elle avait vu sa mère, et Michael devine qu'il y a quelque chose de plus en jeu que l'histoire avec Megan. Il n'a pas cherché à en savoir plus, toutefois. Si leur futur mariage repose sur une chose, c'est bien sur le fait qu'ils se laissent tous les deux assez d'espace en ce qui concerne les choses à ou ne pas partager. Si elle aura envie de lui en parler un jour, elle le fera. Si non, c'est aussi bon.

- Oh, commente Polly. Et... Elio, qu'en est-il d'Elio?

- Il sera là, répond Michael en sentant le coin de ses lèvres s'élever un peu d'un côté lorsqu'il pense à cette perspective. Il viendra avec sa nourrice. (Michael se redresse sur sa chaise.) Mis à part ça, ça sera en petit comité. Uniquement la famille proche - et Curly, Linn tient à ce qu'il vienne parce qu'il lui a dit qu'il n'a jamais été à un mariage civil et qu'elle lui a promis que ça serait le cas.

- Vous vous mariez à la mairie? En plus de l'église, tu veux dire?

   Michael secoue la tête.

- Uniquement à la mairie.

- Mais... (Polly marque une pause, l'air de réfléchir à la meilleure façon de formule les choses.) Je sais que Linn n'est pas chrétienne, mais...

- Justement, elle n'est pas chrétienne. Un mariage à l'église n'aurait pas de sens.

   Polly hoche la tête une fois et Michael la remercie mentalement de ne pas insister. Il sait que la fibre religieuse de Polly est très marquée et que forcément, ce n'est probablement pas comme ça qu'elle imaginait le mariage de son fils.

   Mais elle n'insiste pas et à cet instant, il l'apprécie beaucoup pour ça.

- La belle mairie de Birmingham cela sera donc, annonce-t-elle avec un faible sourire. Si on fait abstraction des porcs qui y travaillent, j'ai toujours trouvé que c'était un très beau bâtiment, en belles briques anciennes et...

- Ce ne sera pas à Birmingham, l'interrompt-il doucement.

- Non? Vous allez jusqu'à Londres, alors? 

- Mobberley.

- Qu'est-ce qu'un Mobberley?

   Michael ne peut s'empêcher de sourire. Lorsqu'ils ont commencé à réfléchir à la question du lieu, l'idée de se marier à Birmingham leur a semblée trop... trop proche d'ici, proche de tout. Ils se sont rencontrés à Birmingham, ils ont travaillé à Birmingham, ils se sont aimés à Birmingham, ils ont pleurés à Birmingham, ils ont tout perdu et tout retrouvé à Birmingham...

   A côté de tout ça, Mobberley leur a paru plus calme. Paisible. L'endroit idéal pour marquer un nouveau tournant de leurs vies. D'accord, il y avait aussi le fait que l'idée de se marier au milieu de nulle part, dans un patelin qu'ils n'ont que visité une seule fois a franchement semblé amuser Linn, et...

   Il veut la voir sourire comme ça jusqu'à la fin de ses jours. Et pour l'instant, se marier à Mobberley semble être le premier pas sur ce long chemin.

- C'est un village à 115 kilomètres au nord-est d'ici.

- Bon, c'est... ça nous changera tous des mariages traditionnels à Birmingham, en tout cas! C'est bien.

   Michael hoche la tête. 

   Polly lui pose encore quelques questions concernant l'affaire «est-ce que vous avez déjà réservé un traiteur? Parce que si non, je pense que ça peut être plus pratique d'en réserver un directement là bas plutôt que de faire remonter tout notre personnel ici», «vous avez des photos de la mairie de cette Mobberley? Comme ça, je pourrais les envoyer à l'agence qui s'occupe généralement de nos mariages pour qu'elle puisse réfléchir à la décoration», qu'il esquive toutes en lui répétant qu'elle n'a besoin de se soucier de rien, qu'ils s'occupent déjà de tout. Lorsque Michael repart quelques minutes plus tard, Polly n'a pas l'air convaincue et il devine qu'elle est déjà en train de réfléchir à tout ce qu'elle peut organiser de son côté pour contribuer à l'événement.

   Lorsque Michael sort d'Arrow House, il a l'idée de charger Polly de s'occuper des tenues des enfants - peu importe ce que ça puisse être, mais il est certain qu'elle sera contente de pouvoir dépenser des cents et des milles pour trouver des petits vêtements pour Elio. Déjà avec Karl, Charlie et les autres, c'est elle qui fournit les trois quarts de leurs garde-robes, mais avec Elio, c'est encore pire et elle a déjà...

- Michael.

   Une main sur la poignée de la voiture, Michael s'arrête net en entendant Tommy.

   Thomas Shelby sort d'Arrow House et le rejoint, se tenant de l'autre côté de la voiture.

- Linn m'a dit pour le mariage, enchaîne-t-il. Je suppose que des félicitations sont à l'ordre du jour. 

- Merci.

   S'en suit un silence durant lequel ils ne font rien d'autre que se toiser mutuellement du regard. Au bout d'un moment, Michael pense que Tommy va finalement faire demi-tour et vaquer au reste de ses occupations quotidiennes, de quel ordre soient-elles, mais ce dernier reprend finalement la parole.

- Tu lui as déjà brisé le cœur une fois, Michael. Ne t'avise pas de le refaire.

   Par réflexe, Michael aurait presque répondu «je ne le ferais pas», mais il s'est heureusement ravisé au dernier moment. 

- Bonne journée, Tommy, répond-il à la place en ouvrant la portière de la voiture avant de la refermer derrière lui.

[ TOME 2 ] Michael Gray » Peaky Blinders AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant