» Chapitre 54 : Espoirs «

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   Je me rends compte que je n'ai aucune idée de ce que je suis en train de faire lorsque le sergent Moss vient ouvrir la porte blindée de la cellule dans laquelle est retenu le père Hughes. 

   Je me rends compte qu'une partie de mon cerveau partait du principe que de toute façon, mon plan n'allait pas fonctionner. Que quelqu'un allait réaliser que j'ai un pistolet glissé dans une sorte de demi-poche intérieure de ma veste en jean. Que quelqu'un allait trouver ça louche que je me balade en veste alors qu'il doit déjà faire 28 degrés, au moins.

   Mais non, me voilà. Lorsque le détecteur de métal a sonné dans l'entrée, le policier de garde m'a simplement demandé si j'avais des clés ou quelque chose comme ça sur moi. J'ai répondu que oui et il m'a laissé passer.

   J'avais prévu tout un discours sur le fait que ça devait être l'armature de mon soutien-gorge qui faisait sonner le détecteur «c'est vraiment bizarre, je crois que ça dépend des modèles mais ça me l'avait déjà fait quand j'étais à l'aéroport et je vous raconte pas le foin que ça a fait, j'ai vraiment cru que la dame de la sécurité allait me demander d'aller aux toilettes pour l'enlever et revenir après - oh, vous êtes sûrs que je peux passer? Je voudrais pas vous causer d'ennuis en ne respectant pas le protocole - bon, si vous le dites, c'est gentil», mais je n'ai même pas eu besoin de tout ça.

   Je ne suis pas naïve au point de penser que c'est ma bonne étoile qu'il faut remercier pour que j'ai autant de chance aujourd'hui - à la façon dont le sergent Moss n'a même pas paru surpris lorsqu'un de ses collègues est venu le chercher quand j'ai demandé à lui parler, je me doute bien que Tommy a dû le prévenir que Hughes risquerait d'avoir de la visite. Et visiblement, Tommy ne cherchait pas à m'en empêcher.

   Qui d'autre figure sur cette liste de laissez-passer? Michael, sans aucun doute. Peut-être que c'est même portes ouvertes pour quiconque portant le nom de Shelby.

   Oui, ça serait très Thomas Shelby de faire ça. «Que chacun amène une arme pour refaire une beauté à Hughes - tirez le plus en longueur son calvaire», quelque chose du style. Ou alors...

   Non, c'est bien ça. Lorsque le sergent Moss ouvre la porte, je vois un Hughes en très mauvais état assis sur une chaise au milieu de la pièce, les mains ligotées dans le dos. L'une de ses paupières est tellement enflée qu'on ne distingue plus son œil. Son visage est recouvert de sang et je n'arrive pas à déterminer d'où tout ce sang vient. Une coupure à l'arcade sourcilière, je crois. Et un coup de... feu? couteau? a entaillé le tissus de sa robe noir au niveau des côtes ; je suppose donc que sa peau en-dessous par la même occasion.

- Appelez si vous avez besoin de quelque chose, me dit Moss en me faisant signe d'entrer dans la pièce. Ne vous inquiétez pas, les caméras sont éteintes.

   J'avance de deux pas et entends la lourde porte se refermer derrière moi. J'aurais préféré qu'il la laisse ouverte - là, je me retrouve coincée dans huit mètres carrés de béton dur sans la moindre ouverture nulle part.

   A quoi est-ce que je m'attendais? Mon Dieu, mais qu'est-ce que je fais là? Pour qui je me prends?

   Une balle pour une balle, voilà ce que j'avais en tête. Je me suis faite tirer dessus à cause de lui, je lui rends la pareille. Pas dans un esprit de vengeance, juste parce que... dans un esprit de justice. Une tentative de justice, puisqu'après tout ce qu'il a fait à Michael -

- Je ne pensais pas vous voir ici, articule douloureusement Hughes en me tirant de mes pensées.

   La réalité me frappe de plein fouet lorsque je réalise que je suis vraiment ici. Je fais un pas en avant et glisse les mains dans les poches de ma veste en jean.

[ TOME 2 ] Michael Gray » Peaky Blinders AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant