» Chapitre 24 : Sur la plaque «

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   J'ai eu le droit de sortir de l'hôpital en milieu d'après-midi. J'aurais certainement eu l'autorisation de sortir plus tôt, mais la médecin en charge de mon cas avait une urgence et je ne l'aie que revue à 15 heures 30 lorsqu'elle m'a donné une ordonnance renouvelable pour mon médicament.

   Par défaut, c'est Harrison qui m'a ramenée chez nous. Chez lui - chez moi? Je ne saurais même plus dire. La location est à mon nom, mais on séparait les frais donc je ne sais pas ce qu'il adviendra lorsque...

   Une chose après l'autre. 

   Je me laisse rouler jusqu'à l'appartement où je passe le reste de la journée à somnoler sur le canapé, emmitouflée dans un vieux plaid gris clair telle une momie dans ses bandelettes de tissus. 

   Et je ferme les yeux, en essayant de faire le vide dans ma tête. A certains moments, je me demande si je viens de dormir ou non et d'expérience, je devine que c'était certainement le cas.

   Lorsque j'entends le bruit d'assiettes s'entrechoquant dans la cuisine, je suppose qu'il doit être dans les 19 heures et qu'Harrison a décidé de ne pas me laisser mourir de faim. Voilà, il peut être gentil quand il veut. Et lorsque je sens qu'une partie de moi commence à faire la liste des moments où il était vachement cool - dans le but de peser le pour et le contre, sans aucun doute -, je me rends compte que c'est maintenant ou jamais. Ce n'est pas après avoir mangé ses... pâtes, ou peu importe ce qu'il prépare, que ça sera plus facile.

   Je m'assieds sur le canapé et prends soin de garder le plaid autour de moi, comme si ça allait atténuer quoi que ce soit.

- Harrison, je l'appelle assez fort pour qu'il puisse m'entendre. Tu peux venir?

   Il s'exécute tellement rapidement que ça me déboussole un peu. A cause de mon passage à l'hôpital, sans aucun doute. En temps normal, son temps de réaction avoisine celui d'une lettre tarif lent...

- Ça va, mon amour? Tu te sens pas bien?

   Harrison s'accroupie devant moi pour être à mon niveau et me regarde dans les yeux, et je lui fais un signe de tête pour lui demander de s'asseoir à côté de moi. Cette proximité soudaine me fait presque un peu paniquer, mais je ne m'en laisse pas le temps. J'essaye de me concentrer sur le bruit que fait le chewing-gum qu'il est en train de mâcher. 

- J'arrive plus à... dis-je en commençant sans arriver à mettre le doigt sur le texte que j'avais répété dans ma tête, à... ça. Toi, moi, là comme ça. Ça fonctionne plus du tout et je suis même pas sûre que ça ait vraiment fonctionné un jour.

   J'ai parlé assez rapidement, ayant anticipé le fait qu'il allait me couper la parole, mais il n'en a rien fait. Je me retrouve face à un Harrison qui me regarde en haussant un peu un sourcil, avec ce même air mi-amusé mi-confus qu'il a parfois quand j'essaye de faire des blagues moyennement drôle qui ne trouvent pas en lui leur public cible. 

- Je vais te chercher de l'eau, commente-t-il simplement en se levant.

- J'ai pas soif, je...

- Tu as soif, Linn. 

   Ce n'était ni une question, ni une déclaration. C'était une affirmation irrévocable. 

   Je n'ajoute rien le temps qu'il revienne de la cuisine avec un verre d'eau rempli du robinet. Il me le tend et je le prends, mais n'y touche pas.

- Harrison, je suis sérieuse. Ça ne va plus du tout et je n'arrive pas à gérer à la fois le travail et toi en parallèle, et rien que le fait que je te considère toi comme un truc à gérer c'est clairement un signe que...

[ TOME 2 ] Michael Gray » Peaky Blinders AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant