L'arrogance d'un monde en déclain

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Les rues – si je pouvais appeler ça comme telles – ne se définissaient que par des fossés boueux de par et autre de la chaussée. Nos bottes s'enfonçaient littéralement dans les selles de ceux qui déféquaient sur la route. L'odeur nauséabonde et étouffante des souterrains avaient le don de me faire perdre la raison, si nous restions une minute de plus ici j'allais vriller. 

Et en même temps, je n'avais pas le droit de provoquer un tel irrespect envers Livaï, car lui seul a jugé nécessaire et personnel de me faire venir l'accompagner en ces lieux. L'autre soir, je m'étais douté que Livaï n'avait jamais pu jouir d'une vie de décence et de sécurité, d'où certaines explications évidentes liées à son caractère... Il ne considérait pas la surface comme une terre à souiller mais ne partageait pas l'humanité et la joie des « autres ». 

Aujourd'hui je comprenais, je comprenais enfin véritablement le détachement de Livaï sur la nature humaine. Au sein d'un même groupe, d'une même espèce, nous étions capables de laisser crever la bouche ouverte notre prochain. Quand bien même notre foutue espèce se trouvait être menacée d'un cataclysme imminent. Une rage grandissante s'emparait de moi, du fond de mes entrailles. 

« T'es pas obligé de rien dire, pour une fois que je t'autorise même à causer... Je t'en prie ne pers pas cette chance Eren. » Bafouilla le caporal concentré sur les citoyens de la basse-ville.

Son regard demeurait froid et septique cependant, les humains devant ses yeux n'eurent reçus aucune autre forme de respect que celle que Livaï leur envoyait présentement. 

Pourquoi ? Car Livaï les regardait. Il les regardait dans les yeux. De cette considération, reflétait là la véritable valeur du cœur du caporal, consciemment ou pas, Livaï représentait un  espoir pour ces pauvres gens. 

« ... Alors tu viens souvent ici ? Ma voix s'étrangla dans mes mots, il m'était difficile pour moi de ne pas me laisser démonter face à autant de misère. 

— Dès que j'en ai l'occasion, oui. Tu vois cette maison au coin de la rue ?

— Oui.

— Y vit quatre frères et sœurs, leurs parents ont été tués durant le tragique incendie de la forgerie, il y a douze ans.

— J'en avais entendu parler...

— En voyant cette partie de l'humanité pourrir ici-bas, ça me fait continuellement questionner sur la valeur de l'humain. Est-ce que notre décimation ne serait pas simplement le revers d'une médaille crasseuse ? Ne me réponds pas, j'veux juste déverser ma haine sur ce que je vois. Le monde est mal foutu Eren et il le restera jusqu'à qu'on ne souille plus ce monde. Nous sommes foncièrement désabusés et chaotiques, c'est un fait.

— Livaï...

— Suis moi, nous arrivons. »

Livaï accéléra le pas, me guidant dans une bâtisse ressemblant étrangement à celle de la surface, avec, comment dire, des extras en plus ? Mon dieu, cette femme n'avait-elle pas froid ? 

« Si on te demande quoique ce soit, refuses. Mais toujours avec respect. Ces personnes n'ont jamais été traitées dignement, alors le temps d'un instant fais en sorte que ce soit le cas. Pour chacun d'entre eux. » 

Je te le promets Livaï.

... 

La nuit tombée, après une fin de journée plus qu'éprouvante, j'avais rejoins le groupe dans la chambre de Mikasa et Sasha. Nous avions pris l'habitude de nous rassembler pour des veillées, surtout en ces temps maussades. Contrairement à ce que Adel et moi espérions, la piaule de nos amies fût rangée dans les moindres détails. Du côté de Mikasa ce n'était pas tellement étonnant, mais Sasha ? Stupéfiant. 

Ce que nous avons ignoré.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant