Une autre vie

Nous ne sommes plus à Poudlard désormais

En apprenant qu'il y avait une sortie à Pré-au-Lard de prévue lors du week-end à venir, Hermione avait littéralement supplié Severus de l'accompagner. Comme elle était majeure, elle n'avait pas besoin d'autorisation parentale, et elle avait terriblement envie de voir à quoi ressemblait le petit village sorcier dans le passé.

Au début, le Serpentard avait refusé. Visiblement, il n'appréciait pas vraiment ces sorties, et la jeune fille comprit que les Maraudeurs avaient fait de ces moments un véritable calvaire. Cependant, elle ne baissa pas les bras, allant juste qu'à le supplier de lui faire visiter. Après tout... elle n'était pas sensé connaître le petit village.

C'est en prétextant avoir besoin d'un guide que Severus finit par céder. Il avait un léger sourire amusé aux lèvres et Hermione en fut satisfaite. Le Serpentard n'était pas dupe et se doutait bien que Hermione pourrait parfaitement retrouver son chemin sans lui, mais il se sentait visiblement flatté de l'insistance de Hermione pour le décider. Le jeune homme n'était plus si renfermé qu'à leur rencontre, et grâce à sa surveillance active, elle avait évité qu'il ne soit renvoyé à l'infirmerie. Désormais, les seuls moments où Severus rencontrait Madame Pomfresh étaient pour aller brasser des potions de soin.

Même si c'était devenu banal au fil des années d'aller à Pré-au-Lard, Hermione se sentait étrangement excitée et électrique. Comme si elle allait réellement découvrir les lieux, comme si elle ne les avait jamais encore visité.
Son enthousiasme lui attira des réflexions gentiment moqueuses de Severus, et Hermione oublia tout ce qui n'était pas l'instant présent. Elle oublia la guerre, Harry, tout ce qui se produirait. Elle était une adolescente ravie de passer du temps avec son ami, et non plus une combattante aguerrie qui avait connu le pire de la guerre.

Même le regard agacé de Lily ne ternit pas sa joie. Pour une raison étrange, la rousse ne semblait pas approuver l'amitié entre Severus et Hermione.

Le jour J, Hermione craignit que Severus ne se rétracte. Cependant, il l'attendait dans le Hall, un peu crispé de voir les Maraudeurs à proximité. Il ne risquait rien compte tenu des professeurs présents autour d'eux, et Hermione se précipita à ses côtés, envoyant au passage un sévère regard d'avertissement au terrible quatuor.
Elle nota avec satisfaction que Remus Lupin semblait honteux puisqu'il baissa les yeux, contrairement aux trois autres.

La jeune fille ne voulant pas gâcher la journée, elle ne fit pas la moindre réflexion, se contentant de poser des questions à Severus sur ce qu'il voulait faire. Severus n'avait pas d'argent puisqu'il venait d'une famille pauvre, et Hermione était également sans le sou. Ils décidèrent donc de parcourir la rue principale du village et de profiter du beau temps pour explorer les alentours.

Ils firent le trajet tranquillement, laissant les autres élèves presser le pas pour être au plus vite dans les boutiques. L'automne commençait à peine, et la température était encore douce, leur permettant de profiter du soleil.

Lorsqu'ils passèrent les grilles de l'école, Severus fit un bref arrêt et lui lança un clin d'œil.
- Et voilà. Nous ne sommes plus à Poudlard, désormais.
Hermione gloussa et ils reprirent le chemin arrivant rapidement à Pré-au-Lard.

La jeune fille marqua un temps d'arrêt, stupéfaite. Severus pensa que c'était dû à la découverte du petit village sorcier, si pittoresque. Cependant, ce qui avait réellement surpris Hermione était que Pré-au-Lard n'avait absolument pas changé. Tout était identique, hors du temps.

Elle secoua la tête et se laissa entraîner par Severus, qui lui montrait les boutiques une à une, sans pour autant chercher à y entrer.

En passant devant chez HoneyDukes, Hermione eut un brusque sentiment de nostalgie, qui la rendit hagarde. C'était l'endroit où Ron finissait toujours par les entraîner, Harry et elle. Le rouquin semblait incapable de résister à l'attrait des friandises, et ils avaient visité la boutique de chez Honeydukes à chaque fois qu'ils venaient à Pré-au-Lard.
Elle eut un sourire triste. La jeune fille s'était remarquablement bien habituée à sa nouvelle vie. Elle vivait dans le passé, dans un temps où elle ne connaissait personne. Pourtant, elle avait sympathisé avec Severus très rapidement, le considérant comme un ami précieux.
Mais il ne pouvait pas remplacer Harry et Ron. Ils avaient grandi ensemble tous les trois, après tout, et traversé bien des épreuves.

Voyant son trouble, Severus fouilla sa poche et sortit une poignée de piécettes.
- Tu veux une friandise ?

Hermione cligna des yeux, et s'obligea à sourire, à montrer une façade de bonne humeur.
- Oh c'est gentil, mais non. Je ne suis pas si gourmande que ça. C'est juste... Je sais pas. Une sensation étrange.

L'adolescente avait rapidement appris que pour ne pas commettre d'impair lorsqu'on s'inventait une vie, il valait mieux coller au plus près la vérité. Elle se demanda si le Severus espion ferait la même chose, lorsqu'il devrait faire face à Voldemort...
Le regard sombre posé sur elle, plein d'inquiétude lui permis de chasser son malaise et elle soupira.
- Ça va, je t'assure.
- C'était un souvenir ? Je sais que tu es amnésique, et tu t'es peut être souvenue de quelque chose d'important ?

Hermione secoua la tête, avec un petit sourire contrit.
- C'était plus comme un sentiment de déjà-vu tu vois ? Si ça se trouve j'ai croisé une image de cet endroit dans un livre et mon cerveau a fait d'un coup la connexion.

Severus hocha la tête, et resta silencieux, l'observant toujours avec attention. Puis, prudemment, lentement, il prit la parole.
- Hermione. Je sais qu'on se connaît depuis peu, mais si tu as besoin de parler, ou... enfin. Si tu veux, je serais là pour toi.

Le ton sérieux et grave de Severus ébranla Hermione. Elle comprit que c'était un moment important, un de ces moments qui pouvaient faire basculer l'avenir. Cependant, elle était décidée à changer les choses, alors, elle rendit son regard au Serpentard, essayant de faire passer dans son regard toute sa sincérité.
- Merci Severus. Je serais là pour toi aussi.

Le moment aurait pu devenir gênant, mais le brun hocha la tête brusquement et attira Hermione loin de chez la boutique de douceurs pour lui montrer selon lui "l'ignoble décoration de chez Piédodu".
Ils gloussèrent comme des enfants aux réflexions moqueuses du Serpentard, avant de repartir en plaisantant en direction de la cabane hurlante.

Hermione oublia complètement le moment de nostalgie qui l'avait saisie, et elle se concentra uniquement sur le moment présent. Heureuse.