Timidité

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Les semaines passèrent, lentement. Le monde magique était au bord de la rupture. Les Mangemorts attaquaient sans relâche, et les sorciers ne sortaient plus de chez eux.
Le Ministère était gangrené par la corruption, tiraillé entre les deux camps, entre l'influence de Dumbledore et celle des Mangemorts affiliés aux Ténèbres.

De temps à autre, Voldemort faisait son apparition au milieu du Chaos, et il lançait des Avada en riant d'un air dément. La Gazette attisait la peur, relayant un récit fantastique des attaques, donnant une aura encore plus effrayante au Mage Noir qui semait la terreur.

Les Aurors ne pouvaient qu'arriver sur les lieux des attaques et tenter de sauver un maximum de personnes, impuissants.

*
La vie continuait, cependant. Une fois sa Maîtrise de potions obtenue, Hermione avait proposé à Severus d'ouvrir leur propre boutique.

Ils affichaient leur couple sans la moindre hésitation, et Severus n'avait jamais été si heureux de toute sa vie. Il n'était plus cet adolescent maussade et amer, renfermé, qu'il avait été. Il souriait bien plus, et s'ouvrait aux autres, doucement, avec l'aide de sa compagne.

Il avait retrouvé son amitié d'autrefois avec Lily, bien que moins fusionnelle, et il se rendait souvent en compagnie d'Hermione au domicile des Potter.


Pourtant il n'y avait pas eu de miracles. Il n'était pas ami avec ses anciens tortionnaires, il avait juste appris à les supporter, à ignorer leur présence et leurs plaisanteries. Il devait avouer que voir Lily et Hermione prendre parti pour lui contre eux était un plaisir dont il ne se lassait pas.

Surtout, il y avait Harry Potter.

Au départ, il avait accepté les visites régulières pour Hermione, parce qu'il savait que son meilleur ami lui manquait. Il voyait parfois un voile de tristesse dans son regard et il l'aimait suffisamment pour faire des efforts. Elle avait tant sacrifié et lui avait tant offert qu'il ne se voyait pas lui refuser le plaisir de ces visites.
Et puis... il s'était attaché au gamin, un peu malgré lui.

Et le rejeton Potter semblait fasciné par le potionniste. Depuis qu'il savait se déplacer à quatre pattes, il rampait vers lui à toute vitesse, et lui tendait les bras, ses grands yeux verts pleins de joie. Si au départ Severus tentait de l'ignorer, il avait vite compris que ça rendait James et Sirius dingue et il prenait plaisir à câliner le bambin...

Sans compter, bonus non négligeable, que Hermione le regardait dans ces moments avec un expression pleine d'amour qui le laissait pantelant.

*

Si Severus faisait contre mauvaise fortune bon coeur en se rendant régulièrement chez les Potter, Hermione faisait elle aussi des concessions. Severus était le parrain de Drago Malefoy et elle avait eu l'occasion à plusieurs reprises d'entrer dans le Manoir où elle avait de si mauvais souvenirs.
La première fois, elle avait frissonné d'effroi en entrant, et elle avait craint d'être submergée par les souvenirs terribles qu'elle avait de l'endroit. Cependant, tout était différent à l'intérieur et elle s'était rapidement détendue.

Lucius l'observait avec suspicion, mais Narcissa l'avait accueillie à bras ouverts, acceptant sans sourciller sa relation avec Severus.
Hermione avait découvert avec surprise un bambin attachant en Drago Malefoy. L'image de la fouine et de l'insupportable prétentieux n'avait pas tenu longtemps face au petit blondinet aux grands yeux clairs, avide de câlins, la fixant avec timidité.

Hermione s'était rendu compte avec surprise que Severus était d'une patience d'ange avec les enfants. Il avait donné une image terrible en tant que professeur à Poudlard, et la jeune femme découvrait une fois de plus que ce n'était qu'une illusion, qu'une partie de l'image qu'il voulait donner pour son rôle d'espion.

*

Peu après le premier anniversaire de Harry, Remus s'ajouta au petit groupe qui se réunissait chez les Potter. Le loup-garou était immédiatement venu remercier Severus, et il s'était excusé pour son comportement à Poudlard, reconnaissant qu'il avait été stupide et méchant.

En les regardant tous interagir, Hermione souriait, en savant que c'était ça le plus grand pouvoir de Harry : la capacité à rassembler autour de lui, sans même en être conscient. Un de ses sourires innocents, ses grands yeux verts pleins de candeur levés sur son entourage, et il faisait fondre le plus endurci des coeurs.

Ce fut Lily qui lança le sujet, lors de l'une de ces réunions amicales.
- Dumbledore pense que Harry est l'enfant qui doit se battre contre Vous-savez-qui.

Hermione grogna, furieuse, tandis que Severus serrait contre lui le bambin qui jouait avec une peluche sur ses genoux. James soupira.
- Quoi que le Directeur puisse dire, Harry est en sécurité pour l'instant. Il nous propose de venir vivre au siège de l'Ordre du Phénix, mais je préfère rester ici.


Sirius était le plus véhément, jurant que personne ne poserait la main sur son filleul adoré.
Remus conclut avec un sourire calme, posant la main sur l'épaule de Sirius pour le calmer.
- Allons, nous finirons bien par l'avoir avec l'Ordre. Si le Ministère est impuissant, ce n'est pas le cas de notre groupe et nous sommes tous déterminés à le faire plonger. Il est temps que le monde magique retrouve son calme.

Repensant à Pettigrew - toujours porté disparu, personne ne l'avait jamais revu depuis sa fuite de Poudlard - Hermione fronça les sourcils.
- Et vous êtes certains qu'il n'y a pas d'espion dans votre groupe ?

Les trois maraudeurs se figèrent et échangèrent un long regard lourd de sens. Ils se souvenaient parfaitement de la trahison de leur ami, et de la façon dont il avait très certainement attisé leur haine envers Severus, au risque de faire d'eux des criminels.
James haussa les épaules.
- Nous ne faisons équipe qu'entre nous. Et avec les Longdubas - Alice et Franck étaient à Poudlard avec nous vous vous souvenez ? Leur fils a le même âge que Harry.

La conversation dériva vers des sujets plus légers et plus réjouissants. Ils occultèrent délibérément la guerre et les risques qu'ils prenaient en prenant clairement position pour l'un des camps.

Ils ne pouvaient pas se douter que leurs vies étaient sur le point de basculer. Hermione restait silencieuse, pensive, essayant de deviner ce que les changements qu'elle avait provoqué entraîneraient comme conséquences. Severus avait pris sa main et caressait sa paume de son pouce, comme s'il devinait ce qu'elle pensait et qu'il essayait de la rassurer et de la réconforter.
Avec Harry qui somnolait, blotti sur les genoux du Maître des potions, ils n'étaient pas conscients du tableau qu'ils offraient, comme la parfaite famille. Lily souriait en regardant son ami, l'imaginant sans peine en père aimant et en mari dévoué...

Une autre vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant