Poids plume

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Severus et Hermione n'eurent pas longtemps à attendre avant de voir un vieil homme à la longue barbe blanche arriver à grands pas. Puis toutes les lumières de la rue s'éteignirent d'un coup.
Ils se félicitèrent de ne pas s'être approchés de la maison et d'être restés discrets lorsque le chat assis sur le muret d'une maison, sa queue lovée autour de ses pattes, devint une Minerva MacGonagall visiblement angoissée.

Avec détachement, Hermione observa la directrice de maison qu'elle avait tant apprécié parler à Dumbledore en se tordant les mains, protestant visiblement de la décision du vieil homme. Cependant, elle finit par se laisser convaincre à contrecœur, tout en lançant des regards dubitatifs au quartier moldu.

Puis un bruit d'enfer secoua le quartier, et Hermione grimaça, se demandant comme les moldus faisaient pour ne pas être réveillés par le bruit. Dumbledore attendait sereinement, pas le moins du monde inquiet.
En voyant l'énorme engin arriver, Hermione hoqueta.
- Mais c'est la moto de Sirius !

S'ils n'avaient pas stupéfixé le Maraudeur chez eux, si le jeune homme n'avait pas passé la journée à dormir dans leur chambre d'amis après avoir ingéré une potion de sommeil sans rêves, ils auraient pu se poser des questions à son sujet.
Toute personne le connaissant savait qu'il adorait sa moto modifiée, et qu'il se pavanait dessus à la moindre occasion. Même James se plaignait de ne pas pouvoir l'emprunter, alors confier ce qu'il appelait son petit bijou à quelqu'un d'autre leur semblait inconcevable. Tout le monde plaisantait au sujet de l'amour que Sirius portait à l'infernal engin.

En voyant Hagrid descendre de la moto, un paquet immobile dans les bras, Severus serra les poings en marmonnant contre la folie de Dumbledore. Le demi-géant était peut-être la bonté incarnée, mais il était loin d'être apte à s'occuper d'un bébé.
D'où ils étaient, Hermione et Severus ne pouvaient entendre la conversation, mais il parvenaient à distinguer les expressions malgré l'obscurité. Hagrid était larmoyant, et regardait le petit paquet - Harry sans aucun doutes - avec une expression de tristesse sincère. Minerva MacGonagall regardait le bébé avec pitié et tristesse, mais elle lançait de fréquents coups d'œil autour d'elle, comme pour essayer d'imaginer l'enfance qu'aurait le sauveur dans cet environnement si loin du monde magique. Sa moue pincée ne laissait aucuns doutes sur son opinion, mais Dumbledore était visiblement inflexible.

Puis, sous le regard de ses employés, Dumbledore déposa le petit Harry sur le perron du numéro 4, Privet Drive. Il fouilla la poche de sa robe de sorcier et en sortit un document qu'il glissa dans la petite couverture.

Sans un regard à l'enfant, il fit demi-tour et rejoignit les deux autres. Quelques secondes plus tard, les lumières de la rue revenaient et les trois sorciers disparaissaient, deux dans un crac de transplanage à peine audible et le troisième dans le vacarme de son engin pétaradant.


Hermione allait se précipiter, mais Severus la retint un instant, le temps de s'assurer qu'ils étaient bien seuls et non surveillés. Puis, il leur lança un sort de désillusion.
- Mieux vaut être trop prudent que pas assez.


En prenant Harry dans ses bras, Hermione dût retenir ses larmes. Il dormait paisiblement, malgré le froid, emmitouflé dans une couverture en flanelle. La cicatrice sur son front se détachait nettement, terriblement rouge, comme à vif.
Elle le serra contre son cœur, et leva les yeux vers Severus.
- Quittons cet endroit.

Le jeune homme hocha aussitôt la tête.
- Tu veux que je le porte ?
Hermione serra le petit garçon un peu plus fort dans ses bras, le faisant s'agiter légèrement avant qu'il n'agrippe le col de son tee-shirt dans son sommeil.
- C'est un poids plume, je peux le porter...

Ils échangèrent un long regard, et Severus hocha lentement la tête, comprenant que Hermione avait besoin de le tenir contre elle, comme pour s'assurer qu'il allait bien.

Ils transplanèrent rapidement, retrouvant avec soulagement le confort de leur appartement.


*

Si Hermione avait pensé que voir Harry aiderait Sirius à se calmer et à devenir enfin raisonnable, elle se rendit vite compte que ça n'avait été qu'un voeux pieux. Il jeta à peine un oeil à son filleul une fois libéré du stupéfix, pour se remettre à tourner en rond en ruminant des projets de vengeance.

Sirius était plus intéressé à trouver qui avait tué son meilleur ami, son frère de coeur, que par le petit garçon dont il avait légalement la charge.


Voyant Severus sur le point d'exploser, poings serrés, face à l'irresponsabilité de l'Auror, Hermione intervint.
- Sirius. Tu devrais t'éloigner de l'Angleterre quelques temps. Juste pour que tu ne sois pas envoyé à Azkaban. Tu sais que c'est la folie avec les procès de Mangemorts et ils ne mèneront même pas d'enquête, puisque tout le monde sait à quel point tu étais proche des Potter.
Sirius grogna sourdement, prêt à protester, mais Hermione leva une main impérieuse, sourcils froncés, et le Maraudeur préféra la laisser continuer plutôt que de la mettre en colère.
- Tu sais parfaitement que j'ai raison et que tu n'as aucune aide à attendre de l'Ordre du Phénix. C'est toi même qui nous a dit qu'ils t'avaient immédiatement accusé .

Cette fois, l'homme aux yeux gris eut l'air déstabilisé et il se frotta le visage, perdu. Il hocha la tête lentement et Hermione continua, impitoyable.
- Un séjour loin d'ici te permettrait de préparer ta défense, de prouver ton innocence.
- Mais...
- Nous prendrons soin de Harry, si c'est ce qui t'inquiètes.

A la mention du petit garçon, Sirius ne cilla pas. Au lieu de quoi, il plissa les yeux.
- Et j'irais où ? Qui arrêtera celui qui a tué James ?

Severus grogna, intervenant pour la première fois depuis le début de la conversation.
- Les États-Unis peuvent être une bonne destination, Black. Même langue, tu n'auras pas à faire d'efforts d'apprentissage. Quand à celui qui a tué James... Et bien pour l'instant, il semblerait qu'il soit hors d'atteinte. Dans l'éventualité où tu voudrais prendre en charge le gamin, je te rappelle qu'une vie de fugitif n'est pas vraiment ce que Potter imaginait pour l'enfance de son héritier.


Sirius cligna des yeux, soudain muet. Puis, il soupira.
- J'adore ce gosse, mais je n'avais jamais pensé à... je ne saurais pas comment faire. Je... J'ai pas vraiment d'exemple et...
Hermione hocha la tête, avec un petit sourire triste.
- Ne t'en fais pas pour lui. Il ne manquera de rien, tu sais.
- Mais...
- James ne voudrait pas que tu sois envoyé à Azkaban pour sa mort, Sirius. Tu sais comment nous contacter, et personne n'irait poser de questions à Severus à ton sujet. Quand le moment sera venu, tu reviendras.

Sirius hocha lentement la tête, et une lueur de soulagement passa dans ses yeux. Hermione aurait pu lui en vouloir de son comportement, mais elle savait qu'il manquait de maturité. Il avait probablement besoin de temps avant de faire face à ses responsabilités et l'éloigner était la meilleure solution.

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