Chapitre 4-5

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Après une petite minute de patience, quand les trois compagnons finirent de manger et d'empoigner les vivres offerts gentiment, lesdits ministres entrèrent dans le bureau. Les deux silhouettes sombres des prétoriens fermèrent la porte derrière les treize hauts dignitaires. Les derniers. Ils demeuraient pourtant fiers.

— Voici ceux en qui je peux avoir confiance, Archicolonelle. Je vous présente Jachàr Lorpha Rehu Irhò, ministre de l'Économie, Hahòn Thar Malàch, ministre de la Recherche spatiale, que vous connaissez déjà, Mesha Lòzjai...

L'Archicolonelle ne l'écoutait plus. Un nouvel Archelan venait d'entrer. Ses longs cheveux noirs couvraient les épaulettes de sa veste plaquée. Dans son dos dépassait un bâton de guerre et à sa ceinture un revolver korrisien pendait. Il avait ouvert la porte de lui-même, mais les deux spectres prétoriens demeuraient à ses côtés, plutôt que de le retenir. Suivi par les deux gardes, le mystérieux Archelan écarta les ministres et se plaça devant Santhe, la fixant de son regard inquisiteur.

— Renze, le salua-t-elle, l'émotion maîtrisée.

— Tu n'es pas facile à retrouver, Santhe.

Son ton de voix, aussi calme que l'Archicolonelle, dénotait avec son air hargneux.

— Vous connaissez ce clown ? demanda Kaal en souriant.

Santhe l'ignora. Elle demeurait obnubilée par le limier.

— Je te croyais mort. Que fais-tu ici ?

— Allons, n'as-tu pas deviné ? Je viens rendre justice.

— Plus tard, Renze. Je l'ai d'ailleurs déjà promis à Halekeis que voici.

Renze lança un sourire à l'aristocrate, puis se concentra à nouveau sur la criminelle de guerre.

— À présent, ce n'est plus ton corps que tu vends, mais ta vie ? Ça ne m'étonne pas de toi. Lui aussi tu le tueras lorsqu'il ne te sera plus utile ?

— Comment oses-tu ?

— Quoi ? Ne l'as-tu pas prévenu ? (Il se tourna vers l'aristocrate) Halekeis Saí Dèlaes Faethák Rhos Vázhari, héritier de Saí Dèlaes Rhezhar Ehon et de Faethák Rhos Vázhari Rurhèr, Santhe te trahira comme elle l'a fait avec tous ses subordonnés et compagnons depuis quatorze cycles. Elle te trahira comme moi elle m'a trahi.

Il plia ses genoux pour atteindre la taille de la jeune méchaniste.

— Toi aussi, Kaal sans noms, maîtresse-méchaniste et pilote d'Itharis. Elle te trompera. Tu peux en être assurée.

Il tint à nouveau face à l'Archicolonelle, mais le Hiérarque se plaça entre les deux.

— Qui êtes-vous pour oser entrer ici et nous interrompre, pauvre fou ? Je ne vous ai pas invité. Comment avez-vous d'ailleurs pu rentrer ?

— Mon nom est Renze Háyar Faśae Daine Rhogòth, ancien compagnon d'armes de cette... Archelanne.

Le Hiérarque se tourna, bouche bée, vers Santhe.

— Ce nom...

— Quant à comment j'ai réussi à entrer, reprit le limier, je crains devoir annoncer que vos gardes ne sont pas ceux que vous pensiez être.

Les prétoriens enlevèrent leurs casques noirs sous son ordre. C'étaient deux Humains, probablement rehaussés par des échasses dans leurs bottes.

— Tu travailles pour Korris ! cracha Santhe. Chien !

Renze murmura quelques mots en korrisien. Aussitôt, les deux hommes saisirent leurs fusils d'assaut. L'Archicolonelle n'avait pas attendu pour désarmer le premier, mais Renze bloqua l'attaque mortelle qu'elle allait asséner. Puis il la frappa au visage.

Parmi les ministres paniqués, Halekeis dégaina Lente Vindicte et trancha le poignet du second Humain, puis le traversa au ventre, de l'estoc à la garde, avant de retirer sa lame maculée. Mais il n'eût pas le temps de s'horrifier sur son premier meurtre que déjà Santhe le tira lui, Kaal et le premier korrisien infiltré pour les pousser en direction de la vitre. Elle se défenestra, les deux Archelans à ses bras, l'Homme au loin, et atterrit quatre mètres plus bas sur le seuil de l'hôtel de ville sur lequel ils avaient marché il y a encore trente minutes. Après un atroce craquement, elle se releva difficilement. Son corps avait encaissé le choc pour ses compagnons.

Larmes Inhumaines [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant