Chapitre 9-1

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« Durant la période présanthique, Archelaus connut de timides conflits. En effet, les Archelans, aujourd'hui disparus, hésitaient à guerroyer entre eux. Comme l'un d'eux, Pheus Kan, l'explique près de 1300 ans plus tard dans le premier tome de La Paléopolémologie, cette rareté des guerres a mené à un faible développement des technologies militaires. Mais la culture des lames solidement ancrée dut laisser place à la poudre et aux technologies gariniènnes. Au contraire, l'Ère d'argent connut un regain d'intérêt dans les armes antiques à cause du recul technologique. Le petit-Être fit se disparaître l'Oru et la poudre à canon, ce qui limita de beaucoup l'ampleur des batailles. De plus, la difficulté de miniaturiser les sources d'énergie mena à une infanterie avec épées et cuirasses, y compris chez les soldats de la Forge. » Extrait des cours de Annaran Nila Samrida sur la culture archelanne, 352e cycle | 3e ère angonne

Une quinte nerveuse parcourut la salle de réunion du KOR Lorel, destroyer korrisien en orbite autour d'Archelaus, nommé en l'honneur de son éminence, oncle de l'actuel Roi Meruel III. Renze jeta un regard insistant en direction de Lasber, qui fit aussitôt son possible pour camoufler sa toux. L'âge et la maladie s'alliaient souvent.

La porte s'ouvrit à la verticale lorsque le comte Luskier entra avec ses hommes. C'était un humain sur ses vieux jours, gras, à la peau fripée tel un parchemin humide et aux lunettes pleines de gemmes. Comme la nouvelle coutume le demandait chez la noblesse, un gros cigare argenté se consumait entre ses lèvres gercées. Il réarrangea sa tenue officielle tachée de vices puis dénia enfin considérer ses invités — bien que le terme de « détenus » les qualifiait mieux en cet instant. Le comte leur offrait encore une hospitalité relative, mais ça ne durerait pas.

Le vieil homme salua Lasber d'un hochement de tête. En dehors du vocabulaire, les deux Humains avaient beaucoup de choses en commun, dont une animosité réciproque éclipsée sous les sourires hypocrites propres à leur espèce.

Du haut de ses quatre mètres, Tsy'kar fit la révérence de la noblesse korrisienne, puis se redressa de son mieux sous le bas plafond. Jadis cette pratique de salutation était bien vue ; un temps vécu par ces quatre personnes en leur époque. Mais l'usage avait été voilé par la propagande puis la guerre. Plus personne ne voulait ressembler à ces sales Archelans et ces idiots de Vaals avec leurs courbettes ridicules.

Néanmoins, un sourire nostalgique se dessina sur le visage du gros comte, presque réprouvé quand celui-ci sembla se souvenir de la présence de ses soldats.

Il ne laissa à Renze qu'un regard empreint de mépris, de dégoût et d'un zeste de peur. L'Archelan essayait de deviner ses pensées. Quels malheurs encore allaient lui ramener ce chien ? se disait-il peut-être.

— J'espère que vous vous êtes bien installé, dit Luskier en direction de Lasber.

— Je vous en prie, répondit celui-ci avec un sourire sardonique. C'est trop de confort.

Le comte encaissa la pique avec un silence lourd. Il prit sa respiration puis répliqua :

— Tâchez à surveiller vos... gardes. Les non-humains sont connus pour leur danger.

— Ce ne sont pas mes gardes.

— Ah bon ? Alors pourquoi vous suivent-ils ?

Lasber réfléchissait longtemps à ses phrases. Renze savait qu'il ne voulait ni révéler son éducation archelanne ni son vocabulaire coloré face à ce noble.

— C'est vrai que je vous ai contacté moi-même, mais j'obéis à Renze.

Il pointa en direction de ce dernier. Le comte se dirigea d'un pas lent vers lui, puis fit son possible pour toiser de haut l'Archelan plus grand. Il fixa Renze sans lui adresser la parole :

Larmes Inhumaines [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant