Chapitre 3-1

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« La criminelle de guerre de la Guerre des Poussières, connue sous le nom d'Archicolonelle Santhe, a tant influencé l'Histoire que l'on parle de période présanthique concernant l'avant-guerre et postsanthique au sujet de l'Ère d'argent, qui a vu la domination de la Forge, terrible empire pourtant si optimiste en ses débuts... » La paléopolemologie I, Pheus Kan, 130e cycle | 1ère Ère angonne

La sensation du canon d'un pistolet sur sa tempe réveilla Santhe qui, paniquée, frappa dans le vide à sa droite. Ses yeux étaient encore troubles, sa bouche pâteuse, mais elle comprit qu'elle venait juste de vivre un autre cauchemar.

Elle souffla et se leva, son dos raidi par les feuilles séchées et la terre meuble sur lesquels elle avait dormi. Au moins, ses brûlures avaient disparu. Si seulement son esprit avait fait de même, se dit-elle. En y pensant, elle regarda son poignet droit. Il oscillait toujours. Elle contracta ses muscles pour calmer la chose.

La forêt autour d'elle restait paisible. Il s'y dressait des chênes à pétales d'or, des cerisiers phosphorescents et quelques ruines çà et là, datant d'un passé inconnu. Une cacophonie d'oiseaux, de minuscules reptiles et de mammifères se levait en ce petit matin.

Un ronflement venait s'ajouter à l'orchestre de la faune. C'était Halekeis, qui dormait tête à l'envers sur le bord d'un tronc duquel il était tombé pendant la nuit. Elle sourit et s'approcha, lui donnant un gentil coup de botte.

— Qu'y... Qu'y a... Qu'y a-t-il ? fit-il, encore à moitié assoupi.

— Il est temps. Nous devons partir.

En reconnaissant sa voix suave, quoique tranchante, l'aristocrate ouvrit grand ses yeux avant de se retourne, brusque. Il bascula, vif, et tira son épée.

— Du calme, incita Santhe avec un soupçon d'ordre. Nous devons nous diriger vers Zinth. Vous n'avez pas oublié ?

— Non. Je m'en souviens, affirma-t-il en fronçant les sourcils, la lame cramoisie toujours pointée vers elle.

— Êtes-vous prêt à partir ?

Sans la quitter des yeux, il rengaina Lente Vindicte et s'habilla de ses quelques vêtements.

— Combien de temps nous reste-t-il avant d'y arriver ?

— Deux jours, voire un et demi si nous nous dépêchons.

— Je suis prêt, ajouta-t-il en serrant sa ceinture gravée. Je vous suis.

L'Archicolonelle acquiesça et ils partirent vers le nord-est. Ils contournèrent une colline érodée d'où un pic probablement artificiel émergeait. Rafraîchis par la brise matinale, les deux Archelans descendirent entre de larges fourrés pour s'abriter dans leur marche. Très vite, ils découvrirent un sentier qui menait vers l'est. Ils s'y engagèrent non sans rester sur leurs gardes.

Deux heures plus tard, Halekeis fit remarquer une épave sur leur droite. Santhe s'en approcha, à la recherche de matériel utile.

C'était la carcasse d'un Itharis, un mécha de la Hiérarchie, reconnaissable à son blindage d'archalène. Le matériau lui donnait une couleur cramoisie distinctive et une allure presque neuve grâce à la régénération particulière. Mais Santhe ne s'y trompait pas : seules les plaques rouges s'étaient réparées. Du reste ne subsistait qu'une bouillie brûlée ou cassée par les combats, comme elle le remarqua en ouvrant la portière de la « poitrine » du véhicule.

Elle marcha sur de vieux ossements, puis jura. L'aristocrate l'observait plus loin, presque apeuré.

— Vous avez trouvé un corps ?

— Oui. Mais des pillards sont déjà passés par ici.

Déjà ? Par tous mes aïeuls ! Vous pensiez réellement violer leur repos éternel ?

Larmes Inhumaines [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant