Chapitre 9-4

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Une rumeur parcourut ses hommes. Lorsqu'il se tourna vers eux, il comprit qu'ils observaient la même direction, inquiets.

— Que se passe-t-il ? demanda Pelias, frustré qu'on le coupe ainsi.

Le commandant s'approcha à nouveau.

— Nous avons détecté des véhicules terrestres qui viennent de la forêt au sud-sud-est, mais nous n'avons aucun visuel.

— De quel seigneur s'agit-il ?

— Aucune signature korrinienne, monsieur. Ce n'est pas Archelan non plus, ni même des forces de libération théocratique vaales.

— C'était prévisible concernant ces derniers. Mettez-vous en position et appelez le capitaine Sanors, qu'il amène le destroyer dans la région.

Les arbres au loin s'effondraient. Des nuées d'oiseaux et de reptiles s'envolaient, terrifiés. Le sol tremblait. Kaal se tourna vers Santhe. Elle semblait aussi comprendre quel genre de chose arrivait.

Les Humains les avaient-ils attirés ?

Le vicomte Pelias dégaina son arme, imité par ses hommes. Une lueur d'effroi brillait dans leurs yeux.

Une demi-douzaine de monstres de fer, issus des profonds tombaux d'Archelaus, apparurent à l'orée du bois en rugissant de façon déchirante. Ils ressemblaient à celui qu'ils avaient détruit dans les ruines. Dans leur course, ils broyèrent la millénaire pagode pour se diriger vers les soldats. Malgré toute leur loyauté et leur expérience, les commandos fuirent en hurlant à leur tour, sans maîtrise aucune. Ces bêtes mécaniques secouaient les esprits de ces Humains de manière anormale. L'Archicolonelle pensa à un aspect technique. Les Insectes de Verre à l'origine de ces choses pouvaient très bien avoir infusé une quelconque technomagie en elles.

Contourné par les déserteurs, le vieil homme monta dans la navette au sol pour repartir. Le vicomte le supplia de rester combattre, mais Santhe lisait la peur dans le regard du marquis Débène.

Quelques hommes fidèles demeuraient près de Pelias, mais les autres ne pouvaient contenir leur panique.

Les bêtes émergeaient, trop nombreuses, pourtant elles semblaient s'en désintéresser pour l'instant. L'Archicolonelle remarquait les traits du jeune Pelias qui se tordaient sous cette lutte incompréhensible entre crainte, honte, rage et ignorance. Elle se leva et d'un geste refoulé par ses menottes magnétiques elle lui demanda de la libérer, elle et ses congénères.

Il hésita, s'avança puis s'immobilisa pour vaciller à nouveau. Une force le contraignait. Enfin, il se décida et passa sa main sur les verrous de Santhe puis celui de ses compagnons.

— Ne me le faites pas regretter !

— Nous devons partir, fit-elle, très vite. Avec de la chance, ces choses ne nous suivront pas.

Halekeis exigea aussitôt à l'un des commandos de lui rendre Lente Vindicte. Pelias acquiesça, puis les Archelans se dépêchèrent de s'équiper. Santhe saisit fermement son pistolet lourd et son épée sans nom en regardant autour, apeurée elle aussi, car l'une des bêtes de fer les avait remarqués.

Elle s'élança à toute allure en entendant l'une des choses la poursuivre à son tour. L'Archicolonelle se jeta sur l'aristocrate encore debout pour le plaquer au sol tandis qu'une énorme masse froide et acérée frôla leurs silhouettes pour s'écraser plus loin en broyant l'un des commandos. Elle se releva rapidement, tira Halekeis et en profita pour ramasser ses armes tombées dans les feuilles mortes. Elle saisit les sacs de matériel dont celui, lourd, de Kaal, et prit au passage un jerrican d'hydrocarbure sur le cadavre d'un autre soldat avec le lance-flamme. Elle laissa l'arme pour garder le réservoir, car une idée lui traversait la tête.

Aussitôt, elle bondit vers le bois, suivie de Halekeis, Kaal, puis le vicomte désormais seul. Elle répandit une grande partie du liquide inflammable sur son passage. Alors que les bêtes la succédaient, elle laissa Pelias talonner Kaal et se tourna vers l'aristocrate.

— Vite, vos flammes !

Halekeis fit une pseudodanse dénaturée par sa course et leur panique, mais cela suffit pour lancer des étincelles qui embrasèrent l'hydrocarbure dans leur dos.

L'appel de flamme fut suivi d'une déflagration qui stoppa net les monstres et échauffa les reins de Santhe qui filait pour rejoindre Halekeis et les autres.


Larmes Inhumaines [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant