Chapitre 49

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Point de vue Gabriela
Deux mois plus tard...

Ces deux derniers mois, après tout ce que j'ai appris, ont été les plus longs de ma vie. Je n'ai pas cessé un instant de réclamer de la vengeance jusqu'à me planter les ongles férocement dans la peau. Il fallait que je trouve un plan, un plan pour mettre hors-jeu Jovan et à tous les niveaux. Un seul problème, je n'arrivais pas à me décider si je le voulais vivant ou mort. Ce qu'on appelle les sentiments me retenait prisonnière et m'étouffer de la manière la plus douloureuse possible, j'étais enchaînée, incapable de choisir. Parfois, je désirais être comme cet homme froid aux yeux de la couleur de l'émeraude. Ne rien ressentir à l'égard des autres, être apathique, tuer sans remord, ne plus avoir aucune trace d'humanité en moi.
J'étais persuadée que si Kaleb avait été à ma place, il en aurait déjà fini.

Et d'une manière incroyablement bouchère.

J'étais minable, je n'agissais pas comme une parraine pourtant Jovan a tué mes parents et j'étais là à hésiter quant à l'exécution du meurtrier de ma famille. Au diable la morale, a-t-il même regretter un instant ses actions ? Jusqu'à la fin, il affirmait ses objectifs. Je ne devrais ressentir que de la haine ne laissant place à aucunes autres émotions parasites. Je me plongeai lentement dans ma baignoire qui était légèrement bouillante pour détendre chacun de mes muscles et me relaxer comme si je n'étais pas au milieu d'une guerre meurtrière. Je ne voulais plus y penser, à plus rien.

Mais comment ai-je pu croire que j'y arriverais ?

Lorsque l'eau chaude réchauffa l'entièreté de mon corps me donnant une énorme satisfaction, ma première pensée se dirigea vers Kaleb. La réelle raison est due au fait que je ressentais du bien dans cette eau, toutefois, il n'y avait que cet homme qu'y arrivait à me faire sentir ce bien-être. Mais ce n'est plus le cas. À présent, me tenir à un mètre de lui me prive d'oxygène, je deviens molle, ne sachant pas quoi lui dire ou comment agir. Le nombre de fois où j'ai tenu une arme devant lui, ne la jamais fait tressaillir, pas une seule fois. Alors que moi, qui était derrière cette arme, cela me serrait d'une force folle le cœur. Je n'arrivais pas à lui faire du mal, non, je n'arrivais pas à le tuer. Lui faire du mal, c'était autre chose, comme lorsque je lui ai planté un poignard, il le méritait complètement et ce n'était pas si dur puisque je savais qu'il était résistant.

Mais ce jour-là, sous cette pluie endiablée, ce qui m'a fait le plus de peine était la douleur dans sa voix lorsqu'il m'a demandé de ne pas l'appeler ce mot qu'il redoute secrètement « monstre ». Seulement, j'étais folle de rage, je voulais le faire souffrir autant qu'il m'avait fait souffrir. Dans un sens, c'était purement égoïste, je me suis sentie tellement souillée et trompée, je voulais trouver un moyen de lui faire mal. Je ne suis pas mieux qu'eux. Loin de là, je me suis finalement assimilé à leur monde, à mon nouveau monde. Enfin, si on peut continuer à le considérer comme nouveau. Je plongeai ma tête sous le bain, voulant chasser toutes les mauvaises pensées bruyantes de mon esprit. Je restai comme ça encore quelques instants, songeant à y rester ainsi encore pendant des heures pour enfin quitter ce champ de bataille. Le repos était total, le sentiment de bien-être était tant intense dans cette eau douce qui semblait laver chacun de mes pêchées. Je me sentais propre, mais un sentiment amer se glissa en moi, car là où il y avait du bien se trouvait également du mal : la peur. La peur de devoir remonter, de retrouver mes vieux démons, de devoir me battre. J'étais épuisée, mais je savais que je ne pouvais pas déclarer forfait.

Subitement, me manquant d'air, je remontais à la surface en un bond. Et en un claquement de doigt, la boîte noire s'ouvrit à nouveau, sortant brutalement chaque démon pour qu'ils me martyrisent de la plus grande des cruautés. Le plus grand et le plus fort de ses démons s'appelait : Vindicta. Il me poussait aux pires crimes et si je ne l'écoutais pas, si j'osais transgresser ses ordres, il me torturait de la pire des façons, me montrant des cauchemars de ma famille se faire abattre chacun de leur tour, dans une mare de sang, sans que je ne puisse faire quoi ce soit, comme paralysée, incapable de crier de ne faire le moindre mouvement. Et dans chaque cauchemar, derrière l'arme utilisée se trouvait ce visage angéliquement démoniaque. Le visage incarnant le mensonge pur, la tromperie la plus traître, mon ancien ami, Jovan. Vindicta me remplissait d'une férocité profonde, m'éteignant petit à petit et éteignant également ceux qui avaient le malheur de m'avoir rencontrée. J'étais maudite, un parfum empoisonné qui intoxiquait les personnes qui osaient s'approcher trop près de moi. J'étais captive de mon propre destin funèbre.

LA LUNAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant