Chapitre 71

92 6 1
                                    

Attention aux âmes sensibles.

Je sentis quelque chose de chaud et de doux réchauffer mes lèvres, une chaleur inattendue dans le froid oppressant qui m'entourait. Une migraine atroce martelait ma tête, et des coups réguliers, à la fois forts et désespérés, frappaient ma poitrine. Chaque impact résonnait avec une intensité cruelle, me tirant lentement des ténèbres.

Et puis, cette chaleur qui m'avait touché les lèvres disparut soudainement.

Non.
Je veux encore sentir cette douce chaleur.

C'était une vivacité qui débutait sur mes lèvres et se répandait dans tout mon corps, m'envahissant d'une exaltation fiévreuse. Cette chaleur, ce contact, je ne voulais pas le perdre. Mes lèvres furent de nouveau réchauffées, et je sentis quelque chose glisser sur ma langue. C'était intime, presque excitant.  J'avais envie de poursuivre cet échange brûlant qui se déroulait à l'intérieur de ma bouche, malgré la douleur présente partout dans mon corps. Mais soudain, je ressentis un besoin impérieux de tousser. De l'eau jaillit de ma bouche alors que je m'étouffais violemment, mes poumons en feu.

Mes paupières semblaient scellées par une force invisible, rendant impossible l'ouverture de mes yeux. Mes mains, animées par un instinct de survie, tâtonnaient autour de moi. J'effleurai quelque chose de dur et mou à la fois. J'appuyai un peu plus fort.

Un téton ?

Je continuai à explorer, mes doigts rencontrant une surface chaude et dure. À l'intérieur, quelque chose battait furieusement. Si fort que mon cœur semblait vouloir se synchroniser avec lui.

Est-ce un cœur ?

Avec une force inouïe, j'essayai d'ouvrir les yeux. Mon champ de vision était encore flou. Puis, petit à petit, je le vis. Lui. Encore là. Mon sauveur.

Kaleb, agenouillé, me tenait sur ses jambes. Son corps trempé laissait couler des gouttelettes d'eau, tandis que des grains de sable collaient à sa peau. Ses traits étaient marqués par l'inquiétude et l'affolement, ses yeux verts brillants de peur. Je ne pus m'empêcher de sourire en le voyant.

Il est bel et bien vivant.
Kaleb est vivant.

J'effleurai sa joue du bout des doigts. Il semblait terrifié, son torse se soulevant et retombant rapidement sous l'effet de sa respiration paniquée. Son visage était un mélange de soulagement et d'effroi, chaque muscle tendu par l'angoisse qu'il venait de vivre. Il me regardait comme si j'étais sur le point de disparaître à nouveau, ses yeux verts fixés sur moi, ne lâchant pas prise.

C'était bien un ange alors.
Mon ange.

Il prit ma main avec la sienne tremblante et y déposa un baiser, ses lèvres tremblantes aussi. Je pouvais sentir la peur dans chaque geste, l'urgence dans chaque mouvement. Avec difficulté, je passai ma main dans ses cheveux mouillés, sentant les gouttelettes d'eau tomber sur ma peau. Ses cheveux étaient trempés, mêlés de sel et de sable, mais il semblait ne rien remarquer, tout son être concentré sur moi.

Je murmurai de toutes mes forces, bloquant mes larmes :

Kaleb, qu'aimes-tu dans la vie ?

Il m'observa, abasourdi. Puis, il soupira et me donna un sourire triste.

Toi, mi amor, répondit-il, sa voix tremblante de sincérité. Je ris avec difficulté.

Quelle drôle de réponse, répliquai-je dans un murmure.

Kaleb était clairement terrifié à l'idée de me perdre. Ses yeux, d'un vert intense, reflétaient une panique et une angoisse inhabituelle. Ses mains tremblaient encore, marquées par l'effort désespéré de m'arracher aux griffes de la noyade. Le voir ainsi, vulnérable, me touchait profondément. Le contraste entre sa force habituelle et la peur qui l'habitait en cet instant renforçait l'intensité de nos émotions partagées.

LA LUNAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant