Frida : L'amour ?

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Après ce jour, ma mère fut envoyée en prison. J'étais dévastée, mais chaque jour, je lui rendais visite, Marco à mes côtés. Voir son visage à travers cette vitre sale était un supplice. Je la remerciais silencieusement pour s'être sacrifiée à ma place, pour m'avoir protégée une dernière fois, mais la culpabilité me rongeait de l'intérieur. Comment pouvais-je continuer à vivre, sachant que c'est elle qui payait le prix de mon crime ?

Deux mois plus tard, la nouvelle de sa mort m'a frappée comme un coup de poignard en plein cœur. Une crise cardiaque, avaient-ils dit. Mais je savais que c'était le chagrin, le poids de notre histoire, qui l'avait achevée. Ma mère était morte, et avec elle, une partie de moi s'était éteinte.

Nous sommes allés vivre chez notre grand-mère, mais la perte de sa fille fut trop lourde à supporter pour elle aussi. Son cœur brisé n'a pas tenu longtemps, et elle nous a quittés à son tour. Marco, si jeune, ne comprenait pas tout ce qui se passait autour de lui. Mais chaque fois que je pleurais, il venait poser sa petite main sur mon visage, essayant de sécher mes larmes avec ses doigts maladroits. Il était ma seule lumière, mon dernier lien avec le monde.

Je sombrais dans une dépression profonde, mes journées me semblaient une bataille perdue d'avance. Mais pour Marco, je me devais d'être forte. Il était tout ce qu'il me restait, ma seule raison de me lever chaque matin. J'avais perdu ma mère, ma grand-mère, mais je ne pouvais pas perdre Marco. Pas lui.

Nous avons été recueillis par la famille Osorio, ignorant que c'était moi qui avais pris la vie de leur soi-disant héros. Les Soles croyaient que ma mère était coupable, et chaque jour, ils crachaient sur sa mémoire en ma présence. Dans tout El Sol, ma mère était haïe pour avoir tué un homme qui était, à leurs yeux, un héros, un homme qui avait trahi son propre pays pour eux, un martyr.

Je me consumais dans une colère muette, pétrifiée par la peur d'être séparée de Marco, de ne pas pouvoir le protéger comme je n'avais pas pu protéger ma mère. La pression qu'El Sol avait exercée sur le juge pour alourdir la peine de ma mère me révoltait. Malgré les preuves des abus qu'elle avait subis, elle avait été condamnée de manière cruelle, injuste. Et mon géniteur, ce monstre, était mort trop facilement, emportant avec lui ses crimes sans jamais avoir vraiment payé.

L'injustice de ce monde me dévorait. Je haïssais ce sentiment d'impuissance, ce poids sur mes épaules qui ne faisait que grandir. Mon père était mort, ma mère aussi, et je restais là, vivante, dans un monde qui me méprisait, incapable de révéler la vérité. Marco était ma seule échappatoire, la seule chose qui m'empêchait de sombrer complètement. Mais au fond de moi, je savais que ce n'était que le début. Ce cauchemar, cette vie brisée, n'était que le commencement d'une longue descente aux enfers.

Kaleb n'avait jamais jugé ma mère, et il n'avait jamais abordé le sujet avec moi. Puis un jour, j'ai compris pourquoi.

Nous nous entraînions comme d'habitude. Malgré la souffrance qui me rongeait, être avec Kaleb me permettait de relâcher la tension. Mais ce jour-là, quelque chose était différent. Après un entraînement intense, nous avons pris une pause. Kaleb s'est assis à côté de moi, mais il était étonnamment plus froid que d'habitude. Beaucoup plus froid. Son comportement m'inquiétait.

Je l'observai, cherchant à comprendre ce qui se passait. Puis, brusquement, il brisa le silence.

Pourquoi tu m'as menti ?, demanda-t-il d'une voix tranchante, me prenant complètement au dépourvu.

Que veux-tu dire ? Je ne t'ai jamais menti, Kaleb, lui répondis-je, le cœur sincère et un peu perdu. Il tourna alors la tête vers moi, et son visage exprimait une sorte de douleur que je n'avais jamais vue chez lui.

LA LUNAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant