Chapitre 110

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Trois jours avant.



L’église est vide, il n’y a aucun croyant. Je longe cette allée où des rangées de bancs sont classées à ma gauche et à ma droite. Je longe cette allée en fixant partout. En fixant l’autel, en fixant cette énorme croix au-dessus de ma tête, en fixant ce lieu dont je n’avais plus remis les pieds depuis des années. Et je me stoppe sur la première rangée. Je m’asseois et regarde l’autel. Je m’assois et commence à repenser à toutes ces fois où notre mère nous amenait ici tous les dimanches pour prier et pour se rappeler que tout là haut, un Être Puissant veille sur nous.

Quand je sens une présence près de moi.

Le père Salomon.

Vêtue d’un pantalon noir et d’une chemise à courtes manches noires qui a un petit carré blanc au niveau du coup. Un accoutrement de prêtre quoi. Avec ses lunettes carrées qui ne lui ont jamais quitté, malgré toutes ces années. Il s’asseoit à côté de moi en serrant sa Bible entre ses mains. Et il ne me regarde pas, il ne parle pas, il regarde lui aussi cet autel. Et le silence qui s’installe est apaisant. Apaisant pour moi, pour mon esprit et pour mon cœur.

— Mon père…

— Tu as bien grandis mon fils.

— Ouais…

J’ai tourné la tête vers lui, pour me rendre compte qu’il me regardait avec cette même tendresse que depuis que j’étais gamin. Il n’avait pas changé. À part toutes ces rides à cause du temps et de l’âge. Mais à part ça, il avait toujours cette même allure de saint et ce même sourire chaleureux aux lèvres.

— Mon père, je ne suis plus ce petit garçon naïf d’y a des années.

— Je vois ça. Mais tu veux que je te dise quelque chose ?

Silence.

— Je vois toujours cette même lueur de bonheur dans tes yeux quand tu étais avec ta mère. Je vois dans tes yeux de la tristesse, mais aussi de la joie. Et c’est la joie qui l’emporte…

— Peut-être parce que je crois avoir trouvé ma petite joie.

— Tu crois ? Ou tu l’as trouvé ?

— Je…l’ai trouvé.

Je m’adosse en fixant le plafond de cette grande église.

— Comment est-elle ?

Je croisai mes doigts sur mon ventre. Et sans demander de quoi est-ce qu’il parle, je sus ce qu’il voulait savoir.

— Petite de taille, je dirais même qu’elle m’arrive aux coudes…Belle, avec des yeux marron. Incroyablement marron, un peu comme les yeux de chat. Un caractère de feu, parce qu’elle a un sacré répondant…Une peau lisse, de longs cils…Elle est attentionnée, timide quand elle le souhaite, adorable et marrante. Marrante parce qu’elle me fait toujours rire quand elle fronce les sourcils parce qu’elle essaie d’analyser un truc.

— Comment s’appelle-t-elle ?

— Elisabeth. Mais je préfère l’appeler amore, parce que c’est mon amour. Et ma belle parce qu’elle est incroyablement belle.

— Et tu l’aimes, pas vrai ?

— Oui. Mais j’ai peur qu’elle sombre avec moi.

— Comment ça ?

Je me redresse et regarde le père Salomon dans les yeux. Parce qu’il faut que je lui montre à quel point j’ai peur elle. Oui, pour la première fois de ma vie, j’ai bien peur d’amener quelqu’un avec moi dans ma chute. Elle ne doit pas tomber pour moi, elle est trop pure et gentille pour un type froid et glacial comme moi. Beaucoup trop pure pour Armando Rivera.

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