Chapitre 27 : Vision d'horreur

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La nuit enveloppait le bunker d'un silence pesant. Elena dormait profondément, ses paupières papillonnant sous l'effet d'un rêve. Un doux rêve, au début. Elle était à nouveau une petite fille, dans cette prairie verdoyante où elle aimait tant passer du temps avec sa mère. Elles étaient assises ensemble sur une nappe à carreaux, le soleil brillant réchauffant leur peau. Devant elles, un lac paisible miroitait sous la lumière. Le chant des oiseaux et le clapotis léger des vagues apaisaient l'esprit d'Elena. Tout semblait parfait.

Dans ce rêve, sa mère était telle qu'elle se souvenait : un sourire chaleureux, des cheveux longs et bruns encadrant son visage doux, et cette voix qui lui apportait toujours un sentiment de sécurité. Elles discutaient de tout et de rien, partageant un moment simple et réconfortant. Pour un instant, Elena oublia tout. Le monde surnaturel, le danger, les Saigneurs, tout semblait si loin. Ce rêve la ramenait à une époque où tout était encore possible, une époque avant les ténèbres.

Mais le doux rêve heureux d'Elena ne dura pas. Au fil des minutes, l'ambiance de son rêve changeait drastiquement.

Les rayons du soleil commencèrent à s'éteindre doucement, le ciel virant à un gris menaçant. Elena regarda autour d'elle, le cœur battant plus vite. L'atmosphère devint lourde, et un vent froid se mit à souffler, faisant trembler l'herbe autour d'elles. Le lac, jusque-là tranquille, se mit à agiter ses vagues de manière inquiétante. Des ondulations, d'abord légères, se transformèrent en vagues plus puissantes, comme si une force invisible l'agitait de l'intérieur.

« Maman ? » appela-t-elle, la voix tremblante. Elle sentait que quelque chose n'allait pas, mais sa mère ne réagit pas immédiatement. Elle fixait l'horizon avec une intensité étrange, son sourire s'évanouissant peu à peu.

Puis, dans un geste brusque, elle agrippa le bras d'Elena. Le contact fut si brutal qu'elle en eut mal. Lorsqu'elle tourna les yeux vers sa mère, elle ne reconnut plus son visage. Ses traits s'étaient durcis, et son regard autrefois doux était devenu terrifiant, empreint de peur. Elle lui murmurait quelque chose, mais sa voix semblait se dissoudre dans l'air, comme si elle venait de très loin.

« Ils viennent te chercher... » articula finalement sa mère d'un ton pressant.

Elena voulut répondre, mais sa gorge se noua. Ses lèvres refusèrent de bouger. Puis, soudain, des ombres massives surgirent de l'horizon, se précipitant vers elles. Des silhouettes indistinctes, menaçantes, s'approchaient à grande vitesse. La terre se mit à trembler sous leurs pieds. Le cri d'Elena s'étouffa dans sa poitrine, alors que les ombres engloutissaient tout sur leur passage.

Elle se réveilla en sursaut.

Son souffle était court, son cœur battant à toute allure. Elle était trempée de sueur, et la couverture semblait l'étouffer. La pièce était plongée dans le noir, mais les images du rêve persistaient dans son esprit comme des flashs horribles. Elle sentait encore la poigne glacée de sa mère sur son bras. Elena ferma les yeux, essayant de reprendre le contrôle, mais tout ce qu'elle revoyait, c'étaient ces hommes masqués. Ceux dont elle ne parvenait pas à se débarrasser depuis qu'elle en avait eu une vision, il y a des semaines de ça. Leur présence, leur danger, tout refaisait surface. Ils venaient la chercher ; c'était ce que sa mère avait dit.

Elle se redressa, les mains tremblantes, et regarda autour d'elle. Le bunker était calme, mais l'air y semblait soudainement oppressant. L'idée de rester seule dans cette chambre devenait insupportable. Elle avait besoin de bouger, de s'éloigner de ces pensées sombres qui l'assaillaient. Sans réfléchir, elle décida de se lever.

Ses pieds nus frôlèrent le sol froid du bunker tandis qu'elle avançait d'un pas mécanique vers la salle de bain, espérant qu'une douche l'aiderait à se calmer. Tout en entrant dans la salle de bain, elle ne prit même pas la peine d'allumer la lumière. L'obscurité était moins intimidante que ses pensées. L'eau chaude coula rapidement sur sa peau, enveloppant son corps d'une chaleur rassurante. Pourtant, aucune sensation de soulagement ne venait vraiment chasser le malaise qui la rongeait.

Elle se lava, mais tout se faisait de manière automatique. Ses gestes étaient lents, presque robotiques, alors que son esprit continuait de repasser en boucle les scènes de son rêve. Ces silhouettes menaçantes. Ces mots de sa mère.

« Ils viennent te chercher. » Mais qui étaient-ils ? Et pourquoi cette terreur persistante en elle ?

Sortant de la douche, elle attrapa les vêtements de rechange qu'elle avait emportés, frissonnant légèrement. Puis elle quitta la salle de bain et reprit sa route dans le corridor. Cependant, au moment de retourner dans sa chambre, sa main s'arrêta sur la poignée. L'idée de s'y enfermer la dégoûtait. Non, elle ne pouvait pas y retourner, pas encore. La solitude dans cette pièce sombre serait trop lourde à supporter. Ses yeux se dirigèrent donc vers la porte de la cuisine. Peut-être qu'un chocolat chaud et un livre l'aideraient à passer le reste de la nuit.

Sans un bruit, elle se dirigea vers la cuisine du bunker, où elle espérait trouver un semblant de réconfort dans la lueur tamisée du frigo et la douceur d'une boisson chaude. Mais au fond d'elle, elle savait que ce n'était pas un simple rêve. Cette vision n'était qu'un avertissement de plus. Elle était en danger, et le temps pressait.

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