Chapitre 15

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   Toute la fin du week-end, Guillaume reste avec Hippolyte et Célian. Il prend ses distances et semble parfois carrément ignorer ma présence. En sera-t-il ainsi désormais ? Lors du trajet retour, je ne peux m'empêcher de me demander comment se serait passé ce week-end si Icare était venu, comme prévu. Je pensais apprendre quelques anecdotes à son sujet, au lieu de ça, un malaise s'est installé entre son ami et moi.

Alors que nous vidons le minibus et rangeons le matériel au siège de notre association, le dimanche soir, Théo m'interroge :

— J'ai raté un truc au sujet de Guillaume ?

— Pourquoi tu dis ça ?

— Arrête Aux, vendredi vous passez quasiment tout l'après-midi à discuter sur le chantier, le soir vous descendez uniquement tous les deux, et quand vous remontez vous ne vous adressez plus la parole, et ce pour le reste du week-end.

J'ai dit à Guillaume que je ne parlerai à personne de sa demande. Mais je ne pensais pas à Théo à ce moment-là. C'est mon meilleur ami et j'ai une confiance aveugle en lui. Il était évident que je lui en parlerais de toute façon.

— Il m'a proposé de sortir avec lui.

Il pose les seaux qu'il tenait à la main.

— Oh... Et ?

— Et j'ai refusé.

— A cause d'Icare ?

— Inconsciemment oui, je crois.

— Je vois.

Il reprend les seaux et les pose sur une étagère, l'air pensif. Je m'approche de lui.

— Tu penses que j'ai eu tort ?

— Je ne sais pas. L'avenir nous le dira !

— Ça m'embête quand même vraiment que Guillaume réagisse de cette façon.

— Laisse-lui le temps de digérer. Il n'a pas dû en prendre beaucoup des râteaux ! Si ça se trouve, c'est le premier !

— Peut-être...

— Chacun le vit différemment de toute façon. Dans quelques jours il aura oublié, il sera passé à autre chose.

— Oui c'est sûr, j'espère juste qu'il ne continuera pas à être aussi distant avec moi.

— Il n'y a pas de raison.

— Tu crois qu'il va en parler à Icare ?

— Pourquoi est-ce qu'il ferait ça ?

— Ben parce qu'ils sont très bons amis tout simplement. Et quand on est ami autant qu'ils le sont, on se dit tout, non ?

— Je ne sais pas, ça reste des mecs, n'oublie pas !

Nous rions ensemble lorsqu'Hippolyte m'appelle depuis le fond du dépôt.

— Auxane !

Il se dirige vers moi en brandissant un objet que je ne reconnais que lorsqu'il arrive à ma hauteur.

— Tiens, j'ai failli oublier, Icare m'avait fait passer ça pour toi.

Le range-CDs ! C'est juste ce dont j'avais besoin pour me faire penser à autre chose qu'à la demande et à la réaction de Guillaume. Je le remercie et l'ouvre dès que nous nous mettons en route, Théo et moi.

« Faute d'avoir pu parfaire ma culture musicale à tes côtés ce week-end, je te fais passer un groupe français, Mass Hystéria. Je sais pas si tu connais, en tout cas, moi j'adore ! Je viendrai la prochaine fois, à condition que mes parents est la bonne idée de pas se lancer dans des travaux. Je t'embrasse. »

J'oublie instantanément ce qui me tracassait une minute auparavant et bombarde Théo de questions.

— Quand est-ce qu'Icare a donné tout ça à Hippo à ton avis ? Guillaume m'a dit qu'il ne l'avait averti que la veille au soir qu'il ne viendrait pas.

— Je ne sais pas, peut-être qu'il avait prévenu Hippo avant Guillaume, plusieurs jours avant si ça se trouve. Ou peut-être qu'il a aussi prévenu Hippo au dernier moment et qu'ils se sont vus rapidement pour lui faire passer le range-CDs. Ça change rien de toute façon.

— Ben si, s'ils ont dû se voir exprès le soir avant qu'on parte juste pour qu'Icare puisse faire passer le range-CDs à Hippo, ça veut quand même dire que c'était important pour lui, non ?

— Commence pas à t'emballer !

Je relis le petit mot et le tends à Théo.

— Elle est énorme sa faute sur « est ».

— C'est vrai qu'elle est pas mal !

— Tu crois que c'est ça l'explication, ses parents ont eu besoin d'aide pour des travaux ?

— Ben oui il semblerait. Tu n'y crois pas ou quoi ?

— Si, si, je te demande juste.

— Et tu me fais pas de commentaire sur le « Je t'embrasse » ?

Il accompagne sa question d'un clin d'œil. Je hausse les sourcils en souriant et le taquine à mon tour.

— Aucun commentaire non. Tu es jaloux parce qu'il ne t'embrasse pas aussi ?

Il me donne un coup d'épaule.

— Exit le problème Guillaume si j'ai bien compris ?!

— Exit, oui. C'est quand le prochain week-end ?

— Dans six jours !

— Arrête, tu as très bien compris de quoi je parle ! La prochaine sortie avec l'asso patate !

— Oh là là, quelle véhémence ma chère ! C'est pour Pentecôte, tu vas pouvoir tenir trois semaines ?!

J'ironise moi aussi.

— Je sais pas justement ! Cléo a déjà parlé du lieu ou pas ?

— Oui, j'en ai parlé avec elle samedi soir pendant que tu étais sous la douche. On sera dans l'Ariège, un site médiéval encore. Un château du comte de Foix, il me semble. Le site a été fouillé clandestinement il y a plusieurs années et les pilleurs ont recouvert une partie des vestiges d'un gros tas de terre au fur et à mesure qu'ils creusaient. Notre travail consistera à enlever ce gros tas de terre en le tamisant entièrement pour voir s'il ne reste pas des petits objets.

— C'est de la fouille ça, super, j'adore ! On sera dans un gîte aussi ?

— Non, au camping cette fois.

— C'est plus sympa, je préfère. Vivement qu'on y soit !

— Qu'on y soit, ou qu'il y soit ?!

— Je ne te réponds même pas !

Je croi(s) qu'en fait je t'aime...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant