Icare est censé appeler dans moins de trois heures. Comment réagir face à tous ses revirements ? Je suis tellement surprise de découvrir cette facette de sa personnalité que je ne sais plus ce que je dois faire ou ne pas faire. Vais-je simplement décrocher quand il appellera ? Ou est-ce que je ne préfère pas qu'il laisse un nouveau message ?
Je compose immédiatement le numéro de Théo qui arrive quelques instants après, presque en courant. Je lui tends mon téléphone pour qu'il écoute le premier message. Dès les premières secondes, je le vois écarquiller les yeux en grand.
— C'est quoi cette voix de camé ? C'est limite cohérent ce qu'il raconte, il bafouille, on comprend à peine... Il espère vraiment te séduire, là, ou te faire fuir ?
— Ben je t'avoue que je ne sais plus quoi penser. Ecoute le deuxième.
Théo s'exécute puis me rend mon portable en soupirant avec force.
— Je comprends mieux pourquoi tu m'as dit que tu ne savais pas quoi faire quand il rappellerait. Mais à mon avis, Aux, il ne te rappellera pas. Quand il va redescendre de là où il s'était perché avant de te laisser ces messages, s'il arrive encore à réaliser ce qu'il a fait, il aura trop honte pour reprendre contact.
— Honnêtement je sais même plus ce que j'attends de lui...
Nous restons tous les deux sur mon canapé déplié toute la matinée, en sachant au fond de nous qu'Icare ne donnera certainement pas de ses nouvelles ce matin. Mais nous n'imaginions pas que ce mutisme durerait.
Une semaine. Puis deux. Puis trois. Pas d'appel, pas de message, pas de visite. Mais, contre toute attente, cette période de silence a le mérite de mettre mes idées au clair. Icare me manque. Notre complicité me manque. Nos échanges me manquent.
Contre l'avis de Théo, un soir de la troisième semaine passée sans nouvelle de lui, vers minuit, n'y tenant plus, je lui envoie un texto, la Saint Icare me donnant un prétexte.
> Au cas où tu serais toujours en vie, bonne fête.
Cette fois, je n'ai pas à attendre sa réponse. Elle arrive dans la foulée.
> Tu peux même pas imaginer à quel point ça me fait plaisir que t'ai pensais à moi. Merci Auxane.
Je note qu'il en est revenu à Auxane, et en suis un peu déçue, mais ses conjugaisons toujours aussi hasardeuses et sa réponse me redonnent le sourire. Je n'ai même pas le temps de décortiquer son message qu'un deuxième me parvient. Visiblement, il attendait que je fasse le premier pas pour renouer le contact.
> Et peut-être encore plus plaisir qu'apparemment tu ne m'en veux pas trop.
Je ne veux plus passer de temps si long sans nouvelles de lui, j'ai envie que notre relation évolue et, voyant qu'il est clairement resté bloqué sur les derniers événements, je décide de lui tendre la main.
> Je ne sais pas de quoi tu parles, il semble que j'aie tout oublié...
Nous échangeons alors plusieurs messages.
> T'as raison c'est le mieux. J'espère juste que t'auras pas de flashback.
> Pas de risque, je suis amnésique.
> Si je te dis lundi 13 septembre ça te fais penser à quelque chose ?
> C'est pas le soir où on était au concert d'Aqmé ?!
> Non ça c'était 4 jours avant. T'es pas super super amnésique quand même.
> Je voudrais t'y voir...
> Ça c'est clair, moi aussi j'aimerais bien m'y voir à recevoir des messages comme ça venant de toi...
Je choisis de laisser en suspens sa réponse et de ne pas faire de commentaire. Et un sourire niais fend mon visage lorsque je m'endors paisiblement.
En me levant le lendemain, je m'attends à voir le pictogramme de réception d'un message, mais il n'en est rien. Deux jours passent sans que je n'obtienne de nouvelles d'Icare. Ce nouveau silence me déboussole un peu, mais après tout, peut-être attendait-il une réponse l'autre soir, ce serait donc à moi, à nouveau, d'envoyer un texto la première.
Avec une idée derrière la tête, je me douche, m'habille en réfléchissant bien trop longtemps à ma tenue, et me prépare de la tête aux pieds. J'attends le dernier moment, vingt heures, pour tenter de me donner du courage, et me jette à l'eau.
> Serais-tu libre pour un ciné en ce samedi soir pluvieux ?
Alors que je m'attendais à ce qu'il saute sur l'occasion et me réponde ou m'appelle instantanément, je ne reçois un message qu'à vingt-trois heures trente passées.
> Je suis trop désolé je viens juste de rentrer !!!
Je suis déçue et ne peux m'empêcher de me demander où et avec qui il a passé sa soirée. Mais je n'en laisse rien paraître.
> Pas grave, une autre fois.
> Avec grand plaisir, le week-end prochain si tu veux.
> Ça marche.
> T'es pas super prévisible comme fille...
Je souris bêtement, toute seule dans mon appartement.
> Tu l'as déjà dit...
> C'est vrai, allez bonne nuit.
Il veut visiblement arrêter là notre échange alors que j'aurais bien continué toute la nuit. Qu'à cela ne tienne, je me couche et cherche le sommeil en essayant déjà de planifier la soirée cinéma du week-end prochain, pour parer à toutes les éventualités.
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Je croi(s) qu'en fait je t'aime...
RomanceAuxane et Icare se rencontrent en 1996 alors qu'ils sont encore jeunes. Rapidement, ils se tournent autour et tous les prétextes sont bons pour multiplier les contacts, jusqu'à ne plus pouvoir se passer l'un de l'autre. Mais les années passent sans...