Je monte avec Icare jusqu'à son appartement vide. Nous nous allongeons sur le lit, dans sa chambre plongée dans la quasi obscurité et nous laissons bercer par la musique, ma main au creux de la sienne, nos doigts entrelacés. Nous sommes muets, tournés l'un vers l'autre, appuyés sur le coude de notre bras resté libre. Nous ne nous quittons pas des yeux. Le peu de lumière qui filtre de la fenêtre de toit me permet de distinguer son visage. J'essaie d'en mémoriser les moindres détails, consciente que c'est probablement la dernière fois que nous serons si proches.
Icare finit par exaucer mes vœux silencieux et pose sa bouche sur la mienne. Je retiens mes larmes de couler pendant que nous nous embrassons et me blottis contre lui en m'imprégnant de son odeur autant que je le peux. Nous restons dans les bras l'un de l'autre pendant un long moment avant de nous glisser sous les draps.
Je stoppe immédiatement sa main baladeuse, le sourire charmeur de Lazare me revenant brusquement en mémoire. C'est un garçon adorable et il ne mérite pas que je lui fasse de mal. Je prends alors la décision la plus difficile de toute ma vie et annonce à Icare que je préfère partir.
— C'est la dernière nuit qu'on passe ensemble, Aux...
— Peut-être mais je ne suis pas comme ça. J'ai quelqu'un dans ma vie et je n'ai pas envie de le faire souffrir.
— Sérieux ? Ben pourquoi tu me l'as pas dit ? Il est gentil avec toi, j'espère ?
J'insiste sur la fin de ma phrase :
— C'est un ange.
Il me sourit, comprenant l'allusion.
— Alors je suis content pour toi. Il a de la chance, j'espère qu'il en a conscience...
Comme je ne réponds rien, il se lève et attrape un vêtement dans son placard, puis il me le tend.
— Tiens Aux, un souvenir.
Je le déplie et observe le sweater à capuche noir brodé Deftones que je découvre, pendant qu'il continue ses explications.
— Ils sont passés à Poitiers il y a deux mois, et j'ai pas osé t'appeler pour qu'on y aille ensemble. Je me le suis acheté là-bas. C'était la première fois que je les voyais, et j'y tiens énormément. Presqu'autant qu'à toi en fait... Alors je voudrais que ce soit toi qui le gardes, en souvenir de moi.
Je suis scotchée. Cette attention me surprend au plus haut point, mais j'essaie de ne rien en laisser paraître.
— Merci. En fait, j'y suis allée aussi, toute seule...
— C'est pas vrai ?? T'es dingue ! Il aurait pu t'arriver n'importe quoi, toute seule à ce genre de concert ! Pourquoi tu m'as pas appelé ?
Je choisis d'ignorer sa dernière question.
— Il m'est effectivement arrivé quelque chose.
— Merde, qu'est-ce qui s'est passé ?
— J'ai rencontré celui avec qui je suis aujourd'hui.
Je lui cache volontairement son prénom, afin d'éviter toute remarque de sa part et il me sourit, visiblement soulagé.
— Alors je suis ravi pour toi. J'ai quand même le droit de t'embrasser avant que tu partes ?
Je colle mes lèvres aux siennes en guise de réponse et pars sans me retourner, son pull sur les épaules.
Je conserve son cadeau comme une relique, dormant avec, chaque nuit où Lazare est absent, et ne le lavant jamais pour tenter de conserver son odeur indéfiniment. Les seuls messages qu'Icare et moi échangeons sont pour nos anniversaires respectifs et pour la nouvelle année, même si pas une journée ne passe sans que je ne pense à lui. Et puis, au fil des années, les journées se transforment en semaines, mais jamais je ne l'oublie.
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Je croi(s) qu'en fait je t'aime...
RomanceAuxane et Icare se rencontrent en 1996 alors qu'ils sont encore jeunes. Rapidement, ils se tournent autour et tous les prétextes sont bons pour multiplier les contacts, jusqu'à ne plus pouvoir se passer l'un de l'autre. Mais les années passent sans...