Chapitre 18

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   La vue d'en haut est effectivement superbe. La butte sur laquelle se trouve le site est à une altitude inférieure à toutes les montagnes qui l'entourent, de sorte qu'on a l'impression de trôner au milieu d'un cirque. L'environnement est entièrement boisé, seuls quelques petits villages à flanc de coteaux percent au milieu du vert des arbres.

Cléophée est parvenue au sommet en premier et indique l'emplacement réservé au pique-nique à tout le monde au fur et à mesure des arrivées. Nous sommes tous essoufflés. Je n'en peux plus car je me suis efforcée de garder le rythme tout le long de la montée pour ne pas montrer que je fatiguais. Icare et Guillaume doivent être sportifs, ils ont discuté tout au long de l'ascension alors que Théo et moi avons fini par garder le silence pour économiser notre souffle.

Nous posons tous les deux nos sacs sur un mur arasé à l'ombre d'un hêtre et déballons aussitôt le matériel qu'a transporté Théo pour le mettre avec les seaux déjà entassés par les premiers montés. Icare et Guillaume s'assoient à côté de nos sacs et boivent rapidement. Je suis contente de constater que la partie randonnée les a au moins assoiffés. Une dizaine de minutes plus tard, lorsque Célian et Hippo arrivent, tout le monde a déjà commencé à manger, dans un silence quasi religieux. Le trajet et la montée nous ont tous assommés.

Icare se tourne vers nous et demande :

— On finit à quelle heure ?

Théo lui répond en se moquant :

— Quel enthousiasme, on n'a pas commencé que toi tu penses déjà à terminer !

— Mais non, c'est pas ça, c'est juste pour avoir une idée du déroulement de l'après-midi !

Théo continue à le taquiner.

— Ben si vous n'aviez pas mis deux heures pour monter vos tentes vous auriez eu les infos de Cléo tout à l'heure !

— C'est Guillaume, c'est une brêle, il a fallu que je l'aide pour la sienne, moi j'avais terminé en trente secondes !

Guillaume proteste avec ironie.

— Mais bien sûr, c'est ça, fais le malin ! Tu veux que je leur explique pourquoi tu as effectivement monté ta tente rapidement peut-être ?!

— Ta gueule !

— Tu en as trop dit, vas-y, dis-le nous on veut savoir maintenant ! réplique Théo.

Icare bondit sur Guillaume et lui plaque la main sur la bouche pour l'empêcher de parler mais c'est Hippo qui vend la mèche.

— Il s'est entraîné à monter sa tente plein de fois dans son jardin avant de venir !

Icare rougit et corrige en mentant de façon évidente :

— Je me suis pas entraîné, je l'ai juste montée une fois parce qu'elle est neuve et je voulais vérifier qu'il ne manquait rien, c'est tout.

— Ouais, ouais, c'est ça, lance Guillaume en se rasseyant.

— N'empêche qu'avec vos conneries j'ai toujours pas ma réponse ! On finit à quelle heure ?

— Vers dix-sept heures. Le temps de rassembler le matos et redescendre, on devrait être au camping vers dix-huit heures.

— Merci Aux, enfin quelqu'un de sympa avec moi.

Entendre mon surnom prononcé par sa si jolie bouche accompagné de ce compliment, si petit soit-il, m'envoie une décharge dans tout le corps.

— Pour la peine je me mets avec toi cet aprem !

Je suis aussi ravie que surprise par son annonce. Théo me donne un petit coup de coude discret et me sourit. Au même moment, Cléophée donne les instructions à voix haute :

— Alors on va mettre les jeunes sur le travail plus minutieux de tamisage du tas de terre de fouilles clandestines, et les moins jeunes à la consolidation et à l'aménagement des parties dégagées l'an passé par une autre association. Rangez vos restes de nourriture dans vos sacs si vous ne voulez pas les retrouver envahis de fourmis, et ensuite on attaque !

Icare m'attrape par le bras et annonce tout fort :

— Nous on se met ensemble !

Cléophée lui répond :

— Ah mais de toute façon vous êtes tous les six ensemble !

Célian ajoute, à l'attention d'Icare, comme si je n'étais pas là :

— Si tu voulais être tranquille avec elle c'est raté !

Je sens mes joues virer au rouge. Icare lui montre son majeur pour seule réponse. Théo vole à mon secours en me tendant un seau, une truelle, une brosse et un tamis. Je me lève et nous nous dirigeons vers le tas de terre, suivis de près par Célian, Hippo, Guillaume et Icare, tous munis du même matériel que moi.

— Bon, il va falloir que vous nous disiez ce qu'on doit faire parce que nous on n'a jamais fait ça, dit Guillaume.

Le malaise qui s'était installé lors du week-end dans le Tarn semble s'être dissipé, j'en suis soulagée et saute sur l'occasion. Je m'agenouille pour montrer le travail en expliquant :

— Il va falloir qu'on enlève ce gros tas de terre en procédant couche par couche. Donc il faut qu'on se répartisse tous les six autour. Il suffit de racler avec la tranche de la truelle, sans creuser, et de remplir le seau de terre au fur et à mesure en regardant s'il n'y a pas de vestiges au milieu. Quand le seau est plein, il faut le tamiser un peu plus loin pour vérifier qu'on ne soit pas passé à côté d'un petit objet. C'est tout !

— OK, bon, ben que le meilleur gagne alors !

— C'est ça !

Guillaume s'installe à côté de moi mais Icare proteste :

— C'est ma place, là !

— Trop tard, j'y suis !

— Ben tu dégages, j'avais dit que je me mettais avec Auxane !

Célian intervient :

— Bon les deux coqs, quand vous aurez fini votre dispute digne d'une cour de récré, vous allez peut-être pouvoir vous mettre au boulot ?

Je voudrais me cacher sous le tas de terre tellement je suis mal à l'aise. Je ne détache pas mon regard de la terre que je suis en train de racler et prie intérieurement pour que quelqu'un lance un autre sujet de conversation. Heureusement, mon seau est déjà plein et j'en profite pour m'éloigner pour le tamiser. J'espère que quand je reviendrai, la discussion sera plus légère.

Je croi(s) qu'en fait je t'aime...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant