Chapitre 11

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Les semaines passent rapidement, et, à la veille du repas, mes yeux se posent sur le tableau fixé dans le hall d'entrée de l'association. Toutes les informations importantes y sont marquées et régulièrement mises à jour par les encadrants. Depuis une quinzaine de jours y figure un tableau de réservations des membres pour la soirée, tracé à la craie. En face du nom d'Hippolyte, le chiffre sept est inscrit. Je suppose que les six premiers correspondent à son inséparable bande de copains, mais je me demande qui peut bien être le septième. Et si c'était plutôt la septième ? S'agit-il de la fille qui accompagnait Icare lors du concert de Nada Surf ? Lorsque cette éventualité me vient à l'esprit, je prends une décision radicale : j'efface purement et simplement mon nom du tableau ainsi que le chiffre un inscrit en face.

Théo ouvre grand les yeux en se tournant vers moi.

— Parce que... ?

— Parce que je n'ai pas envie de voir Icare avec sa copine. Ça m'a trop pris la tête la dernière fois.

— Qu'est-ce qui te dit que le septième est une fille, et qui plus est qui l'accompagnerait à lui précisément ?

— Je sais, c'est ridicule, mais tant pis. Ma décision est prise. Tu iras quand même ?

— Oui, je suis censé aider pour les jeux je te rappelle.

— Ah oui, c'est vrai... Je suis vraiment désolée de te laisser tomber comme ça au dernier moment.

— Pas de souci Aux, ce n'est que moi ! Je comprends.

— Tu me raconteras ?

— Bien sûr, sans oublier de détails ! Par contre si on me pose la question, je donne quoi comme explication à ton absence ?

— Je ne vois pas qui pourrait te le demander franchement. Mais si on t'interroge, tu n'auras qu'à tout simplement dire que j'ai préféré rester chez moi. Point !

— OK, comme tu veux...

Le lendemain, jour du repas, j'évite soigneusement d'aller voir Théo parce que je sais qu'il me convaincrait trop facilement de changer d'avis et de venir à la soirée. 

J'attends impatiemment sa venue toute la matinée du dimanche, pour avoir enfin le compte-rendu en détails. Il arrive finalement en début d'après-midi, et nous filons directement dans ma chambre. Je lui saute presque dessus.

— Alors ??

— Le cinquième, sixième et septième des inscrits d'Hippo étaient... sa sœur, sa mère et son père !

Il sourit et ajoute :

— Il n'est venu qu'avec Célian, Icare et Guillaume. T'es restée toute seule pour rien.

— Merde...

Il me tend une serviette en papier et répond à la question avant que j'aie le temps de la lui poser :

— C'est Icare qui me l'a donnée pour toi. Il était visiblement déçu que tu ne sois pas là. C'est le seul à m'avoir questionné sur ton absence.

— Et tu lui as dit quoi ?

— Ce que tu m'avais dit. Lis, tu vas voir.

Il me sourit à nouveau. Je déplie la serviette.

« Comme t'as l'air de bien aimé rester chez toi..., tu pourrais réfléchir et me dire quelles sont tes 5 chansons préférées. »

— Le fourbe ! Il a carrément souligné les points de suspension ! Par contre, il y a encore une faute. Décidément il est fâché avec la conjugaison !

Théo a toujours le sourire aux lèvres.

— Il te cherche, clairement.

— Il ne perd rien pour attendre. Fais moi passer mon bloc, s'il te plaît.

Théo se lève du lit et me le donne. Je jette immédiatement mes mots dessus, sans réfléchir, pendant qu'il les lit par-dessus mon épaule

— « Il serait bien inutile que je te donne les titres de mes cinq chansons préférées, car en bon inculte que tu es, tu ne les connaîtrais pas ! Sache que tes sarcasmes glissent sur la trajectoire intersidérale de ma spatiale indifférence... »

Il me regarde, visiblement amusé.

— Je te reconnais bien là, Aux !

— Non mais ! Et peut-être que je vais même souligner les points de suspension moi aussi ! Na !

— Il a l'air d'avoir beaucoup d'humour d'après ce que j'ai pu en voir hier soir. Il me tarde de savoir ce qu'il va te répondre !

La réponse arrive en même temps que le désormais habituel range-CDs deux samedis plus tard :

« Oh oh ! On est susceptible à ce que je vois ! Et bien tes belles phrases, tu peux te les faire glisser sur une autre trajectoire (spatiale ?) et là ça m'étonnerait que t'en reste indifférente. Et là, t'hallucine. Comment ai-je pue te dire ça, à toi ? Comment... hein... non, évidemment, je n'oserai pas... oui d'accord... je te fais de si tôt mes plus plates excuses. Allez, souris Aux ! »

Je prends un air offusqué en tendant le petit mot à Théo pour qu'il le lise, mais je ne peux m'empêcher de sourire. De l'humour, de l'audace, et des points de suspension à n'en plus finir. Je suis totalement sous le charme...

Je croi(s) qu'en fait je t'aime...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant