Chapitre 45

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Contre toute attente, je finis par trouver le sommeil, même si je me réveille très tôt le lendemain matin. Je me demande si Icare m'a envoyé d'autres messages pendant la nuit et fonce sur mon téléphone dès que j'ai posé un pied au sol. Je l'allume et attends quelques secondes. Rien. Je suis partagée entre la déception et le soulagement.

J'ai finalement pensé, la veille, qu'il valait mieux que je lui envoie ma réponse tôt ce matin, pour aller dans le sens de l'idée de Théo. J'ai senti que je l'avais irrité hier soir, aussi je prends la décision de ne pas l'ennuyer encore avec mon histoire ce matin. Je commence à taper ma réponse à Icare, je déciderai ensuite en la relisant si je la valide ou pas.

« EXCUSE-MOI J'AI PAS ENTENDU MON TÉLÉPHONE HIER SOIR. C'EST UNE BLAGUE ? »

A la troisième relecture, j'appuie sur envoyer. Ce que je regrette aussitôt, mais il est déjà trop tard, je reçois l'accusé de bonne réception.

Il a donc mon message sur son téléphone. De longues minutes défilent sans que rien ne se passe. Et brusquement, je me mets à la place d'Icare qui, hier soir, a probablement lui aussi attendu en vain ma réponse. Peut-être durant plusieurs heures. Toute la nuit ? A-t-il lui aussi regretté de m'avoir fait cette déclaration ? A-t-il réussi à dormir ensuite ? Qu'a-t-il fait de sa soirée ? A-t-il parlé de tout ça à Eustache ou a-t-il appelé quelqu'un de son ancienne bande ?

La matinée passe sans que ni Icare ni Théo ne se manifestent. Peu avant que je me mette à table, le bip tant espéré se produit. Je bondis littéralement sur mon portable, mais suis presque déçue de voir le nom de Théo apparaître. Il me dit de l'attendre pour manger, il vient se joindre à moi pour parler d'hier soir.

Il arrive moins d'un quart d'heure plus tard, un sachet de cookies frais à la main. Il me le tend avec un air désolé avant de me prendre dans ses bras.

— Tes gâteaux préférés pour me faire pardonner...

— T'es trop mignon, merci, c'est adorable. Mais t'avais pas besoin. Ce serait plutôt à moi de m'excuser, c'est moi qui t'ai coupé hier soir. Tu me racontes ?

— Non, toi d'abord.

— Tu sais déjà tout, je t'ai raconté hier soir au téléphone le peu de choses qu'on s'est dites, Icare et moi.

— Et tu lui as répondu tôt ce matin je parie ?

Nous nous sourions.

— Oui...

— Tu lui as mis quoi ?

— Je lui ai demandé si c'était une blague.

— Très bonne idée, Aux ! Et qu'est-ce qu'il t'a répondu ?

— Rien...

— Ah, zut... Attends, remarque, il réfléchit sûrement lui aussi à la réponse à te faire. Il avait dû essayer de réfléchir à ce que tu allais lui répondre, mais il ne s'était certainement pas attendu à ça. Il a dû être surpris. Rappelle-toi qu'il te trouve imprévisible !

— C'est vrai ! Mais on verra bien. Bon et toi, alors, vas-y, raconte moi, c'est qui ce garçon, je te cite, trop beau et trop sympa ?!

— Il s'appelle Théophane, donc on a le même surnom figure-toi !

Je lui souris.

— C'est bon signe ça.

— Il est en deuxième année de lettres classiques. Il est légèrement plus grand que moi, il a un faux air de Guillaume, châtain avec les cheveux en bataille. On a passé la soirée à discuter, on a échangé nos numéros...

Je le coupe :

— Et tu vas lui envoyer que tu l'aimes !

Il me donne une tape sur le bras.

— Mais non, patate ! Laisse faire le temps un peu !

— Fais gaffe, parce qu'à laisser faire le temps comme tu dis, nous, ça nous a pris cinq ans avec Icare !

Il me sourit.

— C'est mignon comme tu dis nous pour parler de lui et toi.

Je lève les yeux au ciel et rectifie.

— Rien n'est fait...

— Moi non plus !

— Ah, on est doués tous les deux mon Théo, tiens !

Nous passons l'après-midi à comater devant la télévision, épuisés par notre nuit mouvementée. Nous sommes tirés de notre torpeur par la sonnerie de mon portable. C'est la réponse d'Icare.

« EN FAIT EN RENTRANT JE ME SUIS ROULÉ UN GROS PET ' ET J'AI UN TRIP QUE J'AIME BIEN : C'EST FAIRE UN TRUC BIZARRE ET VOIR COMMENT LES GENS RÉAGISS »

Sa réponse m'assoit. Je ne sais pas ce qui me déçoit le plus. Avoir la confirmation qu'il fume des joints ou que tout ça n'ait été qu'un jeu pour lui. Je suis dépitée. Théo ne comprend pas non plus son attitude. Nous restons silencieux sur mon canapé, à nous faire passer mon téléphone pour relire son texto. Quatre minutes plus tard, nouveau bip.

« MAIS C'EST VRAI QUE J'AI UN GROS FAIBLE POUR TOI ET MAINTENANT AVEC DU RECUL ET À JEUN JE REGRETTE DE TE L'AVOIR DIT. »

Je ne sais plus ce que je dois croire ou pas dans ce qu'il dit. Je suis totalement désorientée.

— Alors quoi, c'est vrai ou pas finalement ?

— Ben oui, je crois, Aux. Ta réponse a dû le heurter un peu, et à mon avis il est en train d'essayer de s'en tirer sans avoir l'air trop nul.

— Moi je trouve ça minable. On joue pas avec les sentiments. Il faut que je lui fasse une réponse bien sentie.

Après une bonne heure de débat, je la lui envoie :

« JE NE SAIS PAS À QUOI TU JOUES MAIS ÇA NE M'AMUSE PAS DU TOUT. ARRÊTE DE FUMER ET ON EN REPARLE. OU PAS. »

Sa réponse me réveille en sursaut à minuit quarante exactement alors que Théo est parti depuis bien longtemps.

« OK MERCI. AU MOINS JE SAIS À QUOI M'EN TENIR. MAIS JE TE JURE QUE JE LE PENSAIS. »

Je croi(s) qu'en fait je t'aime...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant