Du moment où je retire ma ceinture et sors de ma voiture, je m'empare de ce masque gênant mais si utile: les apparences. Avec habileté, je joue la fille détendue, pas énervée pour un sous et souriante. J'ouvre la portière de la voiture de Nabil avec autant d'assurance qu'il en faut pour cacher tous ces sentiments négatifs qui m'envahissent. Cela semble marcher puisque Nabil me sourit à pleines dents. Ça fait mal, merde. Je fais pareil feintant ainsi ma tristesse et tordant mon cœur qui me cris de partager ce qu'il ressens avec Nabil. Je n'en ferai rien. D'autant plus que Nabil m'attire directement dans ses bras. Il m'embrasse comme si c'était la première fois, lentement, tendrement. Dans ce profond silence, ce moment hors du temps, je pourrais entendre les aiguilles de ma montre tourner si j'en avais une. Nabil caresse ma joue et s'excuse de ne pas m'avoir contacté en me montrant son portable déchargé. Son chargeur est mort. Ça me rassure un peu, nos petites habitudes elles ne le sont pas, mortes.
Nous prenons la route direction Paris. Sur le trajet Nabil est de bonne humeur. Il me fait rire, je me détends mais j'ai toujours cette sensation de peur. Il ne remarque rien, il faut dire que je masque bien. On arrive dans une petite ruelle dans laquelle nous nous garons. En marchant vers la boutique, Nabil me dit qu'il me trouve très jolie. Je lui retourne le compliment et on se donne des coups d'épaules pour rire. C'est dans cette ambiance de rigolade que nous arrivons dans une boutique qui, dès l'entrée m'a refroidi. Accueil glacial et regards de la vendeuse aussi chaleureux qu'une canette de Coca oubliée au congélateur. Nous avançons. Un vendeur interpelle poliment Nabil. Mon portable sonne, c'est un texto de Saliha. Alors que je lui reponds, je manque de contenir l'envie d'exploser quand la vendeuse me dévisage d'un air dédaigneux et me sors: « Vous désirez peut-être attendre par ici Madame pendant que nous nous occupons de Monsieur». Le « par ici » c'est le coin des coconnes. Un canapé en velours gris avec des magasines de mode posés sur une table en verre sur laquelle le reflet de la colère qui colore mon visage devrait être visible à des kilomètres à la ronde. Nabil qui n'a apparemment pas entendu, est à quelques mètres devant moi. Un « Ça ira, merci » ne suffit pas à la nana qui se permets de me balancer : « N'ayez crainte, nous saurons conseiller monsieur ». Mais elle se prend pour qui elle? Une conseillère pôle emploi? Cette pensée me fait rire intérieurement et Nabil qui par contre a entendu cette dernière phrase, s'approche et dit: « C'est elle qui choisi pour moi ». À cet instant, j'ai eu envie de dire « dans ta face » mais voyons, NOUS avons plus de classe...
Le vendeur comprend vite que nous n'avons pas besoin de lui et s'efface discrètement face au regard mister freeze de la coconne qui me regarde comme si j'allais voler quelque chose. Bien sûr. Évidement je vais dissimuler un costume trois pièces dans mon mini sac à main en osier. C'est évident...Bref, j'aperçois d'autres clients entrer et vois qu'elle leur réserve le même sort donc je zappe et me met à regarder les costumes avec Nabil. Après plusieurs minutes, j'en repère un bleu nuit qui est sublime et Nabil, quand à lui, a flashé sur une chemise à col mao. Le vendeur nous indique les cabines. Il n'y a bien évidemment pas de quoi s'asseoir pour les coconnes si ce n'est une assise à l'intérieur de la cabine qui parait plus grande que ma chambre. Le remarquant Nabil me dit d'un ton naturel: « Viens ». J'entre dans la cabine assez gênée. Je m'assois sur ce qui ressemble à un nuage tant il est doux et moelleux, un banc en velours noir que je verrai très bien au bout de mon lit. Nabil commence à se déshabiller. Je ne sais plus où poser mes yeux et une fois de plus mon portable court à mon secours. Je fais mine de chercher quelque chose dessus. Je vois malgré tout que Nabil en est à la chemise. « T'en penses quoi? » me lance-t-il tout en la réajustant.
- C'est très beau, ça te va très bien, dis-je intimidée.
- Merci. Ça te plaît? demande Nabil sérieusement.
- Oui beaucoup, ça te va vraiment bien, répondis-je toujours autant gênée.
- Merci, si ça te plaît, j'prends.
Alors que je m'apprête à sortir de la cabine avant qu'il ne se change, Nabil me retiens par l'avant-bras et m'attire vers lui. Il me sourit puis se met à me faire des petits bisous sur les joues. Il me pousse jusque contre un des miroirs de ce château de cabine en me faisant des chatouilles . Là, il me fixe dans les yeux et me dit: « T'es encore plus belle quand tu souris ». Je lui caresse les joues et lui pose un baiser sur la bouche. Je sors ensuite de la cabine et l'attends à l'extérieur. Entre temps, la vendeuse a jeté son dévolu et son autoritarisme sur un autre couple dont la femme est assis au coin des coconnes et le mari entre les griffes du diable en Prada. Bizarre comme schéma...Nous n'avons pas tardé. J'aurais aimé que ce soit aussi simple pour le choix de ma robe! Nabil me demande ce que je veux faire. Lui aimerait manger mais il est encore un peu tôt. Je lui dis alors qu'il faut que j'achète de quoi camoufler mon cocard. Nous allons donc dans une parfumerie. Il remarque alors que mes yeux brillent et me dit: « T'es aux anges là ça se voit! ». Je souris. Une vendeuse vient nous proposer de tester un nouveau parfum qu'elle qualifie de «doux et profond, fruité et ensoleillée ». Je ne la contredis pas, ce parfum sent très bon. Je retourne dans ma recherche de l'anticernes dont les filles m'avaient parler chez Samia. Nabil me fait signe qu'il va se chercher un parfum.
Dix minutes plus tard, nous nous retrouvons et nous dirigeons vers la caisse. Il insiste pour payer mon article. Ça me gêne beaucoup mais il est clairement décidé à ne pas me laisser le payer. Je le remercie non sans lui dire que ça m'embarrasse. Il ne veut pas en entendre parler et nous voilà repartis.
Une fois dans la voiture, je me prépare à aborder le sujet de l'hystérique et de l'unique issue de secours dans cette histoire, Mouss. Je ne sais pas par où commencer, j'appréhende sa réaction. Je me lance: « Tu sais j'ai beaucoup réfléchi à propos de l'autre folle...Et notre seule solution, après avoir réfléchi, réfléchi, réfléchi, c'est Mouss...Je sais que tu ne veux pas mais c'est notre seul choix ». Contre toute attente, il réagit plutôt bien. Certes il ne veut pas, mais il ne semble pas énervé: « Je sais qu'il lui mettrait la pression et qu'elle avouerait que c'est faux. Mais, je veux pas mêler Mouss. Tu comprends Ness? ».
- Oui et non. Oui parce que je peux comprendre que ce soit gênant. Et non car c'est tourner le dos à la seule chance de pouvoir trouver la paix, dis-je pensive.
- Laissez-moi moi y réfléchir quelques jours et si d'ici là ça s'est pas arrangé, j'veux bien y penser. Ça te va?
- Ça me va. Mais justes quelques jours, répondis-je doucement.
- Bien sûr, dit-il en me serrant la main puis en l'apportant vers sa bouche pour l'embrasser. Ne stresse pas stp ma Ness. Je te promets que ça ira.
Peut-être a-t-il raison? Peut-être que d'ici là la vérité éclatera? En attendant, je décide de tout envoyer valser et de me sentir bien. Nabil tient moi la main, moi je m'occupe de tenir mon cœur.
VOUS LISEZ
PNL: Je n'attendais rien sauf le destin
FanficMoi, Nessma, 27 ans et une envie grandissante de dévorer le monde. "Le monde ou rien"... Je n'attendais rien de lui mais le destin en a décidé autrement. Une rencontre inattendue un dimanche matin et mon cœur se balade d'imprévus en imprévus...avec...