Dans ma tête, dans mon cou

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J'ai l'impression des au revoir avec la famille lorsque l'on rentre en France après nos vacances au pays. Le cœur serré, les larmes prêtes à couler. Comment est-ce possible qu'une personne entre dans notre tête et notre cœur aussi vite? Je me sens un peu mélancolique. Cela fait plusieurs semaines maintenant qu'on se parle presque tous les jours, qu'on s'apprivoise, qu'on s'apprend, qu'on se découvre. Même si je sais qu'on va se voir d'ici peu, je n'arrive pas à retirer de ma tête ces mauvaises pensées qui m'inquiètent: et s'il rencontrait quelqu'un d'autre là-bas? S'il changeait et ne me calculait plus autant qu'ici? Il part tout de même plus d'un mois... Plusieurs pensées me viennent en tête dont une...

Un jour d'automne. Un beau soleil. Les feuilles orangées se baladent de parcs en ruelles. Je me suis faite belle. Mes cheveux volent au gré du vent. Je me souviens parfaitement de ma tenue et même de mon rouge à lèvres, «Beige poudré ». Je suis descendue du métro une station avant pour pouvoir profiter de ce spectacle enivrant: l'automne à Paris. L'autre est dans les bouchons. Je flâne, nullement agacée par son retard. C'est une belle journée. J'ai une envie de crêpe et me dit qu'on pourrait aller s'en prendre une ou bien aller loucher devant des gaufres dont on ne mangera que la moitié. Je souris. Je suis bien. L'autre revient d'un week end à Barcelone avec ses potes. À cette époque, il était adorable avec moi. Aussi inoffensif qu'une mouche. Il y a bien eu quelques petites disputes mais rien de marquant. Je le retrouve enfin, m'attendant garé et au téléphone. Il me fait signe d'entrer. En attachant ma ceinture, j'entends une voix féminine. Mes sourcils traduisent mon agacement. Il parle de son pote Samy, un crack de l'informatique: « Samy va te réparer ça en un rien de temps! Oui, oui t'inquiète! ». Son rire m'énerve. Le « ok pas de souci à plus tard! » qu'il lui lâche juste après comme si je n'existais pas me fait presque oublier à quel point j'étais bien juste avant pendant ma belle balade automnale. Je regarde par la fenêtre et pour la première fois j'ai envie d'être ailleurs plutôt qu'être avec lui. « Alors ma beauté ça va? ». Mon regard glacial pour réponse, je ne lâcherai pas plus qu'un « pas plus que toi en tout cas » pour l'accompagner. Il m'explique alors que c'est « juste » une fille qui a flashé sur Samy. Ah ouais et pourquoi c'est pas lui qu'elle appelle? Elle est timide et lui aussi, le bon samaritain qu'est l'autre se charge de jouer les cupidons. Et là, reviens comme un boomerang notre dernière embrouille au sujet de mon collègue qui m'avait appelé et ce, uniquement pour le travail. Je lui dis à quel point je trouve ça irrespectueux de me faire des reproches alors qu'il parle ouvertement avec une inconnue. Il commence à parler fort et à rouler plus vite. Je panique et lui demande d'arrêter. Je veux descendre à tout prix, je déteste la vitesse. Il s'arrête sur les quais de Seine et se lance dans un monologue agressif dont je retiens surtout: « Si ça te va pas, y a plein d'hommes et moi plein de femmes tu crois quoi!». Premier coup bas. Je retiens ces grosses larmes qui dégoulinent de mon cœur. Je sors de la voiture. Je m'accroche à ce magnifique automne et prend la main au vent pour m'éloigner rapidement de la voiture. Il n'aura même pas essayé de me retenir. Il m'a laissé partir, seule, les cheveux au vent et le cœur au bord de la Seine. Des appels, messages, « je suis en bas descends stp », fleurs et autres excuses plus tard me feront pardonner mais cette phase m'a depuis alors complètement perturbé.

Qui peut m'affirmer que Nabil ne me fera jamais ça? Qui peut me garantir qu'il ne m'abandonnera pas? Je m'attache donc j'ai peur d'avoir mal. Cette crainte d'avoir laissé mon coeur sourire au sien et qu'il finisse seule broyé au final me hante.

Nabil me dit combien il a hâte que je le rejoigne. Dans dix jours. Je réfléchis déjà à ce que je vais dire à ma famille. Lui ne semble pas réaliser que ça va être compliqué de devoir mentir. Il n'a pas ce problème, il est libre comme l'air. Je le lui explique, il dit que je dramatise et que si je veux dormir tranquille je n'ai qu'à proposer à Samya de venir. Ce qu'il ne sait pas c'est qu'on a déjà discuté elle et moi de cette option. Je ne le dis pas à Nabil bien sûr. Ça fait partie des choses qu'on ne dit jamais. Ça me fait sourire intérieurement. Samya a une très bonne copine qui vit seule à Londres depuis deux ans, elle peut s'y rendre quand elle veut. Ça, par contre, je le lui dis. Il semble ravi car la copine de Londres qu'il ne connaît absolument pas lui sauve en quelque sorte la mise. « Elle lui fera visiter la ville » lache-t-il avec un sourire malicieux.

Je commence à avoir froid et j'ai surtout sommeil. J'ai peu dormi ces derniers jours et le mariage hier était intense physiquement et émotionnellement. Je ne rêve que d'une chose: prendre une douche express chaude, mettre un pyjama bien confortable et dormir sans avoir à appréhender mon réveil. Samia me dit qu'elle est bientôt arrivée. Je ne sais pas pourquoi mais je me sens très seule d'un coup. Je sais qu'une fois rentrée chez moi je me retrouverai avec toutes mes appréhensions et que j'aurais du mal à dormir. J'ai horreur de ça car j'ai l'impression d'être une faible. Ressaisis toi et arrête de faire la flipette! C'est plus fort que moi. L'autre m'a laissé comme souvenirs des séquelles qui m'empêchent d'être sereine.

Nabil me serre contre lui. Il m'embrasse la tête, je serre doucement sa taille. Il descends sa bouche contre ma joue, je ressens comme un petit frisson. L'odeur de son parfum m'attrape, je ferme les yeux.  J'ai peur de ce que je deviens: une fille qui tombe amoureuse. Il sens mon cou et dit: « Hum ton odeur va me manquer... ». Je souris et je m'en fiche, je lui avoue ce que moi aussi et que je pensais exactement à ça. Il rit légèrement et là il enfouie sa tête dans mon cou et lâche: « Attends je prends ma dose ». J'éclate de rire, ça chatouille. Il fait pareil puis commence à m'embrasser le cou. Des baisers lents et doux comme des petits secrets qu'on cache pour que personne n'y touche. Frissons. Je pose ma main sur la sienne qui enveloppe ma nuque. Il recule sa tête et me regarde avec malice. Il sait l'effet qu'il me fait et me dit: « Elle aime ma ptite tête... ». Je ne me dégonfle pas et j'agis pareil. Je vais même jusqu'à mordiller son oreille. Je m'étonne moi-même. Quand je sens ses mains qui pressent mes hanches, j'arrête. Il me tire contre lui pour m'embrasser fougueusement. Il est en mode lion. Du calme Tarzan, Jane rentrer maison!

PNL: Je n'attendais rien sauf le destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant