Craquer

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Je m'attendais à ce qu'il soit agacé ou au minimum un peu froid. Au lieu de ça, il est là, souriant, calme et prévenant: « Entre vite, tu vas attraper froid ». Première pensée: je regrette déjà ma réaction de tout à l'heure. Deuxième pensée: je suis une bouffonne. Troisième pensée: je sens que la première pensée va vite se concrétiser...

J'entre dans la voiture, embarrassée comme si j'avais accusée un innocent. Je bégaye: « Merci d'être venu me chercher...J'étais pas seule en voiture du coup comme je t'ai dit... ».

- Pas de souci. Oui je sais tu m'as dit, dit-il toujours aussi calme.

Un blanc vient s'installer dans la voiture avec nous. Je dirai même qu'il prend même ma place car je suis muette comme une carpe. Nous arrivons face à un feu rouge. Je ne sais plus où me mettre. J'ai envie de partir en courant. Nabil semble le ressentir car c'est lui qui vient chasser ce silence de plus en plus pesant: « Pas trop fatiguée après le mariage? »

- Carrément fatiguée, souriais-je timidement.

- C'est normal tu t'es déchaînée sur la piste de danse, dit-il en riant doucement.

J'esquisse un sourire. Il fait de même et enchaîne: « Vous avez dû rentrer tard ».

- Hyper tard, vers 5h.

- Ah oui en effet, dit-il en haussant les sourcils. Tu veux qu'on fasse quoi? On va se poser tranquille à la maison?

- Oui avec plaisir...

Il me sourit d'une façon affectueuse. Son visage est serein. Comment peut-il être aussi gentil avec moi après mon attitude froide et mon excuse improbable de tout à l'heure. Il allume l'autoradio. C'est un album que nous avons souvent l'habitude d'écouter ensemble. Il monte un peu le son, puis prends ma main pour la poser sur la boîte de vitesse et ajouter la sienne par dessus. Nous passons tout le trajet comme ça.

« Ness, Ness. On est arrivé ». L'accumulation de toute la fatigue de ces derniers jours m'a fait m'endormir sans même que je ne m'en rende compte. Nabil me réveille en me caressant la joue avec son pouce. Je me redresse. J'ai mal partout. Bien que je les ai troqué pour des sandales plates, mes talons d'hier m'ont laissé des douleurs qui me lancent encore et j'ai également mal au dos du coup.
On veut être belle et élégante et on finit en boitant. Nabil le remarque et me demande ce que j'ai. Je me sens débile de lui dire que c'est une paire d'escarpins qui a pris le dessus sur moi. Il me tend son bras. Je m'humilie avec un peu de poésie:« On dit qu'il faut souffrir pour être belle... ».

- Ah je vois, dit-il en se moquant de moi. Mais en même temps pourquoi autant de souffrance, t'as pas besoin de talons pour être belle.

Je me contente d'un sourire niais pour réponse. Nous arrivons chez lui. J'aime tellement l'odeur de son appartement. Il sent lui. Il me dit d'aller  m'asseoir sur le canapé tandis qu'il va dans la cuisine. Même enlever mes chaussures est une épreuve. Je me tortille pour les retirer vite avant qu'il ne revienne et me voit en galère. Quel soulagement! Mes pieds respirent à nouveau.
Je boite jusqu'au canapé en vitesse.

Il revient avec des boissons et un bocal avec toutes sortes de chocolats. Il s'assoit près de moi. Quelque chose vient de lui revenir puisqu'il me dit «attends j'arrive » et se lève. Je parcours la pièce du regard. Sur un meuble à côté de la télévision, je vois tout un tas de fils de type usb etc. Nabil réapparaît dans le salon. Il me tend un chargeur dont un des embouts est très abîmé. Il me lance: « Mon frère est parti en prenant le mien. Celui qu'on a acheté ensemble. Et celui-là comme tu vois il est mort ». Le mot « honte » n'est pas assez fort pour exprimer le sentiment que j'éprouve à ce moment là. J'ai envie de me cacher dans un trou. Depuis le début il savait que je le soupçonnais de m'esquiver. Je n'arrive pas à sortir un mot de ma bouche. Ma gorge est nouée. J'ai l'impression de m'être humiliée comme une gamine. Contre toute attente, au lieu d'être cash comme me l'a conseillé Samia, une larme vient perler sur mon visage. Je me sens mal, idiote.

Nabil est dépassé par ma réaction. Il devait s'attendre à tout sauf à ça. Il me demande pourquoi je pleure en m'attirant dans ses bras. Ce geste si tendre me fait exploser en sanglots. Ce mec va me prendre pour une folle. Aucun son ne peut sortir de ma bouche. Je ne peux pas parler. Je cache mon visage dans son cou. Autant dans la voiture le silence était lourd, autant à cet instant il m'est indispensable. Les cris, le bruit, le vacarme j'ai connu. Je ne peux plus. Nabil respecte ce silence, il pose sa tête contre la mienne.

Nous restons comme cela plusieurs minutes. Je sens que mon maquillage coule, je me détache de son cou.  « Il faut que je me rince le visage » balbutiais-je en regardant vers le bas. « Oui oui vas-y tu connais l'appartement ». Sa voix est rassurante. Je me dirige vers la salle de bain. Mon visage est marqué par de toutes petites rivières noires de mascaras. Heureusement que je m'étais peu maquillée. Je me lave le visage. L'eau fraîche me fait énormément de bien surtout à mes yeux gonflés par les larmes.  J'entends les pas de Nabil qui me demande si tout va bien. Je sors de là et le vois posté devant la porte. Je le prends par les mains et l'attire en reculant vers sa chambre qui est juste à côté. Je m'assieds sur le lit, l'entraînant par la main à faire de même. Le ras-le-bol de paranoïa s'entremêlent à l'épuisement et au soulagement qu'il ait une raison valable de ne pas m'avoir contacté et me fait faire quelque chose que je fais rarement, prendre les devants. Je caresse son visage et je l'embrasse fougueusement. Il n'avait pas encore enlevé ses chaussures. Il le fait quand je le tire vers moi en m'allongeant sur le lit. Au-dessus de moi d'abord, je le retourne pour le mettre sur le dos tout en l'embrassant. Nos lèvres ne se quittent pas, comme aimantées, elles suivent nos mouvements.

Nabil ne sait où poser ses mains. Je les luis prends et les pose sur mes hanches. Il me serre fort contre lui. Il se redresse et retire son pull. Même si cela me stresse car j'ai peur qu'il pense que nous irons plus loin, je me replace contre lui. Nos langues s'effleurent. J'oublie tout. Le portable de Nabil vibre dans sa poche. Il le retire puis le jette sur le côté. Là il me susurre délicatement: « Tu restes passer la nuit avec moi...».

PNL: Je n'attendais rien sauf le destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant