Je les regardai quitter la pièce puis rejoignis Lily sur la terrasse. Cette dernière, concentrée, fixait le ciel de ses prunelles sombres. Celui-ci s'était voilé d'un impressionnant et épais nuage noir.
— Lily ? appelai-je sur un ton hésitant. Cela fait plusieurs jours que j'essaye d'appeler Faïz, mais il ne m'a jamais recontactée. Je suis passée à son appartement, mais sans succès aussi. J'ai besoin de le voir avant qu'il ne reparte samedi.
Lily détourna les yeux du Dôme pour les poser sur moi. Voyait-elle mon angoisse et ma culpabilité qui me rongeait depuis des jours ? Quoi qu'il en soit, son regard d'une infime douceur se voulait rassurant.
— Nous ne l'avons pas beaucoup vu non plus. Une antenne de Trac-Word est située juste à l'entrée de la ville. Il jongle entre son travail et ses entrevues avec le FBI. Je te jure, Zoé, il n'arrête pas une seconde en ce moment. Je ne sais même pas s'il trouve le temps de dormir un peu.
Lily posa ses mains sur mes épaules et ajouta d'une voix délicate et légère :
— À ta place, je lui écrirais une lettre au cas où je ne serais pas amenée à le revoir.
Je hochai la tête en me mordant la lèvre, préoccupée par ce scénario qui paraissait le plus plausible.
Avant que je ne quitte la villa, Lily me demanda d'attendre une minute dans le séjour. Elle alla chercher un bloc de post-it dans le tiroir de la commode et griffonna quelque chose dessus avant de me tendre le bout de papier.
— C'est le numéro d'urgence de Faïz. Je ne devrais pas te le donner, mais je ne supporte pas de te voir ainsi. C'est la seule chose que je puisse faire.
— Merci, dis-je à voix basse en la prenant dans mes bras, consciente de tout ce que je lui devais depuis ces cinq dernières années.
Sur le chemin du cimetière, je m'efforçai de tenir en bride mon impatience à appuyer sur le bouton d'appel du numéro de Faïz que j'avais composé. Peut-être devrais-je écouter le conseil de Lily ? Celui de lui écrire une simple lettre ? Cette solution était la plus simple. En effet, lui adresser mes excuses en couchant quelques mots sur du papier m'éviterait de le revoir une dernière fois avant son départ. Je détestais quand ma raison se battait avec mes sentiments. Deux Zoé, qui n'arrivaient pas à se mettre d'accord, étaient en train de mener un combat acharné dans ma tête.
Je ralentis à la vue d'un panneau de signalisation qui indiquait une déviation. Un homme de petite taille et relativement menu était posté juste à côté.
— Y a-t-il des travaux sur la route principale ? demandai-je après m'être arrêtée à sa hauteur.
L'homme se contenta de hocher la tête. Bien que la capuche de son imperméable lui couvrît une bonne partie du visage, je réussis à croiser son regard. J'eus alors un mouvement de recul devant la noirceur infinie de ses yeux. Quelque chose de féroce émanait de lui. Instinctivement, je me dépêchai de remonter ma vitre et m'engageai sur le petit chemin qui me rallongeait de plusieurs minutes.
La route, bordée d'arbres géants dont les feuilles s'agitaient dans le vent, était quasi déserte. Je tentai tant bien que mal de chasser le regard inquiétant de l'homme que je venais de croiser en me concentrant sur ma conduite ainsi que sur la chanson qui passait actuellement à la radio. C'est alors qu'en jetant un regard dans mon rétroviseur, je vis soudain une immense nuée noire qui paraissait me poursuivre. Je me retournai rapidement pour constater que le champ de vision au loin, s'assombrissait brusquement. Ce n'est rien, c'est juste un phénomène météorologique, c'est tout ! Tandis que j'essayais de me convaincre moi-même, une poussée d'adrénaline me poussa à enfoncer la pédale de ma berline afin d'accélérer. Mon pouls se mit à s'affoler lorsque je réalisais que les gros nuages, aux formes variées, me rattrapaient. Le panneau de déviation avait été mis exprès à cet endroit pour m'obliger à emprunter ce chemin. J'étais tombée dans un piège ! Au moment où ma main fouillait maladroitement dans mon sac, à la recherche de mon téléphone, un amas de sombres brouillards s'abattit tout autour de l'habitacle de mon véhicule, accompagné de violentes bourrasques, m'empêchant de voir la route. Le visage de Georgia m'apparut à cet instant, juste avant que je ne perde le contrôle de ma voiture et qu'elle ne parte en tonneaux. Le bruit assourdissant du choc de la tôle contre le béton résonna jusque dans ma poitrine. Ma tête cogna violemment une première fois le volant puis une seconde fois contre la vitre. Je sentis une pression énorme me broyer ma cage thoracique, me coupant le souffle instantanément. C'est au bout de quelques secondes interminables que mon véhicule finit sa course, renversé sur le toit, au bord de la chaussée, de l'autre côté de la voie.
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Dark Faïz -T 3
ParanormalLes cinq dernières années n'ont pas épargné Zoé. Noyée dans un profond vague à l'âme duquel elle éprouve des difficultés à sortir, le retour de Faïz dans sa vie n'arrange pas les choses. L'amertume et la rancœur vis-à-vis de cet homme qui l'a trahie...