Chapitre 10.3-RAY

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Après plusieurs minutes de récit, Faïz se tut pour laisser les deux protagonistes réfléchir sur l'histoire qu'il venait de leur raconter. David et Ray, figés, abasourdis, avaient du mal à trouver leurs mots.

— T'a-t-il confié la raison pour laquelle il a renoncé à ses ailes ? demanda Ray, le regard dans le vide.

— Non et je doute qu'il nous le dise un jour.

— Et moi qui pensais que nous en avions fini avec les créatures légendaires et célestes, soupira David décontenancé. Maintenant, il faut que les anges s'invitent sur Terre.

— Notre ville ne s'appelle pas « La Cité des Anges » pour rien.

Il perçut dans la voix de Faïz une note ironique qui irrita Ray.

— Pourtant, tout le monde commence à se confiner dans les stades ou les autres lieux publics. Je ne vois personne, là-haut, venir à notre aide. C'est vrai, qui est là pour nous ?

— À ma plus grande surprise, la population coopère et reste disciplinée. Le gouvernement a renforcé les mesures de sécurité à l'intérieur des sites avec des militaires qui gardent les lieux vingt-quatre heures sur vingt-quatre, mais aussi dans les rues et autour de la maison blanche. L'armée est partout.

— J'imagine que le président a été évacué !

— Oui, en plus des agents de sécurité du président, une dizaine de Léviathans se sont occupés de son extra filiation. Ils veillent sur lui et sa famille. Nous sommes tous convoqués au centre opérationnel d'urgence dans une heure. Barthey et les autres nous attendent.

— Les Léviathans, répéta lentement Ray sur un ton mauvais. Les héros de ce monde.

Faïz considéra longuement le visage crispé du jeune homme avant de déclarer :

— Tu sais bien que si je pouvais changer les choses, je le ferais sur-le-champ !

David se sentit d'un coup de trop dans cette discussion qui devenait, au fil des minutes, un peu trop scabreuse pour lui. D'un coup, l'atmosphère sembla manquer d'air et il se demanda comment quitter les lieux sans se faire remarquer. Ray ferma ses paupières et prit une longue et profonde inspiration sans les rouvrir.

— Tu peux changer les choses ! Imagine l'inverse. Imagine que c'est moi qui devrais ôter la vie de Zoé, dit-il, les traits déformés par la rage en ouvrant de nouveau les yeux.

À cet instant, une expression horrifiée s'étala sur le visage de Faïz.

— Ce n'est pas la même chose ! rugit le jeune homme d'une voix que la fureur rendait méconnaissable.

Ray s'approcha à grands pas de son rival et d'une main, attrapa le col de son tee-shirt. Avec toute sa force, il le décala du plan de travail pour le plaquer contre le mur. Faïz, bien que plus fort que lui, se laissa faire. David se leva pour intervenir, mais se ravisa aussitôt, préférant laisser les deux individus s'expliquer avec fureur et violence.

— Ce n'est pas la même chose ? Ce n'est pas la même chose ? hurla Ray, furieux. Tu vas tuer la femme que j'aime, espèce d'ordure ! Ainsi que Lexy !

— Tu le sais depuis le début ! Le Callis l'avait prédit. Cette fin est inévitable. La Banshee sur Éros...

— Je me fous du Callis ! Je me fous de l'apparition de ta Bunshee ! cria Ray, les yeux hors de leurs orbites. Tu dois changer les choses. Je ne te laisserai pas me l'enlever !

Faïz se dégagea sans problème de l'emprise du jeune homme, le regard plus sombre que jamais.

— J'ai essayé Ray. Je suis parti loin d'ici. J'ai voulu tout oublier pour te permettre de vivre ta meilleure vie avec Asarys au détriment de la mienne. Mais que veux-tu que je fasse ? Le monde ou Asarys ? Asarys ou Georgia ? Le choix est déjà fait ! Je ne reculerai pas cette fois.

— Elle te maudira, murmura Ray, brisé. Zoé te détestera tout comme moi, jusqu'à la fin de ses jours.

— C'est le risque, mais cette fois-ci, je resterai, même si dois affronter sa haine et sa rancune jusqu'à la fin de ma vie. Je passerai chaque seconde de mon existence à réparer ce que j'ai détruit et ça vaut aussi pour toi, mon frère.

— Sors de chez moi ! rugit Ray, en se reculant.

La tête penchée, ses mains crispées tenaient avec force les rebords du plan de travail.

Quand la porte claqua, Ray pivota vers David qui se tenait debout au milieu du séjour, le regard tourné vers l'entrée.

— Faïz ne me dira pas où se trouve le tombeau du Maestro. Par contre, il te le dira à toi.

David posa les yeux sur le jeune homme visiblement éprouvé par sa récente altercation. Ses yeux bleus, d'habitude presque translucides, étaient désormais fanés par l'inquiétude et la tristesse avec laquelle il vivait.

— Moi ? Faïz ne fait confiance à personne. Jamais il...

— Crois-moi, le coupa Ray. Il a plus besoin de toi que tu le penses. Quand tu auras toutes les informations exactes, fais-le-moi savoir. Je sauverai Asarys et Lexy quoiqu'il m'en coûte. Je peux compter sur toi ?

David déglutit. Devant la terreur qui se reflétait dans le regard de Ray, ce dernier n'eut d'autres choix que de le réconforter avec un hochement de tête. Il lui devait bien ces quelques heures, ces quelques jours d'apaisement, après tout ce qu'ils avaient partagé ensemble ces dernières années.

— Merci, David. Je vais finir de me préparer et nous irons ensuite rejoindre tout le monde au centre d'affaires pour suivre l'évolution de la situation.

David suivit Ray du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse du séjour. Déboussolé, il s'appuya contre le mur derrière lui, et ferma les yeux de toutes ses forces, le souffle court. Sa poitrine le brûlait. À cet instant, il aurait voulu hurler, mais les mains invisibles de Faïz lui serraient toujours autant le cou. C'était trop tard. Trop tard pour les filles. L'esprit torturé, il resta figé dans cette pièce silencieuse, chargé de son lourd fardeau.



Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant