Chapitre 9.7

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Quand je réapparus dans le salon, mon ami s'affairait dans la cuisine à ranger la vaisselle propre à sa place. Je m'avançai vers lui et l'embrassai sur la joue avant de piquer des tapas à même le plat. Il m'adressa un sourire radieux, tellement contagieux que je me sentis aussitôt bien.

— C'est tellement bon de te revoir, lui confiai-je sans le lâcher du regard.

— Voyons, Zoé. Tu sais bien que je serais toujours là pour toi et Georgia. Je ne compte pas quitter la ville.

Mon sourire s'évanouit, je baissai les yeux.

— Pourtant tu devrais. L.A n'est plus très sûre. Le gouvernement annoncera dans les prochaines heures des mesures de confinement pour les jours à venir. Ils invoqueront comme raison le risque épidémique même si, en réalité, il ne s'agit pas que de ça. Cette fois-ci, ça devient très sérieux, tant sur le plan national qu'international.

Elijah se montra soudain particulièrement inquiet.

— La véritable menace pour l'Homme ce sont les virus. Ils déciment tout sur leur passage. Espérons qu'à la fin, nous découvrions qu'il ne s'agissait en fait que d'une grippe saisonnière.

— Une pandémie grippale requiert une action bien spécifique. Il s'agit-là d'un nouveau virus contre lequel les défenses de la population sont faibles ou nulles.

— Et pour l'armée montée par le Maestro ? Vos Léviathans et Sylphes peuvent-ils faire quelque chose ? C'est le moment de montrer que ce ne sont pas des charlatans comme le prétend Condor.

Je levai les yeux au ciel et repris des tapas.

— Ton Condor a-t-il un plan, lui, pour nous sortir d'affaire ? ironisai-je.

Une expression angoissée assombrit son visage.

— Oui, toujours le même, mais je ne l'approuve pas ! Lui aussi, c'est un charlatan.

Je l'interrogeai du regard, curieuse d'entendre son avis sur le sujet. Au moment où ce dernier allait ouvrir la bouche, le bruit de pas dans les escaliers l'interrompit.

Arrivé en bas, Faïz s'avança vers moi, les traits sérieux et impeccables. Une serviette de bain reposait sur ses épaules.

— Georgia t'attend, m'indiqua-t-il.

Soucieuse, je tournai ma tête vers Elijah qui devina aussitôt mes pensées.

— Oui, je reste cette nuit. Je n'ai pas le courage de dormir dehors avec cette tempête. À demain, je monte me coucher.

Elijah nous salua d'un geste de la main tout en se forçant à garder une attitude pondérée à l'égard de son rival puis s'en alla.

Seuls dans la pièce, Faïz me détailla de la tête aux pieds, un léger rictus aux coins des lèvres.

— Quoi ? m'exclamai-je, suspicieuse, en levant un sourcil.

— Je crois que c'est la première fois que je te vois en pyjama, déclara-t-il sans se départir de son sourire.

— Vous pensiez peut-être me trouver en robe de soirée, monsieur Mattew ?

Un rire franc et clair s'échappa de lui.

— Non plus ! J'aime beaucoup quand tu relèves tes cheveux ainsi.

— C'est l'élastique de Georgia, répondis-je d'un air amusé.

— J'avais reconnu cette grosse fleur avec son pistil rouge au milieu. Elle l'adore, celui-ci.

Il s'approcha de moi et sa main chaude et douce caressa délicatement ma joue. Je forçai à cet instant mon cerveau à fonctionner normalement. Le souffle coupé, j'avais du mal à rassembler tous mes esprits. Ses yeux scrutèrent mes lèvres avant de venir se vriller dans les miens.

— Dépêche-toi d'aller voir Georgia, murmura-t-il d'un ton presque autoritaire. J'ai une faim de loup.

Ses paroles à double sens lui arrachèrent de nouveau un sourire irrésistible. La gorge contractée, j'arrivai à peine à respirer et ce fut avec un effort monstrueux que je réussis à m'extirper de son emprise attractive.

Dans la chambre silencieuse, je n'entendais que les pages du livre se tourner. Elijah, aux côtés de Georgia, paraissait tout aussi calme et observait, lui aussi, sans prononcer un mot, les images de l'histoire sous ses yeux. Afin de prévenir de ma présence, je frappai deux petits coups sur la porte. Georgia sursauta de surprise.

— Que regardez-vous ? demandai-je à voix basse pour ne pas troubler ce moment paisible.

— Nous lisions le vaillant petit tailleur des frères Grimm, répondit Elijah qui se leva difficilement en refermant le livre.

— Vous lisiez ? répétai-je, étonnée.

En effet, je n'avais entendu personne conter une histoire.

— Ce soir, c'est Condor qui nous a fait la lecture.

Mon ami soupira avant de grommeler :

— D'ailleurs, ce n'était pas glorieux. Je fais les voix beaucoup mieux que lui ! N'est-ce pas, princesse ?

— C'est toi le meilleur, oncle Eli, affirma ma fille en hochant activement la tête.

— Je rêve, murmurai-je en levant les yeux au ciel.

Georgia souriait sans oser contredire son fidèle compagnon, attendant le doux câlin que celui-ci s'empressa de lui faire avant de se diriger vers la porte de la chambre.

— Je suis là si jamais ça se passe mal avec le méchant monsieur, chuchota Elijah en arrivant à ma hauteur.

Le sourire aux lèvres, je le suivis des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse de la pièce. Il avait un épouvantable caractère, mais il nous chérissait, ma fille et moi, plus que tout. Rien ne pouvait enlever l'immense affection que j'éprouvais pour lui.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant