Chapitre 11.6

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Nous reprîmes la route sans tarder. Elijah, assis à côté de moi, restait silencieux. Le regard tourné vers la fenêtre, il s'abimait dans la contemplation de cette vue apocalyptique. Il faisait nuit, mais l'accumulation de l'électricité statique créée par les tirs de lasers pour détruire le Dôme fabriquait un plasma au-dessus de la ville qui se chargeait d'éclairs et de tonnerre.

— Ce n'est pas à ce moment que vos Sylphes interviennent pour contrôler et protéger le flux de la nature ? demanda Elijah, indigné.

— Ils sont en ce moment en train de maîtriser le courant de l'océan au large de l'Arctique, répondis-je, les yeux rivés sur la route, les pensées lourdes.

— Bon, tu peux nous dire pourquoi Faïz a besoin de toi ? demanda Lexy.

— Oui, nous aimerions bien le savoir ! renchérit Asarys.

Elijah soupira profondément.

— Je ne le sais pas moi-même, mais je veux sauver Georgia.

Lexy insista :

— Faïz n'implique jamais personne dans ses missions et encore moins quelqu'un d'ordinaire avec qui il n'a aucune communication.

Elijah se renfrogna :

— Être quelqu'un d'ordinaire me convient. J'étais très bien dans mon coin avant de tous vous rencontrer, vous et votre bande d'illuminés de fées et de super héros.

— Tu parles à ton pote invisible, lui rappela Lexy qui cherchait encore la confrontation avec mon ami.

— Condor, c'est son ami imaginaire ? Comme ces enfants en manque d'affection ou de sécurité qui se créent un personnage ? essaya de comprendre Masha.

— Condor existe ! s'énerva Elijah. Je ne sais même pas pourquoi je parle avec vous. Ma Georgia vous clouerait le bec si elle vous entendait parler comme ça de lui.

À l'entrée du parc national de Santa Monica Mountains, je ralentis ma conduite avant de m'arrêter sur le bord de la route.

— Masha, guide-moi jusqu'à l'habitation de ton père.

— C'est qui son père ? demanda mon ami, intrigué.

— C'est Pavel. Le Maestro a choisi son corps pour s'y incarner sur Terre, répondit Asarys à ma place, installée au fond de son siège, les bras croisés.

Elijah tourna lentement sa tête vers moi, attendant que je confirme ses dires.

— C'est la vérité.

Il ferma les yeux et secoua la tête.

— Je ne pourrai rien faire contre le Maestro. Faïz a tort, je ne suis pas assez fort.

Cet homme solide, ce rock, sembla soudain exprimer un renoncement dont le sens m'échappait.

J'ouvris ma bouche pour le rassurer, mais aucun son ne vint. Jamais je n'aurais voulu mettre mon ami en danger. Ce n'était pas mon but. En aucun cas il ne devrait se battre aux côtés de Faïz, non ! Seul un Léviathan pouvait se mesurer à un être doté de pouvoirs maléfiques, et encore. Qu'est-ce qui pouvait bien éradiquer le mal sur Terre ? Masha brisa ce silence de plomb qui régnait à l'intérieur du véhicule :

— Vous nous laisserez, Elijah et moi, à l'entrée de la demeure de Pavel.

— Hors de question ! objectai-je en lui lançant un regard mauvais. Je viens avec vous.

— Moi aussi, affirma Asarys.

— Je vous suis, ajouta Lexy.

Masha, interloquée, se ressaisit :

— Faïz ne veut pas...

— Faïz se doute très bien que je ne vais pas rentrer chez moi faire une partie de carte, la coupai-je sèchement. Ma fille est sûrement là-bas, morte de peur.

La tonalité de ma voix à la fin de ma phrase s'envola presque dans un murmure.

— Mais toi, tu peux rentrer. Personne ne t'oblige à rester, intervint Asarys en lui adressant un regard plein de mépris.

Masha ne trouva aucun soutien sur nos visages. En position de faiblesse, elle acquiesça de mauvaise grâce, puis ajouta d'une voix abattue :

— À la prochaine intersection, il faudra tourner à droite. La route n'est pas conseillée pour ce genre de voiture. J'espère qu'elle tiendra le coup.

Je tournai la clef de contact et démarrai. La nuit absorba la Mustang qui s'enfonça à travers les rideaux d'arbres.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant