Chapitre 15.1

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J'ouvris les fenêtres qui donnaient sur une forêt de palmiers, d'Encenillos et d'Orchidées. Dans les fontaines, en bas, des fleurs Victoria d'Amazonie flottaient sur l'eau, jouant avec les couleurs du jardin de ce patio aux nuances éblouissantes. De l'autre côté des murs, resonnait déjà, en ce début de matinée, la cumbia : la musique colombienne. Le vieux quartier de Carthagène ne dormait jamais. L'animation y était constante. Après les tambours, les cuatros et les chants de cette nuit, c'était au tour des étals de petits marchands d'investir les rues du quartier. Même si je ne voyais pas l'agitation qui se déroulait au-delà de l'enceinte, je pouvais l'entendre.

Je fermai les yeux et inspirai profondément cet air chargé de saveurs, mélangé à une douce brise marine. C'est alors que je sentis des mains glisser le long de mes hanches avant de m'enlacer tendrement la taille.

— Pardonne-moi d'avoir raté ton réveil, me souffla Faïz à l'oreille.

Mes mains caressèrent les siennes et ma tête vint se poser contre lui.

— Ces deux derniers jours sans toi ont été longs, déclarai-je d'une voix à peine audible en continuant d'admirer la vue sur le jardin.

— Pour moi aussi. Le vol s'est bien passé ?

Ses lèvres frôlèrent mon cou, provoquant en moi de légers frissons. Je réussis à ne pas perdre mes esprits et me retournai pour admirer son visage si parfait. Son arrogance habituelle était teintée d'une réserve que je ne lui connaissais pas. Je fronçai les sourcils.

— Oui, nous avons atterri dans la soirée et l'équipe nous a tout de suite emmenées à l'hôtel. Qu'y avait-il de si important à Séfiros pour que tu ne fasses pas le voyage avec nous ?

Faïz détourna son regard un peu trop vite et regarda maintenant au-dessus de mon épaule. Je l'avais perdu, une fois de plus.

— Rien, juste un petit souci à régler. Où sont Lexy et Asarys ?

— Parties prendre le petit déjeuner.

Sa main douce et chaude caressa mon visage. Bien que son regard fût revenu sur moi, je voyais que son esprit était ailleurs.

— Donne-moi les dernières nouvelles de Georgia, demanda-t-il soudainement comme s'il revenait à la réalité.

— Elle va mieux ce matin. La séparation n'a pas été facile. C'est la première fois que je pars plusieurs jours. Ta mère et ton père resteront chez moi le temps que les travaux à la villa soient terminés. Elijah reste près d'elle jusqu'à la fin de la mission, puis il retourna auprès de son peuple, les Queyums.

Le son de ma voix trahissait une profonde tristesse. Je haussai les épaules et me forçai à sourire.

— Heureusement que je suis bien entourée. Lui dire au revoir sera plus facile et je sais que les filles ne manqueront pas de me changer les idées. Elles sont si importantes pour moi.

Faïz se recula brutalement. Ses avant-bras se contractèrent. Il paraissait lutter contre un mal invisible.

— Qu'est-ce qui se passe ? demandai-je, effrayée par son soudain changement de comportement.

— Rien, murmura-t-il comme si le souffle lui manquait.

— C'est ce que j'ai dit qui t'a blessé ? Enfin, j'ai précisé que j'étais bien entourée. Je parlais de toi, de ta famille, de tout le monde, essayai-je de m'expliquer sur mes dernières paroles.

— Je sais ! trancha Faïz. Ce n'est pas ça.

Devant mon regard désespéré, il reprit, avec la plus grande difficulté, une attitude pondérée.

— Pardonne-moi. Je manque de repos. Tous ces évènements... Séfiros et le vol... Tu parles comme si la mission était déjà finie, mais c'est loin d'être le cas. Athanase n'est toujours pas dans son tombeau. Personne ne peut dire de quoi sera fait demain, pas même moi.

— Oui, je sais bien, mais nous revenons tous de loin, déclarai-je la gorge serrée. J'ai juste besoin d'une pause. C'est tout.

Je cherchai mes mots, mais le regard dur de l'homme devant moi me déstabilisait.

— Offre-moi juste une parenthèse, murmurai-je presque désespérée.

Les traits de Faïz se relâchèrent. Sa colère et son inquiétude disparurent instantanément. Les remords se lisaient maintenant dans ses yeux. Il s'avança vers moi et prit mon visage entre ses mains. Même si je lisais en lui tous les sentiments les plus purs qu'il avait pour moi au fond de ses prunelles si noires, je savais que son cœur renfermait un tout autre sentiment, enfoui, qu'il n'osait m'avouer.

— Es-tu sûr qu'il n'y a que moi dans ta vie ? N'as-tu rien à me dire ?

Une foule d'émotions impétueuses traversa ses traits.

— Ne doute jamais de ça, Zoé. Jamais !

Ses lèvres vinrent se mouler délicatement sur les miennes avant de continuer dans un baiser passionné. Il me souleva et j'enroulai mes jambes autour de sa taille.

— OK pour la parenthèse, déclara Faïz d'une voix suave avec un sourire authentique. Je vais te consacrer une journée entière. Moi aussi j'ai besoin de me retrouver avec toi.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant