Dark Faïz -T 3

Chapitre 8.6

Lexy me fixait, le regard brillant. Les traits de son visage se modifièrent. Son adoration et sa dévotion à l'égard de mon collègue de travail ne purent m'échapper. Je levai une main devant moi afin qu'elle me laisse la parole.

— OK, je me réjouirai pour toi un autre jour, lorsque le monde ne sera plus en danger et que nous serons certains qu'aucune bombe ne nous tombera sur la figure, car tu vois Lexy, normalement c'est ce qui est prévu, hein. En attendant, explique-moi pourquoi tu n'as pas essayé de renverser la situation en notre faveur ?

— J'ai essayé ! Mais j'ai compris que cet article, son travail, pouvait aussi nous être utile.

Intriguée par ce commentaire sibyllin, je l'interrogeai du regard.

— Zoé, il voit le monde tel qu'il est réellement. Je t'assure. La presse a un pouvoir énorme sur la société actuelle, tu ne peux pas le nier. Le fait que la population sache que le gouvernement cache quelque chose de grave évitera des manœuvres malencontreuses de sa part. Ça l'obligera à être deux fois plus prudent sur ses décisions et à répondre de ses actes s'il décidait de sacrifier des vies humaines.

Sa voix se brisa sur le mot « sacrifier ». Je jetai un rapide coup d'œil à David qui paraissait lui aussi agacé par les propos de Lexy. Je préférai me retrancher dans le silence avant de dire des méchancetés que je pourrais regretter plus tard. Asarys choisit ce moment pour appuyer les dires de notre amie.

— Je sais que l'article de Jul te met, ainsi que nous, dans une situation inconfortable, mais essaye juste de voir les choses autrement.

— Comment, par exemple ? aboyai-je, agacée par toute cette histoire.

— C'est notre atout. C'est un moyen de pression au cas où le gouvernement voudrait se servir de la population comme bouclier. Tu es bien placée pour savoir que nous ne sommes que des pièces sur un échiquier pour lui.

Je posai mes coudes sur la table et joignis mes deux mains. Une vague d'inquiétude m'envahit.

— Je crains que cette Une soit une mise à mort pour Jul. Pensez-vous vraiment que le FBI ou la CIA vont le laisser écrire tout ce qu'il veut, ou tout ce qu'il sait, sans intervenir ? Réveillez-vous ! Nous ne jouons pas, là.

Je plantai mes yeux dans ceux de Lexy, mais cette dernière refusait de soutenir mon regard. Ce sentiment de colère ne me quittait pas, et pour cause : c'était plus facile à contrôler pour moi que la peur. J'avais passé tellement d'heures en sa présence...

— D'ailleurs, continuai-je à l'encontre de mon amie. Que sait Jul exactement ? Que lui as-tu dit ?

Un silence plein d'attentes s'abattit à cet instant à notre table. Le visage paniqué de Lexy prit une teinte rose vif. Une sensation d'horreur m'étreignit subitement.

— Non, tu lui as tout dit... Il sait tout, c'est ça ?

— Il sait tout ! Et c'est mieux ainsi, me confirma Lexy. Il sait pour le Maestro, la légende, Faïz, toi...

— Stop ! criai-je avant de tenir ma tête entre mes mains.

Ses paroles furent bien plus difficiles à entendre qu'elles n'auraient dû l'être. Je relevai ma tête avant de lui demander, désemparée :

— Pourquoi ai-je l'impression que tu m'as trahie ? Ce n'est pas toi, ça.

Asarys vola une fois de plus au secours de celle-ci.

— Tu te trompes. Justement, c'est tout le contraire. Nous t'aimons trop pour laisser les Tout-Puissants de ce monde jouer avec ta vie. Tu ne le sais pas encore, Zoé, mais cet article vient sûrement de te sauver la vie, ainsi que celle de Faïz.

— Et vous ? Qui sauvera la vôtre ? demanda David d'une voix blanche.

Les yeux fixés devant lui, sans nous regarder, j'aperçus l'ombre d'un chagrin traverser son visage. Je voulus trouver quelque chose à répondre à ça, mais tout se confondait dans mon esprit. C'était comme s'il me manquait tout à coup une pièce du puzzle.

— Nous ? s'étonna Asarys. Nous comptons sur toi.

Elle attrapa la nuque de David afin de ramener son visage proche du sien et écrasa un énorme baiser sur sa joue. Des sourires apparurent sur nos lèvres, excepté sur celles de notre ami. David semblait être tourmenté par quelque chose qui nous échappait.

— Bon, allez, maintenant, nous pouvons nous péter le bide! s'exclama Lexy, heureuse de pouvoir enfin changer de sujet.