Chapitre 6.7

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FAÏZ

— Cet endroit est juste parfait. La vue y est magnifique, déclara Masha, les yeux écarquillés tout en caressant du bout de ses doigts la grande table du salon.

Au timbre de sa voix, Faïz comprit qu'elle n'avait pas l'intention d'entretenir la conversion bien longtemps. Le jeune homme savait analyser le langage corporel et traduisait sans aucune difficulté les signaux, même contradictoires, des femmes qui se trouvaient en sa présence. La plupart étaient attirées dans un premier temps par le charisme qu'il dégageait, puis par son confort de vie. Pourquoi un milliardaire insociable et à l'âme obscure ne rentrerait-il pas dans la case du parfait psychopathe, tout bon à enfermer ? Un homme sans le sou à l'esprit torturé n'avait aucun intérêt à être sauvé de lui-même ?

Masha se retourna vers l'homme, adossé contre l'un des murs du séjour, les mains enfoncées dans les poches de son pantalon. Il la fixait sans ciller. Gênée, elle essaya tant bien que mal de dissimuler son manque de confiance à cet instant. Faïz inclina légèrement la tête, ce qui la déstabilisa un peu plus. En effet, d'habitude c'était elle qui avait les cartes en main et jouait facilement de ses atouts, plutôt avantageux, auprès des hommes, mais là, c'était différent. Elle sentait les choses lui échapper.

— Vous avez perdu votre langue ? demanda Faïz d'une voix à la fois ferme et douce.

La jeune femme fit volteface et marcha en direction de la baie vitrée en se frottant les mains qui devenaient de plus en plus moites.

— Monsieur Mattew, je pense que vous êtes tout simplement en train de jouer avec moi. Vous savez exactement comment exercer votre contrôle sur les femmes.

Masha inspira profondément avant de se retourner de nouveau pour affronter le regard glacial de son interlocuteur tapi dans l'ombre.

— J'ai tort ?

Faïz, un petit rictus au coin des lèvres, s'avança doucement vers elle. Sans qu'elle ne puisse contrôler quoi que ce soit, son cœur se mit à s'emballer. Elle se sentit se ratatiner à chaque pas que ce dernier faisait vers elle.

— Vous connaissez déjà la réponse, lâcha le jeune homme maintenant tout proche d'elle.

Il la jaugea alors de haut en bas avant d'ajouter, le regard perçant :

— Ne perdez pas votre temps ! Je ne suis pas intéressé.

Masha, blessée, hésita à riposter. Elle n'en croyait pas ses oreilles. Jusqu'à aujourd'hui, aucun homme ne l'avait encore éconduite.

— Allons directement droit au but et parlons des projets de votre père, mademoiselle Bukovski.

Les mots manquèrent à Masha. Un air de résolution s'installa sur son visage. Déçue que ses charmes ne puissent avoir aucun effet sur ce dernier qu'elle désirait à cet instant par-dessus tout, la jeune femme, la mort dans l'âme, se décida à parler du sujet brûlant.

— C'est une question de semaines, voire de jours, commença-t-elle en prenant ses distances. Dans un premier temps, ils vont faire exploser le Dôme avec un procédé très élaboré puis s'ensuivront des attaques nucléaires bien ciblées dans tout le pays, mais aussi dans le monde entier. L'armée, constituée par le Maestro, fera exploser les usines chimiques de toute la région. Des virus contamineront la population ainsi qu'un agent infectieux très dangereux pour l'homme, élaboré par des virologues au service de mon père. Celui-ci a pour conséquence de causer les plus gros dégâts sanitaires que le monde n'a jamais connus. L'air deviendra alors irrespirable et plus aucune eau ne sera potable.

Les traits de Faïz, qui ne trahissaient jusqu'alors aucune émotion, se ternirent d'une angoisse profonde.

— Il y a autre chose ? J'ai l'impression que vous ne me dites pas tout, prononça le jeune homme sans lâcher cette dernière des yeux.

— Une dizaine de porte-conteneurs se dirigent en ce moment même sur le cercle arctique avec, à leur bord, des bombes thermonucléaires visant à détruire le plus de glaciers possible.

Faïz plissa les yeux avant de détourner le regard vers la baie vitrée du séjour. Il réfléchit un instant, sceptique à propos des paroles qu'il venait d'entendre.

— Pourquoi l'arctique ? finit-il par demander.

— Pour accélérer la dissolution du pergélisol.

— La glace renferme de nombreux virus, raisonna Faïz à voix haute. Ils ont besoin de la chaleur, d'où les menaces d'attaques sur les puits de pétrole et les centrales nucléaires.

— Exact ! Le Maestro va se servir de la fusion thermonucléaire.

— Ils vont détruire la structure de l'atome afin d'en faire fusionner d'autres qui auront la même charge électrique pour obtenir du plasma. La même matière qui constitue les étoiles et le soleil. Pourtant, les verrous technologiques ont toujours empêché d'envisager cette production d'électricité trop importante. L'armée d'Athanase va sûrement se servir de cette énergie pour anéantir également le Dôme.

— Des ingénieurs, des industriels, mais aussi des physiciens ont construit la machine H-ignition. Elle produit un champ magnétique intense durant un bref moment, mais ça suffit pour obtenir une température de quelques milliards de degrés.

— Assez pour accélérer la fonte des glaces sur notre planète en quelques minutes seulement. C'est l'arme la plus puissante jamais imaginée par l'Homme.

Faïz marqua une pause et vrilla ses yeux dans les iris de Masha.

— Quel est votre rôle dans cette histoire ? Pourquoi acceptez-vous de collaborer avec le gouvernement ?


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant