Chapitre 8.1

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J'étais en pleine conversation avec Charles et Lily qui venaient d'arriver à la villa, lorsque j'entendis Faïz descendre à toute allure les escaliers.

— Tout va bien ? demanda Lily à son fils qui surgissait dans le salon. On dirait que tu viens de voir un fantôme.

— Les tableaux de Victoria ? Ceux qui étaient dans sa chambre. Où sont-ils ?

— Ils sont toujours ici, soigneusement rangés. Pourquoi ? Que se passe-t-il ?

— Sors-les tous ! Je vais en avoir besoin.

Bien que j'éprouvasse beaucoup de colère à son égard, l'inquiétude prit le dessus à ce moment. Que s'était-il passé ces dernières minutes pour qu'il pâlisse ainsi à vue d'œil ? Charles, tout aussi anxieux, s'avança vers son fils, mais ce dernier l'arrêta net en brandissant sa main devant lui.

— Zoé, je dois te parler un instant.

Je le regardai avec scepticisme avant de le suivre dans l'entrée.

Malgré l'obscurité, je percevais chaque trait de son visage. C'était la première fois que j'étais confrontée à cette facette de sa personnalité. En effet, Faïz semblait complètement perdu, vulnérable, presque humain. Je détestai ce que je ressentais pour lui à ce moment-là. Non, ne craque pas, Zoé. Il t'a poussée à bout. Il soupira et parut chercher ses mots.

— Es-tu au courant pour Elijah et Condor ?

Les bras croisés, je levai un sourcil en affichant une légère grimace.

— Faïz, tout le monde est au courant pour Eli et Condor. Il a besoin de cet ami imaginaire. Ça ne fait pas de lui un pestiféré pour autant.

Ce dernier secoua la tête avant de planter dans mes yeux un regard fou. Sa voix devint alors un murmure :

— Les ailes de Georgia ? Qui les lui a données ?

Pendant quelques secondes, je restai silencieuse, m'efforçant de me remémorer le jour où ma fille avait reçu cet accessoire, si indispensable aujourd'hui dans sa vie.

— C'est son pèr... William. Je ne sais plus quand exactement. Dis-moi ce qu'il se passe.

— Rien ! Je dois juste régler un détail.

Mon cœur s'emballa, le silence de Faïz me rendait complètement folle. Ses yeux s'assombrirent et je compris qu'il avait repris le dessus sur ses émotions. Il m'observait avec attention quand la sonnerie de son portable se mit à sonner.

— Je suis en retard, grogna-t-il tout en lisant le message qu'il venait de recevoir.

— Qui est-ce ?

Ma question me surprit moi-même.

— Enfin, je veux juste savoir si c'est quelqu'un du groupe.

Ou Masha, pensai-je.

— Je dois me rendre au manoir de la Septième Terre. Julio m'attend. De nombreux Sylphes ont fait le déplacement. Barthey est déjà sur place.

En temps normal, j'aurais demandé si Martinez y était aussi, mais après ce qu'il s'était passé entre eux, je préférai ne pas prononcer son nom.

— Masha sera là ?

Ma voix trahissait mon mépris à son égard. Faïz releva brusquement son regard sur moi et répondit, presque mal à l'aise :

— Normalement, oui. Elle... elle a beaucoup d'informations à nous communiquer. Écoute, pour Elijah, préviens-moi quand tu le verras. Je dois le rencontrer. Ce sera l'occasion de m'entretenir un peu avec lui afin de mieux le connaître.

J'acquiesçai d'un signe de tête, prête à m'en aller pour rejoindre Charles et Lily dans le séjour, quand Faïz me retint par le bras. J'essayai de me contraindre à bouger, mais mes yeux restèrent scotchés sur cet homme aux cheveux aussi rebelles que d'habitude. Son geste, si petit qu'il soit, m'enleva un peu de poids qui pesaient lourd sur ma poitrine.

— Je ne suis pas la personne que Martinez a décrite. Je ne suis pas ce monstre, insista-t-il comme pour se convaincre lui-même.

À cet instant, j'étais trop perdue pour le réconforter. Mes yeux le regardaient, mais sans vraiment le voir.

— Non, tu n'es pas un monstre, mais ton comportement n'est pas non plus irréprochable. Martinez s'appuie sur de simples dossiers d'enquêtes.

Faïz cligna des yeux. Une certaine fragilité se lisait sur son visage si parfait.

— Je ne t'aurais jamais enlevé Georgia.

Sa voix délicate était presque un murmure. Je déglutis, ma gorge se serra en entendant son nom.

— Elle est ce qui m'est de plus cher. Je veux la voir heureuse autant que toi. Je suis une mère un peu bancale, je te l'accorde, mais je suis une bonne mère.

Le voile qui vint se déposer sur mes yeux m'empêcha de distinguer sa réaction. Je n'arrivai pas à ravaler mes larmes contenues depuis déjà un moment. Faïz se rapprocha un peu plus de moi et essuya délicatement les perles d'eau qui roulaient sur ma joue. Il enfonça ensuite une main dans sa poche pour y ressortir des petits bouts de papier déchirés qu'il me remit entre les mains.

— La décision du juge. Je l'ai déchirée au moment même où je suis sorti de ta chambre d'hôpital, ce matin. J'étais en colère. Tellement en colère que j'ai agi de manière impulsive, mais je te promets que je n'essaierais jamais de te prendre NOTRE fille.

Mon cœur se serra de nouveau. Je hochai la tête avant de poser mes mains sur son visage, sentant sa barbe naissante sous la paume de mes doigts.

— C'est plus agréable qu'une gifle, ironisa-t-il dans un chuchotement.

Je ne pus m'empêcher de rire franchement. Sa main vint caresser délicatement ma nuque, me coupant le souffle instantanément. Sa bouche n'était qu'à quelques centimètres de la mienne. Cette proximité me brûlait la chair. J'avais mal, j'avais si mal.

— Ne me détruis pas à nouveau, le suppliai-je.

— Plus jamais.

Il emmêla ses doigts dans mes cheveux avant de venir poser ses lèvres sur les miennes. Son baiser était aussi impatient que profond. Un long frisson me parcourut tout le corps. Il appuya son front contre le mien tandis que sa main se plaqua contre le creux de mes reins afin d'éviter que je ne bascule en arrière. C'est avec difficultés que je réussis à écarter mon visage du sien, le souffle irrégulier. Faïz inspira profondément avant de me relâcher avec regrets et de reculer d'un pas en plongeant ses yeux dans les miens.

— Laisse-moi une chance, Zoé. Une dernière chance.

— D'accord, mais avant, tu sauves le monde.

Un léger sourire carnassier vint se dessiner aux coins de sa bouche.

— J'y vais tout de suite !

Il consulta sa montre et fronça les sourcils :

— Merde ! Je suis vraiment en retard.

Avant que je n'aie eu le temps de réagir, il m'attira contre lui et déposa sur mes lèvres un rapide baiser que je lui rendis. Il ouvrit ensuite précipitamment la porte pour s'engouffrer dans la nuit fraiche.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant