Je ne pris pas la peine de me retourner quand j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir. Mes mains continuaient de plier mes vêtements avant de les déposer dans la valise. Quand le bruit de ses pas s'arrêta derrière moi, je bloquai ma respiration pour éviter de respirer la fragrance unique de son parfum.
— Ton vol est à quelle heure ? demanda Faïz d'une voix mal assurée.
— Dans la soirée !
— Mon père m'a informé que tu mettais ta maison en vente. Tu adores cet endroit...
— J'adorais, rectifiai-je sur un ton cynique et dur sans prendre la peine de le regarder.
Faïz ferma brutalement ma valise, ce qui me fit sursauter, et vint se placer de l'autre côté de la table, en face de moi. Je tournai aussitôt le visage et fermai les paupières, refusant de le regarder.
— Tu n'es pas juste, Zoé. Ne me mets pas leur disparition sur le dos. Elles étaient destinées à repartir.
— Tu t'es servi de moi !
— Nous avons déjà eu cette conversation quand nous sommes revenus à L.A, il y a plusieurs jours.
— C'est pour ça que je pars. Nous nous sommes déjà tout dit.
Je le fixai désormais d'un air sévère et froid. Il posa ses mains sur la table et se pencha vers moi. Je soutins, sans ciller, son regard.
— S'il n'y avait pas eu Georgia, m'aurais-tu demandé de prendre leur place ? Te serais-tu sacrifiée pour les sauver ?
Devant mon silence, des myriades d'émotions traversèrent son visage. Je détournai mes yeux de ses traits, déstabilisée par sa si grande fragilité.
— C'est bien ce que je pensais, souffla-t-il, brisé. Moi, tout seul, je ne compte pas assez pour que tu te battes pour ta vie et pour nous.
Mon comportement le faisait souffrir le martyre, j'en avais conscience. Seulement, ma haine envers le monde entier était bien trop grande. La seule personne que j'acceptais de voir était Ray, mais lui aussi avait disparu. Il préférait faire son deuil loin d'ici et je le comprenais. Je lui avais déposé ce matin, au bas de sa porte, le souvenir qu'Asarys lui avait acheté à Carthagène et qui était encore bien emballé dans son papier, comme elle l'avait souhaité. Je ne verrais peut-être jamais ce cadeau qui lui tenait tant à cœur et qui avait été moqué par Lexy durant toute une journée.
Je rouvris ma valise et continuai de ranger mes affaires à l'intérieur.
— Si je reste, je finirais par te détester. C'est ce que tu veux ? demandai-je d'une voix faussement calme. J'ai besoin de prendre de la distance, j'ai besoin de temps.
Faïz, désemparé, passa une main dans ses cheveux et s'approcha de moi.
— Non, c'est bien pour ça que je te laisse partir, mais n'oublie pas de revenir.
Émue, je levai ma tête vers lui et plongeai mes yeux dans les siens pour me laisser happer par ses iris aussi noirs et profonds que la nuit.
— J'aimerais pouvoir te le promettre, mais tu es bien placé pour savoir qu'aux premières lueurs de l'aube, les paroles de la veille ne restent malheureusement que des paroles. L'aube a cette fâcheuse tendance à ne jamais tenir ses promesses.
— Si tu m'aimes, tu la tiendras, lâcha-t-il à mi-voix.
Faïz s'approcha de moi et plaqua ses lèvres sur mon front. Sa douleur me transperça. Il inspira profondément et sortit de sa poche le collier avec les perles d'Eros. Le médaillon, en forme de cœur, avait été remplacé par un joyau tout aussi sombre et magnifique que le précédent. Bien que mes deux amies ne fissent plus partie de ce monde, je sentis leurs regards désapprobateurs peser sur moi. Je savais qu'elles auraient voulu que je pardonne, mais je ne pouvais pas.
Au moment de partir, je saisis la boîte où je rangeais les photos. Je constatai, surprise, que le cadenas sur celle-ci avait disparu. Mes doigts se mirent à bouger, hésitants à l'ouvrir. Après quelques secondes de réflexion, je décidai finalement d'y jeter un œil et découvris une lettre, posée au-dessus de la pile de photos. Lorsque je la pris, un cliché glissa au sol. Je m'accroupis pour la ramasser. Une violente décharge me paralysa et mes larmes se remirent à couler sur mes joues. Mon cœur, lui, se broya un peu plus. Sur la photo, prise à la fête d'anniversaire de Victoria, on pouvait y voir William, Victoria, Ray, David, Asarys, Lexy, Faïz et moi. Je reposai la lettre que je n'avais pas lue dans la boîte et me recroquevillai sur le sol, criant mon chagrin. Les paroles de Lily, prononcées le soir de cet événement, résonnaient dans ma tête :
— Vous permettez ? Je fais une photo souvenir.
VOUS LISEZ
Dark Faïz -T 3
ParanormalLes cinq dernières années n'ont pas épargné Zoé. Noyée dans un profond vague à l'âme duquel elle éprouve des difficultés à sortir, le retour de Faïz dans sa vie n'arrange pas les choses. L'amertume et la rancœur vis-à-vis de cet homme qui l'a trahie...