Chapitre 13.4-RAY

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Le jeune homme tapa quelques coups avec son semi-automatique sur les barrières métalliques pour prévenir de sa présence. Seul l'écho lui répondit. Ses yeux balayèrent les façades des immeubles quand soudain un murmure étouffé sembla lui parvenir de derrière. Il se retourna brusquement, mais à part l'ambulance et les deux véhicules, il n'y avait rien ni personne. Son cœur s'affola et le sang contre ses tempes se mit à taper fort.

Barthey étudiait la scène, les yeux plissés. Il trouvait le comportement de Ray de plus en plus étrange, lui aussi. Bien qu'il fût tout le contraire de Faïz avec une bonté d'âme et une intégrité à toute épreuve, quelque chose depuis quelque temps paraissait ronger celui-ci de l'intérieur. L'inspecteur connaissait la raison, ou plutôt, l'appellation de son mal-être : il se nommait Asarys. Karl savait à quel point l'amour pouvait faire des ravages. Il avait vu bon nombre de collègues ou de connaissances sombrer dans les abîmes sans fin du désespoir à cause de ce sentiment à la foi fabuleux et chaotique, conduisant des gens normaux à commettre des actes atroces au nom d'une seule personne. Barthey se mit à regarder tout autour de lui, laissant son flot anarchique de pensées engloutir son intuition.

Ray franchit le barrage après avoir poussé les barrières. Ce fut alors que des bruits de pas résonnèrent. Le jeune homme saisit de nouveau son arme et la braqua devant lui, le doigt sur la gâchette. Trois hommes et une femme, à la carrure imposante, sortirent d'un des bâtiments. Bien qu'ils portassent des uniformes imitant ceux des militaires, ils n'étaient rien de tout ça. Mitraillettes à la main, les rebelles s'approchèrent de Ray, le regard féroce, sans aucune trace d'humanité dans les yeux.

— Les spectres avaient dit que vous viendriez, déclara la femme dont la moitié du crâne était rasé.

De nombreux piercings ornaient son visage, et ses yeux, accentués d'une couche de crayon noir, lui donnaient un air terrifiant. De nombreuses entailles recouvraient ses bras. Celles-ci étaient récentes et laissaient penser qu'elle s'était battue il y avait peu de temps.

— Laissez passer l'ambulance ou je vous explose la cervelle, menaça Ray avec une dureté sans compromis, l'arme toujours braquée sur eux.

Le sourire des quatre protagonistes s'élargit, se transformant en une grimace sinistre et prédatrice. Un des hommes leva les yeux sur les façades des bâtiments.

— À ta place, je ne ferais pas ça, murmura-t-il avec une pointe d'ironie et un sourire artificiel.

Au loin, Barthey avait, lui aussi, sorti son arme. La tension était à son comble. Le vent implacable lui écorchait le visage. L'inspecteur vit la porte arrière de l'ambulance s'ouvrir et le visage inquiet de Lily apparaître.

— Restez à l'intérieur ! lui somma Karl avec de grands gestes.

Cette dernière obtempéra. Barthey se frotta les yeux avant de revenir sur Ray qui était en grande discussion avec ce qui paraissait être la cheffe de ce petit groupe.

David avait rejoint l'inspecteur, prêt aussi à intervenir en cas de besoin.

— Bon sang ! Que peuvent-ils bien se raconter ? marmonna Karl, anxieux.

— Pourquoi ne nous attaquent-ils donc pas ? s'interrogea le jeune homme à voix haute.

— Aucune idée. Ils semblaient nous attendre.

Soudain, les rebelles s'écartèrent de Ray et celui-ci leva les bras en direction de l'inspecteur pour leur indiquer que la voix était libre.

— Remontez dans la voiture, ordonna Barthey à David. Apparemment, et je ne sais par quel miracle, ils nous laissent passer.

Le camp militaire, installé au Grand Park dans les Downtown et transformé en hôpital de fortune, grouillait de blessés et de militaires à l'agonie. Ce spectacle chaotique donnait une idée de la terrible bataille qui se déroulait en ce moment même plus au nord de la ville.

À l'extérieur de l'immense tente, Ray faisait les cent pas tandis que David, situé un peu plus loin, recevait les dernières informations sur l'état de l'avancée des cargos dans l'Océan arctique. Lily, rongée par l'inquiétude, priait, les mains jointes et les yeux clos. Après une longue attente interminable, Barthey sortit du chapiteau accompagné d'un médecin plus proche de la retraite que d'un début de carrière. Lily et Ray se jetèrent aussitôt sur lui.

— Comment va-t-il ? s'empressa de demander le jeune homme.

Le médecin regarda ses fiches au-dessus de ses grosses lunettes qui lui retombaient sur le nez et s'approcha de Lily pour lui faire part des dernières nouvelles.

— L'état de votre époux est stable, madame Mattew.

— Dieu merci, déclara-t-elle au bord des larmes, soulagée.

Ray enroula son bras autour de son épaule, heureux lui aussi, de savoir que Charles allait s'en sortir.

— Nous devons continuer de lui prodiguer les soins nécessaires à son bon rétablissement, continua le médecin avec un sourire réconfortant, mais les Léviathans ont un pouvoir de guérison plus rapide que les gens normaux.

Barthey, avec un signe de tête, fit comprendre à Ray qu'il devait le suivre. Les deux hommes s'éloignèrent, laissant Lily entrer seule dans le chapiteau pour se rendre au chevet de Charles.


Dark Faïz -T 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant