Chapitre 108

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LOLA

Avec ses gros sabots, elle monta les escaliers, furieuse. Peut-être devrait-elle redescendre d'un cran avant d'enfoncer la porte de Jude. Ou peut-être pas. Swann souffrait tellement au quotidien, elle n'aurait jamais cru que son propre frère l'aurait repoussé. C'était inconcevable. Comment pouvait-on rejeter quelqu'un simplement parce qu'il aimait le même sexe ? C'était incohérent et complètement ridicule.

Elle se présenta devant le battant, inspira avant de bomber le torse et martyrisa la sonnette avec humeur. Peut-être qu'Elody était là. Elle espérait que non. Sa colère avait besoin d'être déchargée et elle ne ferait aucune distinction. Si Swann faisait marche arrière après tout le chemin qu'il avait parcouru, elle ne s'embêterait pas de gants pour juger Jude coupable.

— Bordel, qui est le con qui fait ça ?! s'énerva Jude en ouvrant brutalement la porte.

Leurs regards entrèrent en contact et firent des étincelles. Par pur sadisme, Lola gardait le doigt enfoncé sur la sonnette sans jamais cesser de fusiller le noiraud du regard. Si ses prunelles avaient été des armes, le corps de l'étudiant serait criblé de balles.

— Bordel, enlève ton putain de doigt ! ordonna Jude en chassant la main de la rouquine.

Sans demander, elle s'engouffra dans l'appartement en le poussant. Il râla contre elle et haussa même la voix, n'arrivant pas à croire que cette dernière se permettait autant de choses. Il la suivit jusqu'à son salon et soupira en rencontrant son regard électrique. Son petit doigt lui disait qu'elle n'était pas venue pour rien.

— Quoi ? l'agressa-t-il.

Il n'avait aucunement l'intention de supporter les humeurs d'une petite jeune de vingt-et-un ans.

— Je crois que tu n'es pas en droit de te montrer aussi belliqueux, Jude, l'attaqua-t-elle.

Il carra la mâchoire et s'apprêta à rétorquer, mais la jeune femme fut plus rapide. Plus vindicative.

— Je ne savais pas que Jude Moreau était un trou du cul. Tu surprends Swann et Alban et la seule chose que tu arrives à faire, c'est fuir ?! Tu as vingt-cinq ans, non ? Quand tu surprends quelqu'un, déjà la moindre des choses seraient de s'excuser. Parce que tu es rentré dans leur intimité. Ensuite, tu aurais sûrement dû rassurer Swann et lui dire que tu l'aimes. Parce que tu l'aimes, non ? Qu'il soit attiré par un zguègue ou non ne devrait rien y échanger. Alors j'espère que tu as une super excuse pour expliquer l'état dans lequel j'ai retrouvé ton petit-frère qui, il me semble, allait parfaitement bien avant tu ne gâches tout.

Elle croisa les bras sur sa poitrine et tapota du pied contre le plancher, impatiente. Son sang bouillonnait dans ses veines d'une colère à peine contenue. Elle assurait en tous temps que l'entourage de Swann accueillerait son aveu avec bienveillance et Jude venait mettre le boxon dans une situation déjà bien trop complexe.

Le plus vieux observa la rouquine, ouvrit plusieurs fois la bouche, puis soupira. Il se passa une main dans les cheveux qu'il ébouriffa distraitement, puis se laissa tomber sur le sofa. Il écarta les jambes et se prit la tête dans les mains, fatigué. Lola était sûrement à mille lieues de connaître exactement son ressenti.

— C'est juste... j'étais surpris, ok ?

— Tu t'es barré, Jude ! l'accusa-t-elle sans défroncer ses sourcils. Tu ne sais pas dans quel état se trouve Swann. Tu ne sais pas ce que ta réaction a déclenché. Tout ce que tu as vu, c'était deux mecs ensemble et tu t'es cassé comme une flipette. T'imagines simplement ce qu'a pu penser ton petit frère ? Tu veux que je te le dise ?

My Heavy SecretOù les histoires vivent. Découvrez maintenant