A P O L L O N

5.8K 730 134
                                    

Musique ~ Sulk

LXXXIII

Des lumières dans l'obscurité, plein de lumières. Rouges, bleues, vertes, dorées, argentées. Des paillettes, des strass, du cristal, du champagne. Des ombres par centaines, des ombres mouvantes au rythme des basses. De l'alcool, du lâcher prise, du laisser aller, beaucoup de musique, encore des lumières, de la drogue, des jeux, des cris, des yeux fermés, des corps qui dansent. Yunes ne savait même pas pourquoi Rudy les avait amené ici, dans la plus grosse boite de New-York. Le brun avait des cernes sous les yeux et semblait épuisé, mais cette sortie semblait lui être vitale, alors Yunes n'objecta rien.

Rudy avait sortit la plus belle voiture des garages de la maison pour cette occasion, et le blond pu enfin se rendre compte de la proportion que prenait la popularité de Rudy au sein de cette ville. Tout le monde le connaissait. Tout le monde savait que Rudy Gianelli était entré dans ce sous sol. Les visages se tournaient, des filles le touchaient, il était un véritable petit coq, le chouchou des riches, la belle gueule des magazines. Yunes se sentait mis à l'écart de ce monde, il le regardait comme par delà une vitre. Il était de nouveau intouchable, et il ne voyait rien dans ses yeux qui puisse lui permettre de le reconnaître. Quelque chose avait changé...
Il venait de le trouver dans une baignoire d'eau glacée en tête à tête avec la mort, et il le regardait maintenant danser après avoir snifé au moins un rail de coke.
Il ne comprenait pas où il voulait en venir ; c'était comme une autodestruction en direct, en épuisant son corps le plus possible.

"Ce soir ne pose pas de question s'il te plaît." Lui avait-il demandé dans la voiture. Yunes se remémora cette demande alors qu'il voyait Rudy sur la piste de danse, les yeux clos au milieu des gens, se laissant porter par la musique. Il sentait qu'il devait faire une concession, Rudy semblait avoir besoin de cette soirée à tout prix, sans qu'il ne sache pourquoi. Le brun était passé devant les tables de poker sans même s'y intéresser, ce qui étonna Yunes... Rudy n'aurait pas refusé une partie de poker. À la place il dépensa sans compter et paya pour que la soirée soit aussi arrosée que possible avec les bouteilles les plus chères. Cette nouvelle folie amusa Yunes un temps, mais la démesure était telle qui ne pu s'empêcher de penser que quelque chose clochait... Il préféra passer au dessus des apparences sans se méfier, retirant sa veste et son pull pour le rejoindre dans la foule. Rudy l'attira près de lui et l'embrassa langoureusement comme si rien d'autre ne comptait. Il commença par donner à Yunes un petit cachet blanc qu'il plaça sur sa langue. Le blond était en train de lâcher prise à son tour, se laissant entraîner par la foule et le rythme. Le rythme de la musique ou de son cœur il ne savait plus. Son cerveau était déconnecté. Le temps ne s'écoulait plus, tout se déroulait au ralentit, comme une scène de film, comme avant que quelque chose ne se passe.

Ils burent beaucoup de champagne. Rudy se retrouva rapidement torse nu au milieu des gens, oubliant son habituelle pudeur. Cela semblait être le cadet de ses soucis, tous ses principes paraissaient dissipés, envolés, balayés par cette soirée. Les gens criaient, dansaient, sautaient, buvaient, filmaient. Même les strip-teaseuses sur les balcons avaient les yeux rivés sur le brun, comme si cela n'était pas normal qu'il se trouve ici ce soir. Son visage était passé tant de fois à la télé, il n'était pas seulement le fils de Mr Gianelli ; c'était l'idéal d'une jeunesse accro à l'argent, à la beauté et à la popularité.

Yunes se retrouva lui aussi à snifer une dose de coke, pour la première fois, et tout dégringola, les limites et les barrières étaient toutes tombées sous son crâne. Maintenant il ne s'agissait plus que de sentiment purs. Sans apparence formatée. Ils dansèrent l'un contre l'autre jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce qu'ils soient sûrs de ne jamais oublier cette soirée, que jamais ils n'auraient autant dansé. Yunes voyait des flashs de toutes les couleurs, perdant légèrement l'équilibre et riant sans aucune retenue. Jamais il n'avait autant embrassé Rudy en une nuit, jamais il ne s'était sentit aussi proche de lui.

Rudy n'eut même pas besoin de réserver une chambre pour qu'on lui en trouve une. Les deux garçons s'embrassèrent dans les moindres recoins de la boîte de nuit, puis dans leur chambre, contre la baie vitrée, sur une commode ou sur le lit, rien n'était suffisant.
Les langues se délièrent aussi, quelques mots s'échappèrent doucement, quelques phrases parfois, des jolis choses, des mots d'amour. Yunes ne s'était jamais autant sentit désiré que ce soir là. Rudy posséda son corps de la peau de son cou jusqu'à ses cuisses musclées, caressant son dos, agrippant ses hanches, embrassant ses paupières, magnifiant tout son être comme un diamant brut en train d'être poli.
Le blond transpirait, il n'en pouvait plus. Jamais il n'avait fait l'amour aussi longtemps et aussi intensément. Le peu d'esprit qu'il lui restait se demanda s'il était permit d'aimer quelqu'un à ce point. Dieu que c'était rude. Mais quel délice.

Et ils retournèrent danser, encore et encore, en proie aux effet de la drogue et de l'endorphine que leurs rapports physiques leurs procuraient.
L'espace temps s'était détendu, comme un élastique. Les secondes semblaient être des minutes, les minutes des heures, les heures des années, les années toute une vie.

Rudy était beau comme un dieu. Mais Yunes ne savait plus lequel prendre pour l'illustrer... Apollon ? Ou Hadès ?... Adulé et convoité de toutes parts. Ses bijoux scintillaient dans l'obscurité, faisant briller son cou fraîchement marqué, ses oreilles et ses doigts qui voyageaient dans l'air chaud au rythme de la musique avant de revenir à leur emplacement initial, sur la peau brûlante de Yunes qui dansait comme un diable près de lui, riant librement, laissant aller son sourire d'enfant. Quel privilège d'aimer quelqu'un et d'en être aimé en retour. Quelle chance de ne pas être seul ce soir... Il oubliait tout, parce que cette fois c'était sûr, c'était la dernière.

HEY, RUDYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant