LXXV
Les lumières vacillèrent encore quelques instants devant leurs yeux fatigués, puis la réalité les frappa de nouveau, Yunes percuta qu'il se tenait à côté d'un homme qui avait essayé de le tuer, et qui l'aurait sûrement fait en d'autres circonstances. Et même s'il découvrait une agréable partie de l'âme d'Andrew, il était conscient que jamais ; jamais il n'arriverait à lui pardonner complètement de l'avoir un jour soumis à lui par la force.
Yunes écrasa son mégot sur le métal froid du garde-fou et tourna la tête vers Andrew.
Il s'apprêtait à ouvrir la bouche quand la sonnerie de l'entrée retentit dans l'appartement. Yunes fronça les sourcils et se redressa, qui pouvait bien être devant sa porte à cette heure ?— Je serai toi j'irai pas ouvrir. L'avertit Andrew qui n'avait pas bougé, sa clope entre ses lèvres, ses yeux rivés sur Paris, paisible.
Les sourcils du blond se froncèrent encore plus et il entendit la porte d'entrée qui s'ouvrait ainsi que la voix de Rudy.
Il n'écouta pas le conseil d'Andrew et descendit au rez-de-chaussée, plus qu'intrigué.Yunes aperçu Rudy dans l'embrasure de la porte d'entrée dos à lui, face à un homme habillé de noir qu'il avait du mal à discerner dans l'obscurité de l'entrée.
Le brun avait entendu ses pas rapides dans l'escalier et lui fit un geste de la main sans même le regarder pour lui faire signe de rester là où il était.
Le blond s'arrêta donc net et ne bougea plus, il se trouvait une fois de plus en position de spectateur, ne comprenant pas ce qu'ils se disaient. Puis il entendit Andrew derrière lui qui descendait les escaliers à son tour, tranquillement. Ce dernier adressa un regard à Yunes qui semblait vouloir dire « tu vois, je te l'avais dit que ça ne servait à rien de descendre ».
Puis il regarda Rudy sortir de l'appartement avec l'homme en noir, sûrement pour ne pas qu'il ne les entende.Andrew attrapa son manteau posé sur le dossier d'une chaise et griffonna quelque chose sur un papier qui traînait sur la table recouverte de marbre gris.
— Tiens, tu donneras ça à Elias de ma part. C'est le moment que je parte. Avec un peu de chance ce mec peut me ramener à New-York gratuitement.
Yunes attrapa le petit papier et vit un numéro de téléphone inscrit dessus. Il le mît dans sa poche.
— C'est qui ce mec ?
Andrew haussa les épaules l'air indifférent.
— J'en sais rien ça doit être l'un des sbires du père de Rudy...
— Et pourquoi est ce qu'il te ramènerait à New-York gratuitement ?
Andrew leva les épaules.
— Parce que Rudy va le lui demander j'imagine. Il est sans doute venu en jet privé, alors je pense qu'il lui reste assez de place pour me prendre avec lui et faire économiser à mes parents un billet d'avion à cinq cent dollars.
— Pourquoi est ce que tu ne restes pas plus longtemps ?
L'attitude d'Andrew lui semblait énigmatique. Il ne pouvait pas croire qu'il était venu à Paris juste pour voir Rudy le temps d'une journée. Cela cachait quelque chose. Andrew afficha un rictus sur le coin de ses lèvres tout en enfilant son manteau.
— On ne vient pas tous ici pour prendre des vacances tu sais. J'ai fait ce que j'avais à faire ici et maintenant je rentre fêter Noël avec ma famille.
Puis il se dirigea vers la porte.
— Merci pour cette soirée en tous cas, c'était sympa. On se voit à la rentrée, j'espère.
Puis il referma la porte derrière lui.
Le blond resta sans bouger, jetant un coup d'œil rapide à Elias qui semblait dormir paisiblement sur le canapé du salon.
Il remonta dans sa chambre, sachant parfaitement que rester là ne lui apporterai rien. Il éteignit les lumières et regarda son portable qui affichait quelques notifications dans la pénombre de sa chambre, uniquement éclairée par les luminaires jaunes de la rue.Puis il entendit des voix à l'extérieur, avant de se rendre compte que c'était celles de Rudy, d'Andrew et l'autre homme en noir. Ils étaient en train de parler sous sa fenêtre. La curiosité le piqua et il s'assit sur le rebord de sa fenêtre qu'il ouvrit à l'espagnolette dans un petit grincement.
— ...... désolé Will mais je ne vois pas de quoi tu veux parler. C'est pas la première fois que mon père se fait escroquer.
— Votre père souhaite porter plainte contre vous et ceux qui vous ont aidé. Donnez-moi les codes et ça n'ira pas plus loin.
— Puisqu'il vous dit qu'on a rien à faire là dedans ! Chlaus passe son temps à jouer, pas étonnant qu'il perde un million de temps à autre. Il peut bien aller porter plainte, sans preuves ça ne mènera à rien du tout.
Yunes reconnu la voix d'Andrew. L'homme en noir soupira.
— Très bien, je ne peux pas vous emmenez puisque vous êtes majeur mais je vous conseille vivement de rentrer. Peu de gens savent que vous êtes ici, mais sachez qu'à New-York les rumeurs s'ébruitent. L'enquête sur le meurtre dans lequel vous semblez être impliqué avance plus vite que prévu. L'inspecteur en charge de l'enquête semble déterminer à vous faire plier, et même si je ne connais pas la vérité, vous risquez très gros. Votre tête a été mise à prix dans certains gangs de la ville puisque le dénommé Jack était leur fournisseur principal de drogues et d'armes en tout genre. Au moins près de votre père, vous bénéficiez d'une protection.
Un blanc s'écoula.
— J'ai entendu. Rentrez à New-York et dites à mon père que je rentrerai bientôt. Maintenant partez, et emmenez Andrew avec vous.
— Comme vous voudrez.
Puis plus rien. Yunes entendit la porte d'entrée s'ouvrir et referma rapidement la fenêtre avant de se glisser sous sa couette comme si de rien était. Il n'arrivait pas à comprendre tous ce qu'il venait d'entendre, mais la moitié suffisait à lui donner la chaire de poule. Il entendit Rudy monter les escaliers et ouvrir la porte de la chambre. Il se déshabilla partiellement et se glissa dans les draps à son tour.
Yunes était dos à lui et ne parvenait pas à fermer les yeux, il était attentif au moindre de ses mouvements. Sa respiration était plus rapide que d'habitude, et ça voulait dire beaucoup de choses.
Il se tourna vers lui mais ne dit rien. Il faisait trop sombre pour qu'il puisse distinguer quoi que ce soit des traits de son visage ou de la couleur de ses yeux.
Rudy quant à lui ne bougea pas d'un pouce, comme indifférent à sa présence, l'esprit ailleurs. Yunes savait parfaitement qu'il était dans une phase où il supportait plutôt mal la douceur et le contact, il avait besoin d'être seul en quelque sorte. Yunes ferma les yeux, il ne pouvait pas faire grand chose de plus.
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HEY, RUDY
Romance« Rudy c'est comme un orage, ça prévient pas, c'est derrière le brouillard, et le jour où ça pête à la gueule de tout le monde, on est bien emmerdé. » C'était ce qu'on disait. Yunes est dans sa dix-huitième année, lorsqu'il le rencontre : Rudy. Comm...